Parmi les nombreuses rééditions et intégrales qui sont parues en cette fin d'année, j'ai trouvé que le
Don Quichotte de Jacovitti avait une dimension particulière.
Il y a bien sûr la grande taille de l'album (qui met en valeur la qualité et les détails des images), la beauté de la couverture ou la délicatesse des couleurs qui attirent le regard et qui donnent au livre un aspect de luxe. Le plus admirable, cependant, c'est la BD elle-même avec sa fantaisie narrative, son inventivité graphique, son humour et ses gags percutants. Jacovitti varie ses mises en page comme un virtuose, parsemant ses images de gags qu'il place dans tous les coins. Voilà par exemple comment il raconte le duel final entre Don Quichotte et Papemonde, son rival. Le lecteur se retrouve finalement complice des deux chevaux, qui commentent la bagarre d'un air hilare.
Il y a encore tout ce qui n'est pas montrable, comme par exemple la première case du récit qui occupe toute la page et qui contient au moins une cinquantaine de gags. On peut dire que le dessinateur ne rechignait pas à la peine ! Et puis, il y a cet état d'esprit que les admirateurs de Jacovitti connaissent déjà, qui mélange la férocité et la jubilation permanente. A la fois artisan modeste et anarchiste dangereux, le dessinateur est inclassable. Quant on pense qu'il a dessiné presque toute sa vie pour les enfants.
Voilà ! Jacovitti n'est pour l'instant apprécié que par de rares amateurs en France, mais de tels albums (j'espère qu'il y en aura d'autres) lui redonnent sa véritable place : celle d'un grand dessinateur, à la fois drôle et créatif. Je vous recommande de le découvrir.