La lecture du Week-end, c'est finalement
Kivu, eh oui !
Acheté au départ pour savourer le dessin de Christophe Simon, ce livre m'a en fait permis de découvrir bien autre chose, à savoir un récit possédant une vigueur et un réalisme inattendus. Kivu est en effet un manifeste, un livre qui dénonce les exactions dont sont victimes les habitants de la province congolaise de Kivu. Van Hamme a donc soigneusement construit son scénario, avec l'intention de prendre le lecteur à la gorge, et de le mettre en face de certaines atrocités qui pourraient paraître assez lointaines.
Et cette démonstration est d'autant plus efficace que le début est assez sage. Au départ, un jeune diplomé, nommé François Daans est envoyé en Afrique pour superviser une opération d'embauche. Ce travail ne semble être pour lui que du business, mais bien sûr, le héros ne sait pas ce qu'il attend.
Malheureusement, celui que le jeune directeur doit engager, c'est tout simplement un chef de guerre qui sera chargé de terroriser la population Hutu. En pratique, cela signifie que ce chef va massacrer les bébés et les vieillards, violer et mutiler les femmes, et transformer les hommes en esclaves. Daans trouve bien sûr cette nouvelle plutôt difficile à avaler.
Pris au piège, et réalisant qu'un refus de faire son travail aura pour conséquence de le transformer en cible, Daans va essayer de rester fidèle à la plus élémentaire des morales. Il va également sauver une petite fille qu'il a recueillie pendant ses déplacements, et ce choix l'amènera à se réfugier dans la clinique du Dr Murkwege, un personnage réel et héroique à qui ce livre militant rend en fait hommage.
Presque dépourvue d'exploits héroïques et de scènes trépidantes, cette histoire dramatique se cantonne dans le plus strict des réalismes, et Van Hamme réalise ainsi un coup de maître. En évitant de donner à son récit le style d'un thriller, il réussit à créer une BD adulte et responsable. Kivu est en effet une BD qui se met entièrement au service d'une cause, et qui évite tout effet factice.
Lui aussi dévoué au message militant de Van Hamme, Christophe Simon dessine ce drame féroce avec une étonnante sobriété. Ses images évitent les cadrages spectaculaires ou les couleurs criardes, et privilégient les gros plans ainsi que les émotions des personnages. Cette mise en scène toute classique se révèle parfaitement efficace, car elle appuie les intentions du scénariste qui sont de pousser un cri de colère. Et c'est ainsi que semblable à tous les lecteurs de ce livre, je me suis retrouvé ému, et également un peu en colère, de découvrir une telle réalité au XXIème siècle.
C'est donc un très bel album, qui dévoile une réalité contemporaine peu connue, et qui nous donne à réfléchir.
J'ai beaucoup aimé !