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Alix 40 L'oeil du Minotaure

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76Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Jeu 18 Aoû - 22:26

Jacky-Charles


docteur honoris causa
docteur honoris causa

Le forum étant assez calme en cette période, je vous propose un peu de lecture pour ceux que cela intéresse en attendant la rentrée : l'analyse de cet album, comme d'habitude, sur le plan historique. A bientôt.

77Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Jeu 18 Aoû - 23:07

Jacky-Charles


docteur honoris causa
docteur honoris causa

L'OEIL DU MINOTAURE

Quarantième aventure d'Alix


LE RESUME

Servilia Caepionis, mère de Brutus et maîtresse attitrée de César, a reçu en cadeau de celui-ci une perle noire de grande valeur enchâssée dans un bijou qui se révèle maléfique et la tourmente sans arrêt au point de la rendre gravement malade. Mais c'était certainement César que ceux qui lui ont vendu la perle visaient en réalité. Brutus et César décident de les retrouver pour les châtier. Accompagné d'Alix et d'Enak, Brutus se rend d'abord à Massilia où la perle a été achetée, mais un jeune voleur, Deucalion, s'en empare et s'enfuit en Crète, son pays d'origine. Ses poursuivants le rattrapent sur l'île où l'ancienne légende du Minotaure semble toujours vivante dans des ruines qui ressemblent au labyrinthe, et la perle proviendrait d'ailleurs d'un lieu de culte qui lui est consacré sur l'îlot volcanique de Théra, où l'on pourrait se débarrasser du bijou maudit dans les vestiges d'un ancien temple. Tout le monde se retrouve à Théra, mais les choses ne sont pas si simples...


OU CELA SE PASSE-T-IL ?

L'histoire commence chez Servilia, au lac d'Albano, puis se poursuit à Rome, chez César. L'enquête proprement dite commence à Massilia ( Marseille ), se poursuit à Héraklion, capitale de la Crète, dans le « labyrinthe » du palais de Cnossos, et s'achève sur l'île volcanique de Théra.

Albano : à 20 km au sud-est de Rome, est aujourd'hui connu pour être le site de Castel Gandolfo ( qui fait partie de l'Etat du Vatican ), résidence d'été des papes depuis le XVII° siècle. Voir ci-dessous les autres articles sur Massilia, la Crète et Théra.


QUAND CELA SE PASSE-T-IL ?

César étant présent à Rome pendant un été caniculaire, nous sommes en -46, soit l'an 708 depuis la fondation de Rome.

Canicula : nom donné à l'étoile Sirius, la « petite chienne », parce que faisant partie de la constellation du Chien. Très brillante, elle se levait du 24 juillet au 24 août en même temps que le Soleil. Les Anciens croyaient que cette coïncidence provoquait la période des fortes chaleurs.


LE CONTEXTE HISTORIQUE

Cette année -46 fait partie d'une période particulièrement chargée pour César comme pour Rome et l'ensemble des Romains. Nous sommes en effet à la fin de la guerre civile contre les partisans de Pompée. César a quitté Rome en décembre -47 pour se rendre en Afrique du Nord et la bataille de Thapsus a eu lieu en février -46. Au cours de celle-ci, Scipion et Juba sont tués, puis Caton d'Utique ( demi-frère de Servilia ) se suicide ; Titus Labienus passe en Espagne pour rallier les derniers Pompéiens aux fils de Pompée et tenter de sauver ce qui peut l'être ; la Numidie est annexée.

César rentre à Rome en juillet -46 pour bénéficier de quatre triomphes successifs : victoires sur les Gaules, le Pont ( contre Pharnace ), la Numidie et l'Egypte. L'Italie n'a pas connu cette fois-ci les atrocités des précédentes guerres civiles. Selon tous les écrivains témoins du temps, César s'est montré clément envers les Pompéiens : il a accueilli sans restrictions tous ceux qui se sont rendus et n'a exercé aucune proscription contre la classe politique. Il annonce l'annexion des Gaules et de la Numidie, ainsi qu'un protectorat sur l'Egypte pour assurer le ravitaillement de Rome en blé et en huile.

La durée et le faste des cérémonies, l'énormité du butin éclipsent tous les triomphes précédents. A chaque cérémonie, César vêtu de pourpre parcourt en char la Via Sacra, suivi du butin, des captifs, des soldats qui ont toute liberté pour plaisanter sur son compte et ne se privent pas des blagues les plus scabreuses ( le chauve adultère, le mignon de Nicomède, etc. ). Pour monter au Capitole offrir un sacrifice au temple de Jupiter Capitolin, le char de César passe entre deux rangées d'éléphants tenant des flambeaux.

César offre au peuple des représentations théâtrales, des courses, des joutes d'athlètes, des spectacles de chasse et de gladiateurs, des reconstitutions de combats terrestres et nautiques ( c'est la première naumachie organisée à Rome ). Des banquets publics réunissent deux cent mille convives. La vente du butin rapporte plus de six cents millions de sesterces et l'argent est distribué à flot : les 75 deniers promis par César sont donnés à chaque citoyen, plus 25 deniers pour compenser le retard ; les légionnaires reçoivent 24 000 sesterces chacun et des lots de terre. Les loyers de moins de mille sesterces à Rome et de moins de 500 sesterces ailleurs en Italie sont annulés.

Les revendications des « Populares » étant satisfaites, César réforme l'administration du monde romain : recensement, ajustement à la baisse du nombre d'allocataires des distributions de blé, compensé en installant 80 000 citoyens pauvres et des soldats démobilisés dans de nouvelles colonies dans les provinces, dont Carthage et Corinthe reconstruites. César est consul pour la quatrième fois.

Mais les dernières forces du parti pompéien s'insurgent en Espagne, menées par les fils de Pompée et Titus Labienus. César arrive à marches forcées en Espagne en décembre -46. En avril -45, c'est la bataille de Munda et la fin des Pompéiens. Après son retour à Rome, César bénéficiera en octobre -45 d'un cinquième triomphe.

J'ai déjà raconté les événements précédant et suivant cette année -46 dans d'autres analyses d'albums : « Par delà le Styx » et « L'Ibère » notamment, auxquelles le lecteur pourra se reporter.

Je vous propose à présent de faire plus ample connaissance avec les épouses de César ( il en eut quatre... plus quelques « intérimaires » ), ainsi qu'avec Brutus, personnage aussi intéressant que mal connu, de voyager dans l'espace et le temps à Massilia, en Crète et à Théra, en évoquant leur histoire, leurs mythes et leurs légendes.


CESAR ET SES FEMMES

César se maria officiellement quatre fois. Il divorça de sa première et de sa troisième épouse et fut veuf de la deuxième ; la quatrième lui survécut.

Cossutia : elle appartenait à une famille de la classe équestre riche mais de modeste extraction, ce qui, apparemment, ne plaisait pas au patricien qu'était César, car c'était un mariage arrangé par les familles pour profiter de la fortune de l'épouse. Il divorça presque aussitôt marié en -85.

Cornélia Cinna : dès -84, César se remarie avec cette parente de Cornelius Cinna, un partisan de son oncle par alliance Marius, à qui il fait allégeance. Mais Sylla, l'ennemi de Marius, exige que César répudie sa nouvelle épouse sous peine de proscription, ce qui pouvait aussi signifier une exécution pure et simple. César refuse, ne quitte pas Rome, entre dans la clandestinité, puis part pour la Grèce grâce à des appuis familiaux. Cornélia est la mère de Julia, née en -83, l'unique enfant de César, et la future épouse de Pompée ; elle meurt en -69, avant le départ de César pour l'Espagne en tant que questeur.

Pompéia Sylla : nouveau mariage en -68, avec cette fois une petite-fille du dictateur Sylla qui l'avait proscrit : César tient compte de la nouvelle situation politique romaine, de nouveaux alliés ne sont jamais superflus. Cela se terminera par un divorce dans d'étranges circonstances ; en -63, César est élu Pontifex Maximus, c'est à dire grand prêtre des cultes romains ( et on y est élu à vie ). Il réside alors avec son épouse dans la Régia, la résidence officielle sur la Via Sacra ; c'est là que Pompéia accueille en tant qu'épouse du grand pontife, le festival de la Bona Dea ( la bonne déesse ), auquel seules les femmes ont le droit d'assister. Mais le jeune patricien Clodius Pulcher s'y introduit déguisé en joueuse de lyre, dans le but avoué de séduire Pompéia, il est démasqué et poursuivi pour profanation. Au procès qui s'ensuit, Clodius est acquitté, car César ne peut fournir de preuve de ce qu'il avance. Il divorcera néanmoins en -63 car « la femme de César ne peut être soupçonnée ».

Calpurnia Pisonis : elle épouse César en -59 et restera sa femme jusqu'à la mort de celui-ci en -44 ; veuve, elle ne se remariera pas. Elle aurait vu en songe la scène du meurtre avant que celui-ci ait lieu, confirmant la prédiction de l'haruspice Titus Vestricus Spurinna, qui disait de se méfier des ides de mars.

En dehors de ses épouses légitimes, César eut de nombreuses maîtresses, celle à laquelle il fut le plus fidèle étant Servilia que nous rencontrons au début de l'album.

Servilia Caepionis : ( -112/-42 ) elle était la demi-soeur de Caton d'Utique par sa mère. En -85, elle épousa Marcus Junius Brutus l'aîné, dont elle eut Marcus Junius Brutus Caepio, qui naquit la même année et que nous rencontrons également dans cette histoire. Elle fut la maîtresse de César de -64 à -44, et il est exact qu'il lui offrit, après la Guerre des Gaules, une perle noire d'une valeur de six millions de sesterces, une somme colossale pour l'époque. Il me paraît néanmoins douteux qu'on ait pu trouver un tel objet dans une boutique de Massilia...

César eut de nombreuses autres maîtresses plus ou moins occasionnelles, en fonction de ses désirs, qui étaient grands, on s'en doute, mais aussi des opportunités politiques. Les historiens ont du mal à en fixer la liste, mais il est à peu près certain que les épouses de Pompée ( avant Julia ) et de Crassus ( les deux autres triumvirs ) furent du nombre. En dehors d'elles, la plus connue est bien entendu Cléopâtre dont j'ai déjà parlé dans de précédentes analyses d'albums. Il y eut aussi Eunoé, épouse du roi Bogud de Maurétanie, allié de César pendant les guerres en Espagne.

Je rappelle qu'à Rome, les femmes n'avaient pour nom que celui de leur gens féminisé ; ainsi, toutes les filles d'un Julius étaient des Julia, auxquelles on ajoutait un surnom pour les différencier lorsqu'elles étaient plusieurs sœurs, tel que Major pour l'aînée, Minor pour la suivante, etc. Par ailleurs, il n'y avait pas de « Madame César » : Calpurnia était « Calpurnia, épouse de César ».


TOI AUSSI, BRUTUS !

Marcus Junius Brutus Caepio ( -85/-42 ) est un des grands malchanceux de l'Histoire. L'homme se voyait comme un intellectuel ( même si le terme ne correspond pas à l'époque ), intéressé par les lettres et la philosophie, et se considérait plus comme un héritier de Platon que comme un stoïcien. Il composa de nombreux ouvrages qui ne nous sont pas parvenus, sauf l'éloge funèbre de son oncle Caton d'Utique et des lettres à Cicéron ( qui lui dédia plusieurs traités ) et à Atticus ; seuls nous restent les titres de ses traités : « De virtute », « De Patientia ».

« Même ceux qui lui veulent du mal pour ce qu'il a conjuré à l'encontre de César, s'il y a eu aucune chose généreuse faite en toute la conjuration, l'attribuent à Brutus », nous dit Plutarque. C'est que le pauvre Brutus sera à jamais écartelé entre deux termes à jamais inconciliables : est-il le vertueux républicain, se prétendant ( à tort ) descendant de Lucius Junius Brutus, le fondateur légendaire de la République qui chassa Tarquin, le dernier roi étrusque, ou bien le traître qui, au milieu d'une vingtaine de conjurés, tua César qui l'avait pourtant favorisé ?

Il passa une grande partie de sa jeunesse en Grèce où il étudia la philosophie. Cela ne l'empêcha pas de s'enrichir ensuite à Chypre, puis en Cilicie où il fut questeur en -53, ce qui lui valut les reproches de Cicéron. Il prit ensuite le parti de Pompée et combattit contre César à Pharsale en -48. Mais César lui pardonna, par égard pour sa mère Servilia et il l'appela auprès de lui après sa victoire. C'est de ce temps-là, en raison de cette faveur et de la liaison prolongée entre César et Servilia que date la légende prétendant que Brutus était le fils de César ; mais les deux hommes n'avaient qu'une quinzaine d'années de différence, ce qui aurait fait un César bien précoce, d'autant plus qu'il ne connaissait pas encore Servilia au moment de la naissance de Brutus : celui-ci avait déjà environ vingt ans au début de leur liaison.

Brutus fut gouverneur de Gaule Cisalpine en -46/-45, puis prêteur urbain en -44. Dans ce rôle, Brutus avait conservé ses idéaux républicains, tandis qu'on soupçonnait César de vouloir se faire proclamer roi, suprême abomination pour les Romains, et on lui rappelait sans arrêt par des courriers d'être digne de ce faux aïeul qui avait mis fin à la royauté. Il participa donc à l'organisation du complot contre le dictateur avec son cousin germain Brutus Albinus, Cassius Longinus et Servilius Casca entre autres.

Aux ides de mars, il fut l'un de ceux qui poignardèrent César, mais il refusa que les conjurés exécutent également Marc Antoine. César, le voyant au nombre de ses assassins, aurait dit au moment de mourir le célèbre : « Toi aussi, mon fils », mais il le dit en grec, ce qui aurait pu se traduire par : « Toi aussi, mon garçon », sans idée de filiation.

Poursuivi après le meurtre par les partisans de César, il se réfugia d'abord sur le Capitole, puis passa à Athènes et enfin en Crète. Après la mort de Cicéron en -43, il rejoignit les troupes de Cassius. La bataille de Philippes en Macédoine opposa leur armée à celle d'Antoine et d'Octave. D'abord les troupes de Brutus s'emparèrent du camp d'Octave, tandis que celles d'Antoine massacraient les légions de Cassius, qui se suicida, suivi, trois semaines plus tard, par Brutus, le 23 octobre -42.

Sa mort marqua définitivement la fin de la République. Octave et Antoine affirmèrent leur pouvoir avant de se déchirer eux-mêmes.


MASSALIA, MASSILIA... MARSEILLE

La ville a été fondée vers -600 sur la côte méridionale de la Gaule, à proximité du delta du Rhône, ce fleuve étant déjà un axe commercial important, par des Grecs de Phocée. Selon la tradition rapportée notamment par Aristote, le chef de l'expédition, Protis, épousa Gyptis, fille du roi des Ségobriges, Nannos, ce qui suggère des mariages mixtes et une bonne entente entre Grecs et indigènes dans les premiers temps de la cité. Des heurts auraient ensuite opposé les Grecs à des chefs gaulois locaux, Comanus et Catumandus. Massalia est le nom grec, devenu Massilia en latin.

La ville s'étend au nord d'une profonde calanque, le Lacydon, l'actuel Vieux Port, sur trois collines dont la plus haute pourrait constituer l'acropole. Le port se développe sur la rive nord et s'étend encore à l'époque romaine. Le rempart du -II° siècle subsiste à l'époque romaine, puis est renforcé au V° siècle, et sert encore de fondations aux murs médiévaux. L'ancienne agora grecque était située dans la ville haute, doublée à l'époque hellénistique par d'autres édifices, dont un théâtre, dans la ville basse. De l'architecture religieuse, on ne connaît qu'un grand chapiteau conique archaïque et il n'y a pas de traces des temples mentionnés par les sources : Artémis d'Ephèse, Apollon Delphinien, Athéna, Dionysos.

Jusqu'au -III° siècle, la ville ne disposait que du bassin de 100 km2 limité par les reliefs, complétée par ses colonies : Agathé ( Agde ), Tauroeis ( Six-Fours-les-Plages ), Antipolis ( Antibes ), Nikaia ( Nice ). Elle étend ensuite son territoire jusqu'au delta du Rhône où Strabon signale des tours repères pour faciliter la navigation, et au delà des collines à l'époque romaine.

C'est une ville de marins dont certains sont aussi des explorateurs, comme Euthymènes, qui aurait atteint le Sénégal, ou Pythéas. Ce dernier, au milieu du -IV° siècle, recherchait une voie maritime facile pour importer l'étain des îles Cassitérides ( îles Scilly ), ou l'ambre de la Baltique. Après avoir contourné les îles Britanniques, il alla jusqu'en Norvège où il aurait découvert la mystérieuse Thulé ( pays de Trondheim ? ), observé la marche du soleil près du cercle arctique et la formation de la banquise. La qualité de ses observations géographiques prouve que sa ville possédait déjà une vie culturelle intense ; il fut d'abord admiré, puis décrié et traité d'affabulateur ; on lui a rendu justice aujourd'hui : il n'avait rien inventé.

Ce bastion du commerce méditerranéen avait une société oligarchique, le pouvoir étant aux mains des grandes familles ( conseil des Timouques ). Selon Strabon, le territoire cultivait l'olivier et la vigne, mais pas les céréales à cause de son aridité. La ville produisait aussi des céramiques et disposait de monnaies d'argent et de bronze.

Au -III° siècle, le ville prend part à la deuxième guerre punique aux côtés de Rome et l'alliance romaine lui permet ensuite de résister à la pression de tribus gauloises ( -125/-123 ). Pour avoir pris parti pour Pompée, bien qu'elle ait servi d'intermédiaire intéressé dans la perception des tributs imposés aux Gaulois vaincus, la ville est prise en -49 par César, qui envoie trois légions commandées par Trebonius. Elle y perdit la plus grande partie de son territoire, désormais enclavé dans celui de la cité d'Arles, ses armes, ses navires et son trésor, ses remparts furent démolis, mais elle conserva son indépendance. Une aventure de Gordianus, de Steven Saylor, « Le rocher du sacrifice », s'y déroule pendant le siège de -49.


LA CRETE : HISTOIRE, MYTHES ET LEGENDES

Une histoire plusieurs fois millénaire

La Crète est la plus vaste île de la mer Egée : 250 km de long, 60 km au plus large. Selon Homère, elle comportait une centaine de cités, même si seulement quarante sont connues à l'époque hellénistique. Le glorieux passé minoen se reflète dans les traditions crétoises et dans le renom de l'île. Le légendaire roi Minos dirigeait un empire maritime ; selon Strabon, il fut un grand législateur et les Crétois connurent par le passé une excellente législation, ce que confirme la découverte de plusieurs inscriptions archaïques de caractère juridique. C'est en Crète que l'on a découvert le plus ancien ensemble de lois inscrites sur pierre connu à ce jour dans le monde grec : les « lois » ou « code » de Gortyne ; ce code civil permet de connaître la société aristocratique de cette époque.

Régime crétois : la civilisation minoenne

Elle est ainsi nommée par référence au mythique roi Minos par l'archéologue anglais Sir Arthur Evans, vers 1900. Le palais de Cnossos, qu'il fouille, serait le labyrinthe construit par Dédale pour y enfermer le Minotaure. Il divise l'histoire de la Crète en trois périodes : le minoen ancien ( -3000/-2000 ), le minoen moyen ( -2000/-1700 ) et le minoen récent ( -1700/-1200 ).

Pour le minoen ancien, on a mis au jour des villages, et, nouveauté, de vastes tombes circulaires abritant des dizaines, voire des centaines de défunts accompagnés de bijoux, de vases et d'outils. On peut en déduire le développement de pouvoirs locaux, parfois en conflits destructeurs, sous l'influence de la Grèce et des Cyclades.

Au minoen moyen, ou période palatiale, c'est la naissance de villes, la construction de palais ( Cnossos, Phaïstos, etc. ) et une nouvelle forme d'organisation politique que l'on retrouvera dans le futur modèle mycénien. Ces palais construits sur plusieurs niveaux, organisés autour d'une grande cour centrale, comprennent des quartiers résidentiels, des salles d'apparat, des lieux de culte, des ateliers, des entrepôts. De chaque palais dépend un territoire. Ils avaient un rôle administratif que l'on ne peut définir davantage faute d'avoir pu déchiffrer les écritures crétoises. On ne sait pas non plus si l'île avait une unité politique. Cela peut être envisagé si on se fie à la mention, dans un texte égyptien de l'époque de Thoutmosis III, d'un « roi du pays de Keftiou », identifié à la Crète, mais on ne sait rien de plus sur ce souverain hypothétique.
La société minoenne complexe et hiérarchisée est dirigée par un groupe restreint d'officiels qui détient l'autorité administrative, économique et religieuse. Le reste de la société est composée d'artisans et d'agriculteurs, l'économie reposant sur l'agriculture, l'élevage et l'artisanat spécialisé, comme celui de la céramique. On importe des matières premières étrangères à la Crète : cuivre et étain pour le bronze, or, argent, plomb, ivoire, pierres précieuses.
La religion minoenne est mal connue. On ne sait pas si le culte s'adresse à une ou plusieurs divinités, féminines comme la « déesse aux serpents » ou la « déesse aux oiseaux », et si un dieu mâle est représenté par l'omniprésent taureau.
La civilisation minoenne est le résultat d'influences diverses dans le monde méditerranéen oriental et égéen, la Crète faisant partie d'un réseau d'échanges entre les différentes aires culturelles de la région.

Au minoen récent, on constate à partir de -1450 des destructions guerrières attribuables aux Mycéniens. Le palais de Cnossos est détruit vers -1370, sans explication claire, après une période d'échanges et de prospérité autour de -1400. Le système palatial minoen disparaît au moment où apparaissent les palais mycéniens en Grèce continentale. Il peut s'agir d'une guerre de conquête menée par les Mycéniens mais la civilisation minoenne perdurera encore quelques siècles.

Les périodes hellénistiques et romaines. Grâce à l'influence de l'Orient, la Crète se développe du -VIII° au -VI° siècles, avec la diffusion de l'écriture phénicienne. Les artisans ( céramique, bronze ), sculpteurs et architectes évoquent le mythique et génial Dédale. Selon Aristote et Strabon, les Spartiates se seraient inspirés des Crétois pour développer leurs institutions. Les cités étaient dirigées par des magistrats élus par les clans et par un conseil des anciens. Outre les citoyens, il y avait des serfs attachés à la terre qu'ils cultivaient, des esclaves sans droits mais non sans protection légale.
Les conflits entre cités sont nombreux à l'époque hellénistique. La réputation querelleuse des Crétois est cependant démentie par de nombreux traités d'alliances entre cités, aux clauses multiples et détaillées, preuve d'une volonté de maintient de relations paisibles. Mais il n'y aura pas de Ligue Crétoise comme sur le continent, pas de monnaie commune, ni d'armée commune en raison des particularismes.
La Crète a peu de sources de revenus autres que la piraterie et l'envoi de mercenaires ; les archers et frondeurs crétois sont réputés. Les pirates ou corsaires crétois sont une menace pour la sécurité des mers, ils se heurtent aux autres puissances maritimes, comme Rhodes, puis les Romains s'emparent de l'île en -67. Sous Auguste, la Crète fait partie de la province de Cyrénaïque, capitale Gortyne.


Les découvertes de Sir Arthur Evans

Exploré à partir de 1900 par l'archéologue anglais Arthur Evans, le principal site de la civilisation minoenne est célèbre sous le nom de Cnossos. Quelques années plus tôt, Heinrich Schliemann, le découvreur de Troie et de Mycènes, s'y était intéressé, mais n'ayant pu acquérir le terrain pour y faire des fouilles, il était reparti ; il faut croire que les livres sterling d'Evans furent plus convaincantes que les marks de Schliemann pour le propriétaire.

Evans cherchait Cnossos depuis des années. Sur le marché d'Athènes, il avait repéré des petites pierres semi-précieuses portant d'étranges gravures et inscriptions. Connues comme « pierres à lait », elles étaient vendues aux femmes enceintes pour les aider pendant et après l'accouchement. Evans remonta leur piste et établit qu'elles venaient de Crète, de la colline de Képhala près du port d'Héraklion. Sous la colline couverte d'arbres et de taillis, son équipe atteignit bientôt des ruines, celles du palais qu'il cherchait.

La civilisation qu'Evans découvrit à Cnossos était plus ancienne que celle des Mycéniens, c'était même elle qui leur avait servi de modèle dans leur période de croissance. Les objets trouvés à Mycènes par Heinrich Schliemann dans les fosses funéraires étaient de fabrication ou d'inspiration minoenne. Evans crut que les Minoens avaient vaincu les Mycéniens alors que c'était le contraire. Evans donna à ce peuple le nom de Minoens, d'après celui du légendaire roi Minos, mais nous ignorons comment ils se nommaient eux-mêmes. Nous ne savons pas non plus d'où ils venaient à l'origine. Leur civilisation a fleuri à la fin du -III° millénaire et pendant presque tout le -II° millénaire, soit l'âge du bronze moyen et récent dans la région. Vers -1700, un séisme frappa Cnossos, mais les habitants survécurent et le reconstruisirent. Vers -1350, les Mycéniens envahirent la Crète depuis la Grèce continentale et la dominèrent, apportant leur type d'écriture, un nouveau répertoire iconographique pour les peintures murales et un mode de vie plus militaire qui perdura un siècle et demi, jusqu'à l'effondrement final vers -1200.

Evans découvrit un grand palais pour l'essentiel à ciel ouvert, avec une vaste cour rectangulaire centrale, clair, aéré, intégré dans l'environnement, doté de l'eau courante et d'égouts. Il servait de centre de pouvoir et de centre de redistribution : on y apportait les productions pour constituer des réserves – blé, orge, vin, raisin – que les gouvernants redistribuaient en fonction des besoins ; une partie du palais n'est faite que de corridors remplis de grandes jarres de stockage, certaines enfouies dans le sol pour conserver leur contenu au frais.

Il n'y a pas de fortifications autour de Cnossos, tout comme autour des six autres palais de Crète à cette époque. Ses habitants ne craignaient donc pas d'être attaqués ? Thucydide affirmait que les Minoens formaient une thalassocratie, qu'ils gouvernaient la mer depuis leurs navires, et ne s'inquiétaient pas d'invasions extérieures. On pensait aussi qu'une seule famille gouvernait la Crète à cette époque, mais aussi que des femmes avaient régné sur l'île, constituant un matriarcat, et que leur gouvernement pacifique aurait rendu inutiles les fortifications. Nous ne savons pas qui dirigeait Cnossos : un roi, une reine, un prêtre ou une prêtresse, un gouvernement collectif ?

Les murs intérieurs du palais étaient ornés de peintures aux couleurs vives qui nous renseignent beaucoup sur les Minoens. Une femme peinte est si belle qu'Evans la surnomma : « la Parisienne » ; maquillée, avec une coiffure sophistiquée, elle porte des joyaux et une robe rouge, blanche et bleue. D'autres fresques montrent des femmes pareillement vêtues. Les hommes portent un simple pagne, mais aussi des bijoux et peut-être du maquillage.

La cour centrale de Cnossos comporte une peinture murale où un homme et deux femmes jouent avec un taureau. L'homme, en plein vol, exécute un saut périlleux par-dessus l'échine de l'animal, tandis qu'agrippée à ses cornes, une femme lui fait face peut-être pour le distraire ; l'autre femme est derrière lui et s'apprête à recevoir l'homme. Il est aussi possible que les trois personnages soient en train de sauter : la dernière femme viendrait d'atterrir, l'homme serait en cours d'exécution et la première femme sur le point de s'élancer. Cela ressemble à l'épreuve du cheval d'arçon, si ce n'est que le cheval est un taureau vivant, qu'il a des cornes et qu'il peut tuer le gymnaste. On a aussi trouvé à Cnossos une statuette d'ivoire qui a pu faire partie d'un groupe de sauteurs de taureau. Le personnage devait être en plein vol, car il a les orteils pointés et les bras tendus. On a aussi trouvé à Cnossos plusieurs têtes de taureau de pierre sculptées et creuses dont certaines semblent avoir été délibérément brisées, peut-être au cours d'un rituel.

Il semble donc que les Minoens aient mis en scène des jeux tauromachiques et des rituels avec des taureaux. On songe au mythe du Minotaure, dont on a pensé que l'histoire pouvait avoir été inventée par des occupants ultérieurs, tentant d'expliquer les ruines de Cnossos et combinant le vague souvenir de leurs ancêtres jouant avec des taureaux et l'allure de dédale des entrepôts en ruine. Mais voilà : vers 1990, on a découvert une grande peinture murale qui représente une multitude de taureaux et de sauteurs en action, devant ce qui ne peut être qu'un labyrinthe... sauf qu'elle se situe non pas à Cnossos, ni même en Crète, mais en Egypte, dans le delta du Nil, sur le site de Tell el-Dab'a. Elle est datée du milieu du -II° millénaire, entre les -XVII° et -XII° siècles, à l'apogée de la culture minoenne. Non seulement le motif est crétois, mais les techniques picturales employées sont très différentes de celles utilisées par les Egyptiens. Le mythe du Minotaure pourrait donc être lié à une coutume minoenne et non pas une légende forgée à retardement pour expliquer les ruines de Cnossos. C'est en tout cas la preuve que l'Egypte et la Crète étaient alors en contact direct.

Il est toutefois regrettable qu'Evans ait cherché à restaurer les ruines et les fresques de Cnossos, commettant ainsi de nombreux contresens architecturaux et picturaux, à l'aide de ciment et d'autres matériaux permanents, ne permettant pas de revenir sur l'opération. De telles interventions ne sont plus autorisées, à moins que l'on puisse très clairement distinguer l'original de la recomposition.

Minos et le Minotaure

Dans la mythologie grecque, Minos est un roi légendaire de Crète, fils de Zeus et d'Europe. Son nom est employé en crétois pour « roi » et il a été donné à la civilisation qui fleurit en Crète au -II° millénaire sans qu'on sache comment les Crétois se nommaient eux-mêmes. Il avait deux frères, Sarpédon et Rhadamante. Avec ce dernier, et Eaque, ils devinrent après leur mort les trois juges des Enfers. Ils furent élevés par le roi de Crète Astérion à qui Minos succéda après la mort de celui-ci. Minos épousa Pasiphaé dont il eut plusieurs enfants, dont Ariane, Phèdre, Deucalion et Androgée. Il est souvent représenté en roi et prêtre de Zeus et il était considéré comme un grand législateur.

Selon la tradition rapportée par Diodore de Sicile au -I° siècle, le Minotaure est le produit des amours adultères de la reine de Crète Pasiphaé, épouse du roi Minos, et d'un taureau blanc. Quelle est l'origine de cette relation contre-nature ? Poséidon avait donné à Minos ce taureau blanc pour qu'il soit sacrifié en son honneur, à moins qu'il s'agisse du plus bel animal du troupeau royal. Mais Minos, avare, échangea le taureau blanc, qu'il conserva, contre un autre, ordinaire, qu'il sacrifia à Poséidon. Le dieu, furieux, suscita l'amour de Pasiphaé pour l'animal épargné. A la demande de la reine, l'architecte Dédale fabriqua une vache de bois dans laquelle la reine s'introduisit pour s'accoupler avec le taureau ; le Minotaure, mi-homme mi-animal, fut le fruit de cette union, mais le monstre hybride était féroce et anthropophage ; Dédale construisit un palais aux couloirs inextricables, le Labyrinthe, pour l'y enfermer.

Androgée, l'un des fils de Minos, était un excellent athlète qui triompha aux Jeux des Panathénées, ce qui rendit jaloux les jeunes gens d'Athènes qui l'attirèrent dans un guet-apens et le tuèrent. Pour le venger, Minos assiégea Athènes et vainquit son roi, Egée. Il lui réclama comme tribut chaque année ( ou, selon une autre version, tous les neuf ans seulement ) sept jeunes garçons et sept jeunes filles pour servir de pâture au Minotaure. Thésée, le fils d'Egée, fut tiré au sort ( à moins qu'il fut volontaire ) pour faire partie du tribut. Arrivé en Crète, il séduisit Ariane, une fille de Minos, qui lui confia une pelote de fil à dérouler dans le Labyrinthe pour y retrouver son chemin. Là, il tua le monstre et put ressortir en suivant le fil. Sur le chemin du retour, il abandonna Ariane et rentra à Athènes avec sa sœur, Phèdre.

Minos, estimant Dédale responsable de cette fuite et de la mort du Minotaure, le fit enfermer à son tour dans le Labyrinthe avec son fils Icare, d'où ils s'échappèrent avec les ailes fabriquées par l'ingénieux Dédale. Après la mort d'Icare, Dédale se réfugia à Camicos, en Sicile, auprès de son ami Cocalos, roi des Sicanes. Minos le poursuivit, mais il fut capturé par Cocalos qui le fit assassiner pour sauver Dédale.

Que représente le Minotaure ?

Le Minotaure serait une personnification solaire et une adaptation minoenne du culte de Baal des Phéniciens. Son meurtre par Thésée indique la rupture des relations entre Athènes et la Crète. Minos et le Minotaure pourraient donc être deux représentations du dieu-soleil des Crétois, où le soleil apparaît comme un taureau. L'union de Pasiphaé avec le taureau serait une cérémonie sacrée où la reine était mariée à un dieu de forme taurine.

La présence de la bête dans le mythe crétois dénote peut-être une influence venue d'Anatolie : en effet, dans cette région, depuis le Néolithique, cet animal a progressivement acquis une valeur symbolique de représentant de la fécondité masculine. Vers -6000, à Catal Höyük, en Anatolie centrale, le taureau fait même l'objet d'un véritable culte à l'intérieur des maisons.


DE THERA A L'ATLANTIDE

Le martyre de Théra

L'île se nomme aujourd'hui Santorin, et se situe à une centaine de kilomètres au nord de la Crète. Les Vénitiens la baptisèrent ainsi en hommage à sainte Irène. D'après Hérodote, Théra, son ancien nom, viendrait du spartiate Théras, chef d'une colonie établie sur l'île au -I° millénaire. Auparavant, elle s'appelait Kallista ( « la belle » ), et Hérodote nous apprend que ce nom lui fut donné par les Phéniciens, même s'il est grec. Son tout premier nom aurait été Strogoli ( « la ronde » ) ; elle a en effet une forme circulaire, car c'est un volcan toujours en activité, et d'ailleurs, c'était aussi, dans les textes anciens, le nom de l'île Stromboli, pour les mêmes raisons.

A cours du -II° millénaire, probablement au -XVII° ou au -XVI° siècle, soit, selon les datations au carbone 14, au plus tôt en -1628 et au plus tard en -1450, mais plus vraisemblablement vers -1550, le volcan explosa, dispersant cendres et scories vers le sud et l'est. Cela dut se produire à l'époque où les Minoens prospéraient en Crète et affecta gravement et durablement leur civilisation. On a estimé que l'explosion fut quatre à cinq fois plus puissante que la plus forte des éruptions volcaniques de l'époque moderne, celle du Krakatoa en Indonésie ( 1883 ). Lors de fouilles au fond de lacs, on a retrouvé de la pierre ponce de Santorin sur une aire allant de la Turquie à l'Egypte en passant par la Crète.

Toute la partie centrale de l'île ayant disparu dans l'explosion, il reste le cercle incomplet de la partie extérieure. Par les deux brèches de l'anneau brisé se sont précipitées des masses d'eau qui ont rempli une caldeira de huit cents mètres de profondeur. Il en a aussi résulté un raz-de-marée qui a atteint la Crète ; d'énormes blocs de pierre projetés par l'explosion sont encore visibles sur la plage d'Amninos, à l'est d'Iraklion. L'activité volcanique a fait surgir des petites îles au milieu de la caldeira, au siècle dernier ; les roches y dégagent une telle chaleur qu'on la ressent au travers des semelles des chaussures et il plane partout une odeur de souffre et d'oeuf pourri...

L'éruption enfouit complètement la ville d'Akrotiri sous un flot de scories qui la recouvrit et la préserva : c'est la Pompéi de la mer Egée, où la vie s'est arrêtée il y a 3500 ans. A cette époque, les habitants d'Akrotiri étaient en contact régulier et en relations commerciales suivies avec la Crète, l'Egypte et Canaan, mais ils avaient abandonné le site au moment de l'éruption, alertés par des séismes à répétition. En effet, on n'a pas retrouvé de restes humains et très peu d'objets précieux, mais plutôt des jarres de stockage, des objets de céramique ou de pierre, dont beaucoup décorés de scènes marines ( dauphins, poulpes... ) ou champêtres ( hirondelles ). De nombreuses peintures murales ont été découvertes, comme la « fresque du fleuve » qui pourrait être le Nil, ou d'autres représentant des singes de Nubie ou des antilopes d'un réalisme étonnant, ou encore la « fresque des navires » qui peut être la représentation d'un combat naval ( on voit des guerriers ) ou simplement d'un voyage commercial. De nombreuses figures humaines sont aussi mises en scène, comme des garçons « boxeurs », ou ces jeunes femmes cueillant des fleurs, avec des tenues raffinées et des bijoux.

Les fouilles d'Akrotiri débutèrent en 1967, sous la direction de l'archéologue grec Spyridon Marinatos, qui les dirigea jusqu'à sa mort en 1974. Comme à Pompéi, les archéologues ont coulé du plâtre dans les espaces vides laissés dans la cendre volcanique durcie par la décomposition du bois et des matières organiques : on reproduit ainsi les objets d'origine. La continuité architecturale est telle à Santorin que si les ruines étaient peintes en blanc et bleu, on ne distinguerait pas la cité antique des villages modernes.

L'Atlantide, encore et toujours

Marinatos avait présumé que la civilisation minoenne avait été détruite en Crète ( ou du moins gravement affectée ) par une éruption du volcan Théra-Santorin, survenue au cours du -II° millénaire. Certains ont pensé que cette catastrophe aurait pu être à l'origine de la légende de l'Atlantide. Cette légende nous est transmise par le philosophe grec Platon ( -427/-347 ). Dans deux de ses dialogues, le Timée et le Critias, rédigés au -IV° siècle, soit plus d'un millénaire après l'éruption de Théra, il évoque une civilisation extraordinaire fleurissant sur une île qui sombra brutalement sous les flots et ne revint jamais à la surface.

Timée : « De grands tremblement de terre et des inondations engloutirent, en un seul jour et une seule nuit fatales l'île Atlantide qui disparut sous la mer ». Platon ne donne jamais la situation exacte de l'île, mais il indique : « Il y avait au-devant du détroit que vous appelez les Colonnes d'Hercule une île plus grande que la Libye ( = l'Afrique du nord ) et l'Asie ( = Anatolie ) réunies. Toujours selon Platon, peu après -590, un prêtre égyptien conta l'histoire de l'Atlantide au légiste grec Solon, en visite dans son pays. Le prêtre lui dit que ces événements s'étaient déroulés 9000 ans plus tôt, mais 900 ans conviendraient mieux, car cette durée situerait la disparition vers -1500, soit à peu près la date estimée, et non pas vers -9600 en plein Néolithique, alors qu'il n'y avait pas de cultures complexes. Solon avait transmis l'histoire à ses descendants, jusqu'à Platon vers -400. Platon donne une description très détaillée de l'Atlantide, précisant qu'elle était formée d'anneaux concentriques, alternativement de terre et d'eau, donnant les mesures précises des diverses parties de la cité.

Les indices de localisation étant vagues, on a cherché ce monde englouti en tous lieux, de Chypre aux Bahamas, mais aucune hypothèse n'est convaincante. Quand il y a des analogies avec la disposition des lieux, c'est la relation avec la culture grecque de l'Atlantide qui fait défaut. Il en a résulté une quantité de localisations imaginaires et parfois farfelues sans la moindre preuve concrète, ou que l'évolution des connaissances historiques démentent. Par exemple, un certain nombre de hauts fonds qui auraient pu être recouverts par les eaux à l'issue de la dernière glaciation de Würm ont été cités ; sont du nombre ceux en face du cap Spartel et du détroit de Gibraltar entre l'Espagne et le Maroc ( parce que devant les Colonnes d'Hercule ), ainsi qu'en mer du Nord, Dogger Bank en face des côtes anglaises, ou l'île d'Helgoland dans l'embouchure de l'Elbe. La fin du tardiglaciaire, il y a dix millénaires, correspondrait à peu près, mais on peut toujours y chercher une civilisation de l'ampleur requise qui aurait laissé des traces : une coïncidence qui ne fonctionne pas. Dans « Les mythes grecs », Robert Graves dit avoir remonté la piste de la légende depuis l'Egypte jusqu'au sud tunisien où la présence des chotts, vastes étendues marécageuses peu profondes et parfois situées au dessous du niveau de la mer, pourrait avoir suggéré à des conteurs la disparition d'antiques cités. Et, pour en venir au roman ( ou y rester ? ), citons encore Pierre Benoit qui situera en 1919 le domaine de son Antinéa plus au sud, dans le Hoggar.

On n'a pas non plus hésité à certains rapprochements audacieux qui hérissent les historiens sérieux, tel que celui-ci. Dans la Bible, le récit de l'Exode raconte que les Hébreux fuyant l'Egypte étaient guidés dans le désert le jour par une colonne de fumée et la nuit par une colonne de feu. Il est tentant de faire la liaison avec l'éruption de Théra, la direction, vers le nord, étant possible, mais ça ne colle pas pour la période : celle-ci serait antérieure d'au moins deux siècles à l'Exode, et surtout, personne ne peut dire si celui-ci a bien eu lieu : l'Histoire n'en conserve aucune trace. Par ailleurs, le texte de la Bible n'a été fixé qu'au milieu du -I° millénaire, soit mille ans environ après la catastrophe ( comme pour Platon, voici une autre coïncidence troublante, n'est-ce pas ? ) Un fait réel ou légendaire aurait-il pu être conservé dans les mémoires aussi longtemps ? Des chercheurs ont estimé que la mémoire d'un événement non écrit, conservé seulement par une tradition orale, s'estompe après quinze générations environ, soit trois à cinq siècles selon les époques. C'est déjà beaucoup, mais on est encore loin du compte.

Théra est la solution la plus plausible, même si les dates ne correspondent pas. L'explosion de Théra a pu être entendue et ressentie jusqu'en Egypte. Les Egyptiens ont pu voir le nuage provoqué par l'éruption, puis découvrir des pierres ponces flottant sur les eaux ou s'échouant sur leur littoral. Une inscription égyptienne, la « stèle de la tempête » pourrait être le récit contemporain de ce que les Egyptiens avaient entendu et vu pendant et après le cataclysme. Si celui-ci avait empêché les Minoens et les habitants des Cyclades de venir en Egypte, les Egyptiens ont pu en conclure qu'un grand empire insulaire avait disparu. Pour les habitants d'Akrotiri, leur monde avait bel et bien sombré dans les eaux en un seul jour et une seule nuit. L'éruption de Théra a pu servir de base à l'histoire de l'Atlantide racontée par Platon. En tout cas, les découvertes archéologiques faites sur le site d'Akrotiri par Marinatos et ses successeurs ont éclairé d'un jour nouveau l'âge du Bronze pendant le -II° millénaire, l'une des périodes les plus passionnantes de l'histoire de l'humanité.


COMMENT EST RACONTEE L'HISTOIRE

C'est beau, mais c'est très léger

C'est un récit linéaire où l'on va de lieu en lieu. Le fil conducteur n'est pas cette fois-ci le fil d'Ariane, bien qu'on reste un bon moment en Crète et dans ce qui a pu passer pour un labyrinthe, tandis que les taureaux ne sont que des bovins hargneux qui n'ont rien d'humain, même partiellement. Ce fil, donc, c'est une perle sertie dans un bijou, vendue à César non sans arrières pensées, semble-t-il, puis offert par celui-ci à Servilia. Ce détail qui sert de point de départ au récit est historique, mais pour autant qu'on sache, la perle, à part sa beauté naturelle et son prix prohibitif, n'avait rien d'extraordinaire, encore moins de maléfique ou de nuisible ; elle n'a d'ailleurs plus fait parler d'elle dans la réalité et on ne sait pas ce qu'elle est devenue. Ses effets sont-ils bien réels, ou relèvent-ils de la simple imagination des personnages ? Il n'y a évidemment pas d'explication, mais fallait-il en attendre une ? Elle « empoisonne » Servilia, Brutus et Deucalion, puis semble protéger ces deux derniers, tandis qu'elle est seulement néfaste pour Alix et Enak, sans qu'on sache la raison de cette différence. Les intéressés supposent qu'un contact prolongé rend plus résistant à son encontre, vaccinés, en quelque sorte, alors qu'on imaginerait plutôt le contraire. Est-ce cet effet qui provoque le songe fantasmagorique d'Alix en conclusion onirique de l'aventure ?

Celle-ci est très réaliste jusqu'à ce songe ( ou délire ? ). Le récit a pour objet de remonter aux origines de la perle, d'abord en identifiant ses vendeurs, puis, après son vol par Deucalion, on apprend d'où elle vient et comment elle s'est retrouvée sur le marché, à la suite d'un premier vol qui est un sacrilège envers une divinité, du moins est-ce l'hypothèse des protagonistes, qui y croient comme tous les gens de leur époque, et l'affaire se termine par la restitution du bijou à son « légitime propriétaire », le dieu Minotaure. A part la « corrida » dans le labyrinthe ( six pages qui n'ont pas d'incidence sur le déroulement de l'histoire ) la première partie de l'album n'est qu'un long voyage et il faut attendre les dix dernières pages pour découvrir un dieu bien oublié dans son temple souterrain et lui rendre son « bien », après un parcours acrobatique et tourmenté, seul moment de suspense relatif dans cette histoire sans grand relief.

Résumons l'affaire de la perle : un objet venu d'on ne sait trop où, aux pouvoirs réels ou supposés très puissants et généralement délétères, qui arrive entre les mains de nos héros, lesquels cherchent à s'en débarrasser par tous les moyens. Cette perle ne serait-elle pas une petite cousine du « dieu sauvage » ? 

Par ailleurs, il manque à cette histoire un vrai « méchant » humain, la perle n'étant qu'une chose. On évoque bien Arbacès qui a disparu, et Pompée qui est mort depuis deux ans. En dehors de ces absents, il reste Deucalion qui se révèle plutôt, après quelques péripéties, un compagnon gentil, dévoué et efficace ( il se rattrapera plus tard dans le mal, patience ). Bien sûr, il y a les taureaux du labyrinthe, mais ce ne sont que des animaux, dangereux, certes, mais faciles à contrer ( à ce propos, s'il y a des taureaux, il devrait y avoir aussi des vaches ; où sont-elles ? ), et le Minotaure de Théra, mais ce n'est qu'une statue de pierre immobile. Le séisme et les pièges souterrains sont bien plus dangereux que lui, mais à quoi s'attendre d'autre au sein d'une île volcanique ?

Tout cela m'a paru bien léger, dépourvu d'intensité dramatique sauf au cours de brefs passages et ne m'a pas convaincu, j'ai eu du mal à m'accrocher. C'est dommage, car c'est bien dessiné, avec des personnages très vivants et aux expressions remarquables, des décors fouillés pour des lieux minutieusement reconstitués. J'espère que le dessinateur reviendra pour nous offrir une autre histoire, mais avec un scénario plus solide car celui-ci fait vraiment le service minimum.

Et après ?

Alix revient sur les lieux de cette aventure 35 ans plus tard dans le cadre d'un épisode de la série « Alix Senator », le 13° : « L'antre du Minotaure ». Habituellement, je n'analyse pas les épisodes d'Alix Senator, puisqu'il existe un site internet très bien fait qui donne des renseignements sur les personnages, les lieux et l'histoire. J'attendais aussi la parution de cet album pour analyser « L'oeil du Minotaure », de manière à ne pas avancer des informations qui seraient contredites dans cette seconde partie.

Déception, là encore. On refait quasiment le même voyage que la première fois, pas tout à fait dans le même ordre, mais dans les mêmes lieux. Le récit est juste pimenté par une histoire de pirates, d'une parfaite banalité. Seule surprise, Deucalion se révèle être le vrai « méchant » de cette nouvelle histoire, et il est justement puni pour cela par où il a péché. Il est vrai que le temps a passé et que les choses et les gens changent... C'est tout ? Oui, c'est tout. On ne saura donc rien de plus cette fois-ci sur l'Atlantide, le Minotaure et la relation entre les deux. Ce sera peut-être pour un autre épisode, si l'histoire ne se perd pas en route une nouvelle fois.


LES PERSONNAGES

Alix : le voici de nouveau en mission, semi-officielle, ordonnée par César, semi-privée, une affaire quasiment familiale. Dès le départ, ce n'est pas simple pour dénicher le vendeur de la perle, s'il existe bien, mais c'est un voleur qui le remet sur la piste. Alix est chanceux pour cette fois et se confronte ensuite à des adversaires originaux : des taureaux grincheux dans un palais en ruine, des pièges compliqués dans une île aux soubresauts inquiétants, tout cela avec cette perle qui dégage une aura maléfique et qui le conduira à un songe étrange, loin d'un combat ordinaire, qui, pour une fois, le déstabilise, alors qu'il s'était comporté en héros endurci dans les autres situation difficiles. Cela nous montre une certaine fragilité du personnage, lorsqu'il ne s'agit plus contre lui d'adversaires physiques classiques.

Enak : éternel suiveur, il se comporte courageusement lorsqu'il le faut, même s'il n'est pas toujours bien inspiré. Plus prudent qu'Alix face aux taureaux, il craint finalement plus la colère d'un dieu inconnu que celle des hommes ou des éléments : rien d'étonnant pour un Egyptien au panthéon débordant de divinités.

Et, par ordre d'entrée en scène :

La perle noire : je la considère comme un personnage à part entière, omniprésente d'un bout à l'autre de l'histoire, sans qu'on sache vraiment quelle est son origine ni celui des tourments qu'elle provoque chez ceux qui la détiennent. Son retour à son point de départ la rendra-t-elle enfin inoffensive ?

Servilia Caepionis : ( voir l'article qui lui est consacré ) Historiquement, elle est l'une des rares femmes à avoir aimé César avec constance et sans conditions pendant vingt ans. Dans le récit, où elle ne fait que passer, elle doit subir les conséquences d'un cadeau empoisonné, qui, de plus, ne lui était pas destiné à l'origine.

Brutus : ( voir l'article qui lui est consacré ) Il est présenté comme un homme volontaire, passablement emporté et prompt à la violence, y compris comme on le voit au début, contre César, ce qui aurait pu lui coûter très cher ( mais ce ne sera que partie remise ). Il est aussi très conscient d'appartenir à une caste supérieure et privilégiée : cela se sent dans ses relations avec les officiers en Crète et ne doit pas être très loin de la réalité. Il se comporte néanmoins en aventurier courageux et n'hésite pas à venir en aide à ses compagnons dans l'adversité, c'est d'ailleurs lui qui s'en tire le mieux, au prix de quelques cauchemars. Un personnage complexe, aristocratique dans sa nature et dans sa culture, qui sait réfléchir, comme son modèle. A noter qu'il est présenté ici comme un très jeune homme, alors qu'il avait près de quarante ans à ce moment, et que ses opinions politiques très républicaines sont un peu laissées en dehors du récit. Dans celui-ci, c'est de loin le personnage le plus intéressant.

César : ( voir le contexte historique ) A cette époque, il jouit d'un moment de répit entre deux campagnes contre les Pompéiens et s'apprête à recevoir ses quatre triomphes. Sa situation politique s'est affermie et il ne voudrait pas que cette affaire de la perle soit un mauvais rappel d'un passé récent. Au delà de son affection pour Servilia, il a intérêt à régler ce problème le plus vite possible et la proposition de Brutus de s'en occuper est une bonne occasion de ne pas apparaître au premier plan devant des adversaires toujours prêts à chercher la faille.

Calpurnia : ( voir l'article qui lui est consacré ) Elle aussi ne fait que passer et on ne peut qu'admirer son calme devant l'évocation d'une situation qui ne pourrait que lui être préjudiciable et qu'elle semble parfaitement maîtriser. Elle ne se formalise pas de la relation intime que son époux maintient avec Servilia. Que ne ferait-on pas pour retenir son grand homme !

Les marchands de Massilia : même s'ils restent anonymes, ils n'en constituent pas moins une pittoresque cohorte, désireux de vendre au plus offrant, ce qui est naturel, mais sans illusions, parce qu'ils sont grecs, sur leurs éventuels clients romains ; si ceux-ci savaient ce que ces commerçants pensent d'eux !

Sebraca : absent, peut-être mort, l'ombre d'Arbacès ne cesse de planer encore une fois sur les pas d'Alix. On ne saura pourtant jamais s'il est réellement en cause dans l'affaire de la perle.

Deucalion : dans la mythologie, Deucalion est l'un des fils de Minos et de Pasiphaé, donc le demi-frère du Minotaure, qu'il tentera de défendre contre Thésée et celui-ci les tuera tous les deux. Ce Deucalion avait aussi participé à l'expédition des Argonautes. Celui de ce récit paraît comme un garçon simple, soucieux de régler une vieille histoire de famille : dérober un joyau appartenant à un dieu ne se fait pas et peut provoquer de terribles conséquences. En bon Crétois, il n'est pas très regardant sur les méthodes et les scrupules ne semblent pas l'étouffer. Une fois qu'il a admis que ses compagnons d'aventure ont aussi des enjeux à faire valoir, il se comporte en fidèle et courageux associé, plein d'astuce et d'initiative, malgré les effets néfastes de la perle. Il changera par la suite, mais c'est une autre histoire.

Lucius Hybrida : l'officier supérieur romain en Crète ne se montre guère enthousiaste à l'idée de collaborer avec cette expédition à l'aspect hétéroclite dont le chef, Brutus, le prend de haut avec lui de par sa position sociale et politique. Il assure un minimum de coopération, mais n'a pas envie de faire du zèle.

La famille de Deucalion, sa mère et son grand-père : après le forfait commis par le grand-père, qu'on ne rencontre qu'à travers ce que disent de lui sa fille et son petit-fils, à savoir la vol de la perle dans le temple du Minotaure, on comprend que la mère cherche à défendre son fils. Elle et les gens de son village paient cher leur lien et leur solidarité familiale. Mais leur logique n'est pas celle de Brutus et des Romains.

Les taureaux du labyrinthe : le palais de Cnossos est très bien reconstitué : qu'en aurait pensé Sir Arthur Evans ? A la fois somptueux et inquiétant, il est plus qu'un vestige : il est aussi lui-même un personnage qui abrite une étrange population. Les taureaux font... les taureaux, et cette « corrida » est la seule véritable scène d'action de l'album. Sans les affronter directement, Alix et Enak s'en tirent plutôt bien. Je me demande quand même où ces bovins paissent, car ils doivent bien manger et je ne vois pas de prairie à proximité, ni de vachers.

L'île de Théra et le dieu Minotaure : ils sont indissociables l'un de l'autre tel que le récit est présenté et ce sont également de vrais personnages de l'histoire. Ici, l'île semble inhabitée, elle ne l'a pas toujours été et ne le sera plus dans le second voyage d'Alix. Elle est inquiétante avec ses pièges et ses animaux bizarres, mais surtout avec son volcanisme permanent et ses séismes toujours réels et actuels. Le dieu taureau n'est qu'une statue imaginaire, témoin d'un culte venu d'ailleurs et d'un autre temps. L'effet onirique chez Alix et le malaise chez ses compagnons sont le résultat combiné de la perle, du lieu et son ambiance. L'essentiel est que la perle soit revenue d'où elle était partie : elle n'empoisonnera plus la vie de personne.




CONCLUSION

Dommage que cette aventure manque un peu d'action et d'intensité, car elle est bien dessinée, mais je n'ai pas totalement marché dans cette histoire de perle maléfique et de dieu installé dans un lieu par ailleurs bien connu. Bref, ce taureau ne m'a pas fait un effet bœuf.


Sources : Comme toujours, le « Dictionnaire de l'Antiquité » de Jean Leclant ( PUF ), est ma base, complété par les « Cahiers de Science et Vie », dont le N° 166 est consacré aux monstres, tel le Minotaure. Cnossos, Théra et l'Atlantide doivent beaucoup aux ouvrages de l'archéologue Eric H. Cline, abondamment cités : « Trois pierres, c'est un mur » ( CNRS, 2018 ), et « 1177 avant J.C. » ( La découverte, 2015 ). Dans « Les mythes grecs », Robert Graves raconte de long en large l'histoire de Minos, du Minotaure et de Thésée. Consultés aussi, les nombreux ouvrages sur César dont sa biographie par Robert Etienne, « Histoire de Marseille » de Raoul Busquet ( R. Laffont ) et Wikipédia pour les autres personnages.


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78Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Ven 19 Aoû - 9:01

Tarmac

Tarmac
vieux sage
vieux sage

Merci Jacky-Charles pour cette recension comme toujours pointue et minutieuse.

79Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Ven 19 Aoû - 9:33

Raymond

Raymond
Admin

C'est magnifique ! Merci Jacky-Charles !    pouce

Tu abordes vraiment beaucoup de sujets liés à l'histoire romaine et je réalise que cette multiplicité provient de l'album lui-même. Valérie Mangin aime l'histoire antique et elle a magistralement essayé d'étoffer son récit. Avec cette abondance de détails ou de faits historiques, l'histoire ne parait pas si fantaisiste que cela ... quand on le lit d'une façon naïve, bien sûr.

Pour ce qui concerne l'Atlantide, je trouve intéressant que tu considères l'hypothèse Santorin comme "l'une des plus plausibles", car c'était aussi mon sentiment. J'avais lu il y a une trentaine d'années un livre très richement illustré et consacré à la thèse de Spiridon Marinatos et il m'avait franchement séduit. J'avais donc été tout étonné (et déçu) de la réponse de Valérie Mangin à l'une de mes questions qui se trouve dans l'interview d'Alix Mag consacré à l'Antre du Minotaure. Elle ne croit pas du tout à la théorie de Marinatos mais ... cela ne l'empêche pas d'utiliser cette hypothèse dans le "diptyque du Minotaure", car l'Atlantide nous fait toujours rêver.   Cool

Valérie Mangin: "J’espère pouvoir faire vivre Alix encore de très nombreuses aventures pendant de nombreuses années." - Alix Mag', actualité sur l'oeuvre de l'univers créé par Jacques Martin, le père d' Alix, Lefranc, Jhen, Orion et Loïs. (canalblog.com)

Parmi les personnages, j'ai bien aimé la présence de Brutus dont le portrait me parait nuancé et assez vraisemblable. On l'imagine aujourd'hui comme un sale traître ou un arriviste mais tout le monde ne peut pas être un bon militaire ou un aventurier. Dans l'Oeil du Minotaure, Brutus est un personnage totalement humain et il devient presque sympathique.   Very Happy

Sinon, je suis assez d'accord avec tout ce que tu écris. Tu as dû passer beaucoup de temps à rédiger ce très long billet. Merci beaucoup !

Est ce que tu publiera une fois tous ces billets consacrés aux albums d'Alix ? Ils le mériteraient bien.   Cool


_________________
Et toujours ... Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Charli10
https://lectraymond.forumactif.com

80Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Ven 19 Aoû - 14:40

bruno

bruno
grand maître
grand maître

Quelle somme ! Merci pour cette analyse pointue Jacky-Charles cheers

http://www.canalbd.net

81Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Ven 19 Aoû - 23:06

Jacky-Charles


docteur honoris causa
docteur honoris causa

Merci à vous ! Je suis heureux que ce texte vous plaise.

Oui, il a été assez long à rédiger et à finaliser, car je n'ai reçu que tardivement l'ouvrage d'Eric H. Cline qui m'a servi de base pour l'article sur la Crète et Théra. Et cette analyse est en effet la plus longue de toutes jusqu'à présent.

Quant à le publier ailleurs... Pour moi, ces analyses ne sont destinées qu'à ce Forum et à ses participants. Mais si quelqu'un a une idée pour concrétiser cela, je veux bien y penser.

82Alix 40 L'oeil du Minotaure - Page 4 Empty Re: Alix 40 L'oeil du Minotaure Sam 3 Sep - 11:37

stephane

stephane
vieux sage
vieux sage

merci pour ce long et passionnant retour Jacky-Charles !
En relisant cette histoire, une scène me gêne: lorsqu'Alix et Brutus parlent d'Arbaces, je ne reconnais pas Arbaces à genoux devant César, si c'est lui? (page 14). Cette scène est ratée et me déstabilise lors de ma lecture.

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