Suite à une relance du sujet
La case mémorable par Raymond, je me suis souvenu d'une case qui me donne toujours le
frisson, tellement je la trouve chargée d'émotion.
Et je me suis rappelé qu'il y avait un sujet consacré à cela, car il y a une différence entre
case mémorable et
BD qui donnent le frisson.
Raymond a écrit:Je te propose de laisser le sujet "case mémorable" comme il est, et de se concentrer maintenant uniquement sur cela. Dans "les BD qui donnent le frisson", il y avait une autre idée, celle des belles séquences d'images (ou des belles cases) qui atteignent une sorte de sommet artistique du 9ème Art. Cette impression d'être face à un chef d'œuvre peut réveiller une émotion bien particulière, et c'était cela que je voulais discuter.
Une case mémorable est bien sûr intéressante, mais elle ne doit pas forcément être artistique. Elle peut tout simplement être très efficace et frapper ainsi beaucoup l'imagination. Les deux sujets sont donc un peu différents.
Je trouve que c'est plus adapté d'en parler ici. Je vous préviens tout de suite, que dans mes explications, je vais dévoiler la fin de cette BD. Si vous ne voulez pas la connaitre, arrêtez de lire mon post
Il s'agit d'une image de la dernière page de
Le Voyage en Italie de Cosey.
C'est une nuit en hiver et nous voyons Shirley, dans une cabine de téléphone public. Elle a le combiné dans sa main et nous ne savons pas si elle va passer un coup de fil ou si elle a terminé un appel. Elle est éclairée par la lumière des néons de l'enseigne publicitaire pour une marque de bière. Nous voyons qu'elle a une valise avec elle.Les frissons que me donnent cette image, sont les résultats d'une dose d'émotions qui s'intensifie crescendo. Pour comprendre la raison pour laquelle cette case a une intensité si particulière, il faut revenir en arrière dans le récit.
Mais d'abord, quelques explications du récit.
Qui est Shirley ? Shirley, c'est l'amour de jeunesse compliqué entre elle, Ian et Art. 15 ans plus tard, elle a ressurgit dans leurs vies. Bien sûr que de nombreux souvenirs reviennent avec elle. Mais maintenant, ce trio est devenu un quatuor, car il y a Keo, une petite fille qui fuyait les Khmers rouge sur un boat people.
Nous voici, 2 pages avant la case.
En revenant un petit peu plus tôt dans le récit, nous comprenons qu'elle passait un coup de fil avec un de ses deux amours de jeunesse: Art. C'est une heure du matin, en pleine nuit sombre. Art répond, mais il n'a pas mis de lumière dans la pièce. Dans la 3ème case, il suppose que c'est Shirley qui l'appel depuis l'Europe. Shirley ne parle pas, mais Art sait qu'elle l'appel pour savoir si Keo a été adoptée. Alors dans la 6ème case, il le lui dit avec force KEO EST LA [...]
Shirley reste son premier amour, toutefois, dans la case 7, il annonce à Shirley que maintenant il vit avec Daisy.
Si Art dit que
c'est incroyable mais que maintenant il est amoureux de Daisy, c'est qu'au début de sa relation avec Daisy, ce n'était qu'un "mariage blanc" car pour adopter Keo, il devait être marié. Ainsi, si Art insiste de dire qu'il aime Daisy, cela sous-entends que c'est définitivement fini avec Shirley. Art a passé à autre chose.
Puis, Art va parler de Ian, le 3ème de ce trio...
Un silence... et après le silence des cases 1 et 2, Art, se contente de dire "C'est plus qu'un page qui s'est tournée". Il ne dira rien de plus à Shirley, mais le lecteur a appris précédemment dans le récit que Ian a été interné en asile psychiatre et qu'il s'est suicidé.
A la case 5, ce que dit Art, explique que tout est bien fini pour ce trio et dans la case 6, il s'apprête à raccrocher définitivement. Mais dans la case 7, il reprend le combiné pour souhaiter "tout de bon pour la suite". A remarquer qu'il ne va plus le souhaiter à Shirley, mais à Shirley Muir. De prononcer le nom de famille de Shirley, annonce que maintenant il y a une distance entre lui et elle.
Il allume la lumière pour rejoindre Daisy, son épouse, son nouvel amour.
Le côté symbolique est-là. Il a entretenu le monologue avec Shirley dans le noir. Ce qui exprime que cette partie de sa vie est finie, Shirley, le trio, tout ça c'est du passé. Il raccroche avant d'allumer la lumière.
Je ressens derrière ce geste anodin d’appuyer sur interrupteur, qu'il a décider de se concentrer sur sa nouvelle vie. Une vie lumineuse avec Daisy et Keo. Le mot
Fin apparait et la lumière reste allumée...
Si Art se répetera "Bien plus qu'une page" cela peut signifier qu'un pan important de sa vie est définitivement terminé.
Le mot
Fin, prend comme signification que pour Art, que l'histoire avec Shirley est définitivement terminée.
Cosey est un génie pour la narration dans cette BD. (J'étais devant un choix "cornélien" pour Cosey dans
Mes 15 albums indispensables et j'ai choisi L'espace bleu entre les nuages)