J'ai lu hier soir le dernier Gaston Lagaffe et ... je me suis régalé. Mais oui !
Je ne parlerai pas de la ressemblance (voulue et recherchée) du style graphique, mais simplement des gags eux-mêmes, qui sont souvent parfaits. Certes, on y retrouve beaucoup d'idées de Franquin (les parcmètres, le Gaston en Latex, la boule de bowling etc.) mais Delaf y ajoute son inspiration personnelle et ... ça marche !
J'ai rigolé de nombreuses fois en lisant cet album et cela faisait longtemps qu'une nouvelle BD ne m'avait pas fait rire comme cela.
Et en y réfléchissant bien, ces éclats de rire s'expliquent très bien ! Delaf a en effet bien compris la mécanique du rire utilisée par Franquin, qui fait appel à une multiplication des détails et des petits gags. il n'y a pas que la chute finale qui compte ! Beaucoup de cases manient une ironie verbale assez cinglante, et les situations humoristiques intermédiaires apparaissent presque à chaque ligne. Comme chez Goscinny, le rire nait d'une accumulation de drôleries.
Une autre caractéristique que l'on trouvait déjà chez Franquin, c'est le dynamisme et la nervosité du dessin ! Cela bouge tout le temps, comme dans un dessin animé et l'œil ne se repose en fait jamais. Il n'y a pas de temps mort et le rire est parfois nerveux. il devient une manière de reprendre son équilibre.
Tout comme son mentor, Delaf surcharge son dessin et crée volontiers des empilements de motifs qui deviennent presque surréalistes, et tout simplement comiques. Les détails rigolos ou ironiques se multiplient et on ne peut pas tout remarquer en première lecture. Il faut relire l'album pour savourer certains détails.
Il y a aussi une incroyable violence et une indéniable férocité chez Delaf, bien plus que chez Franquin qui maltraitait pourtant lui aussi ses personnages avec une joyeuse inconscience. J'imagine que certaines images cruelles vont déplaire aux éternels censeurs dont notre monde actuel est rempli. Mais je pense pour ma part que ces petites transgressions du bon goût font aussi partie de la mécanique du rire. Delaf ose presque tout, bien davantage que Franquin d'ailleurs, et c'est probablement pour cette raison (à mon avis) qu'il réussit encore à être drôle.
Bref, j'ai passé un bon moment et ce "nouveau Gaston" ne se contente pas de jouer avec la nostalgie du lecteur. Il retrouve l'humour vivace et imaginatif (et parfois transgressif) de la série et c'est donc une œuvre que l'on peut savourer avec simplicité, au tout premier degré. Pour ce qui concerne le second degré, en revanche, il y aurait toute une analyse à faire mais je n'ai pas envie de critiquer. Quand on me fait rire, je pardonne beaucoup de choses.
EEEE