Parlons tout de même de l'album de BD
Revoir Paris, qui ne fait pas partie du cycle des
Cités Obscures, mais qui porte bien la marque des œuvres conçues par Peeters et Schuiten.
Cette histoire de science fiction commence dans l'espace intersidéral, où se sont enfuis un groupe de terriens effrayés par la dégradation des conditions de vie sur notre planète. Un siècle plus tard, l'idée leur vient de reprendre contact avec les survivants terriens. Une jeune fille nommée Kârinh est envoyée à bord d'une fusée en direction de la Terre, en compagnie de "volontaires" pour la plupart âgés et plongés dans un état de narcose.
Lorsque l'histoire commence, on découvre une jeune fille qui erre dans un grand vaisseau spatial vide, avec pour seule compagnie un robot vocal. Elle doit faire de l'exercice physique tous les jours, pour entretenir son état de santé, et cette situation fait irrésistiblement penser au début de "
2001 l'Odyssée de l'Espace".
Kârinh est toutefois une rebelle qui n'obéit à aucune consigne. Plutôt que de veiller à la bonne marche du vaisseau, elle préfère se plonger dans de vieilles revues qui racontent le brillant passé (et la légende) de Paris. Elle se réfugie aussi dans une univers proche de celui des songes, induit par la consommation de plantes psychotropes, qui lui permet de découvrir avec une ville utopique. La jeune fille est en effet une "utopiomane", et la cité qu'elle visite fait étrangement penser aux visions d'Eugène Robida, ou au "Pahry" de François Schuiten.
Après quelques incidents que je ne détaillerai pas, le vaisseau spatial arrive sur la terre. Les astronautes débarquent dans une sorte de sombre banlieue parisienne, et se font aussitôt submerger par la foule. L'air est étouffant (puisque la température planétaire a beaucoup augmenté
) et les voyageurs subissent le sort habituel des novices qui pénètrent dans une grande ville inconnue.
"Revoir Paris" ! C'est en fait la seule chose que Kârinh souhaite, et la jeune fille part aussitôt vers le centre de la cité. Mais qu'est devenue en fait la "cité lumière" ? Est-ce un grand centre commercial ? Un lieu en ruine ? Ou une "ville-musée" ? Le lecteur ne le saura pas avec la lecture de ce premier tome, mais il découvre une étrange cloche géante qui cache ... les restes d'une cité ?
Pour Kârinh, qui est proche de réaliser de ses rêves, sera-ce l'enfer ou le paradis ? Pour le savoir, il faudra attendre un an ou deux, jusqu'à ce que Schuiten publie la suite (et la fin) de cette histoire.
Et voilà ! Que dire de tout cela ? Tout d'abord, je relèverai que les thèmes d'inspiration de Schuiten et Peeters n'ont pas beaucoup changé, et que si cette histoire n'appartient pas au monde des Cités obscures, elle y ressemble tout de même beaucoup. Et ensuite, je constate une fois de plus qu'il est bien difficile de juger une oeuvre incomplète. Ce tome 1 contient en effet de belles idées, de belles "amorces" pourrait-on dire, et il nous fait découvrir un univers à la fois esthétique et effrayant, mais il nous manque encore le nœud principal de cette histoire. Ce que nous avons jusqu'à présent, c'est une longue introduction, qui nous prépare manifestement à un drame que nous en connaissons pas encore. Les auteurs ont réuni plusieurs idées intéressantes, mais il faut maintenant "nouer la gerbe", si j'ose employer cette métaphore. Ce n'est donc qu'en découvrant la conclusion de ce récit qu'il sera possible de juger l'ensemble de la BD.
En attendant, on peut découvrir de bien étranges images de Paris.