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Les reportages d'Etienne Davodeau

3 participants

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Raymond

Raymond
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Oui, ce récit est peut être plus facile à lire d'un point de vue féminin. Rolling Eyes


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http://casemate.fr/plongee-dans-les-eaux-glauques-de-la-ve-republique/

http://culturebox.francetvinfo.fr/livres/bande-dessinee/cher-pays-de-notre-enfance-les-annees-de-plomb-de-la-5e-republique-en-bd-230097

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Cher-p10



Dernière édition par Treblig le Lun 2 Nov - 9:43, édité 1 fois

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A l'écoute d'Etienne Davodeau et Benoît Collombat qui parle de leur bande dessinée "Cher pays de notre enfance" (cf. post précédent). Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Smiley11


http://expressbd.fr/2015/10/28/etienne-davodeau-et-benoit-collombat-auteurs-de-cher-pays-de-notre-enfance/

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http://www.bodoi.info/davodeau-et-les-annees-de-plomb-francaises/

Raymond

Raymond
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J'avais lu les deux premiers chapitres de Cher Pays de notre Enfance dans la Revue Dessinée, et je n'étais donc pas pressé d'acheter ce livre. Comme on en a parlé à Angoulême, j'ai finalement décidé de rattraper le retard.  Wink

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Cherpa15

Cher pays de notre enfance est un nouveau reportage dessiné, qui explore les mystères du fameux "SAC". Ce "service d'action civique" était une bande de soudards aux ordres du gouvernement (puis du parti) gaulliste pendant les années 60 et 70, et il était au départ composé de policiers et de militaires. Par la suite, quelques délinquants et voleurs ont intégré ce groupement qui agissait d'une façon totalement illégale, et qui semble impliqué dans certains suicides et meurtres mal résolus.

Etienne Davodeau et Benoit Collombat ont mené eux-mêmes cette enquête pendant plus de deux ans, et le dessinateur raconte tout simplement le déroulement de leurs investigations, étape par étape, en allant interviewer les derniers témoins vivants de certaines affaires judiciaires.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Cherpa12

Deux affaires mystérieuses des années 70, celle de la mort du ministre Robert Boulin, et celle de l'assassinat de juge Renaud, sont racontées en détail, et les conclusions des enquêteurs sont terrifiantes. On peut d'ailleurs relever que l'album apporte des informations et des témoignages inédits, et ceci donne à cette BD un intérêt qui dépasse largement les préoccupations autour du 9ème art.

Bien sûr, ce genre de reportage soulève quand même la question de l'emploi du "médium" bande dessinée. Pourquoi faire de cette enquête une BD, plutôt qu'un reportage filmé ou un livre ordinaire ? Ce choix des auteurs peut se discuter (en particulier pour ceux qui considèrent la BD comme un simple divertissement), mais le résultat est tout de même impressionnant. Davodeau possède un réel talent de metteur en scène pour illustrer toutes ces discussions et ces longs témoignages, et l'oeuvre se lit ainsi facilement, sans qu'il apparaisse de baisse d'intérêt au fil des pages.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Cherpa14

Le choix de traiter ce sujet avec une bande dessinée se révèle finalement convainquant, et il faut souligner que cet album a remporté à Angoulême le "Prix du Public". Il s'agit donc d'une BD véritablement populaire, malgré son style sérieux et son sujet un peu austère.

En fait, Cher pays de notre enfance est tout simplement une belle BD destinée aux adultes.  Very Happy


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Raymond

Raymond
Admin

Cela fait un moment que l'on n'a pas parlé d'Etienne Davodeau.

Certes, j'avais mentionné dans un autre sujet son travail de dessinateur sur le tome 1 de l'Histoire de France, qui s'intitule La balade nationale, mais ce n'était pas vraiment un "album de Davodeau".

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Davode11

Davodeau sort maintenant un vrai livre qui propose un florilège de ses multiples histoires courtes publiées jadis dans divers journaux et albums collectifs. Ce recueil s'intitule l'Avancée des Travaux.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Avancz10

Ce genre de livre (fort apprécié des collectionneurs) est rarement une occasion de s'extasier, mais l'Avancée des Travaux n'est pas un album ordinaire. Il contient tout d'abord une présentation intéressante des BD, car chaque œuvre est introduite d'une manière intelligente par un petit entretien entre Davodeau et Claude Gendrot (qui est son éditeur). Et ces échanges sont réellement passionnants, grâce aux remarques originales et pertinentes de Gendrot, ainsi qu'aux explications toujours précises et détaillées du dessinateur.

Par ailleurs, certaines de ces BD sont de très haute qualité. Comme le fait remarquer Claude Gendrot dans cet album, Davodeau est capable de rendre intéressant n'importe quelle petite histoire, car il a l'intelligence de ne pas se cacher derrière le masque d'une prétendue neutralité. Ce point de vue est fort bien illustré par un beau récit en couleurs intitulé 20 décembre 1999, qui est extrait d'un livre collectif de 2007 commandité par France Info, dans lequel des dessinateurs présentaient en bandes dessinées un événement plus ou moins récent ayant fait l'actualité. Davodeau avait ainsi choisi de parler de l'ouragan Lothar, qui était survenu à la fin de l'année 1999.

Le début de cette BD est presque banal, et on ne comprend d'ailleurs pas tout de suite à quoi il veut venir. Davodeau commence par exposer quelques confidences, et les premières images apparaissent presque poétiques, et dédiées au vent et à la campagne.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Avancz11

Et puis l'histoire avance ! On tourne les pages du livre et on se rend peu à peu compte que Davodeau raconte un phénomène peu ordinaire. Les images deviennent cruelles et nous rappelle que la "nature" n'est pas toujours gentille avec les hommes.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Avancz12

Et cela continue ainsi. L'auteur met alors en scène ses propres souvenirs de Lothar, qui a eu des conséquences concrètes sur sa vie quotidienne, et le lecteur découvre ce que peut être un ouragan au quotidien. Cette œuvre très courte (8 pages) est réellement frappante, et parfaitement maîtrisée. C'est presque un petit chef d'œuvre.

D'autres récits sont à moitié imaginaires, comme par exemple une BD créée pour un album collectif de Casterman, dans lequel 17 auteurs racontaient à leur manière leur propre découverte du pays. Là aussi, plutôt que de montrer en images un simple journal de voyage, Davodeau invente un personnage (un vieux japonais) qui va servir de guide pour découvrir le pays. Cette œuvre est pour cette raison nommée Sapporo fiction, et elle frappe par sa fausse simplicité.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Avancz13

Et puis, il y a aussi de simples "BD reportages" sans effet de style, qui ne sont pas forcément les plus passionnantes, mais où l'on reconnait bien la "patte" de l'auteur. C'est le cas par exemple d'une BD autrefois publiée dans le magazine Bang, qui raconte les manifestations populaires ayant entourée la réunion du G8 en 2003. Seuls les passionnés de politique apprécieront.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Avancz14

L'avancée des Travaux est donc un livre mixte dont les œuvres sont de valeur inégale. Toutefois, la variété des sujets est plutôt agréable et Davodeau excelle dans la réalisation de certains exercices de style. Et puis, on y trouve aussi quelques pépites qui montrent que l'auteur est un maître, et qui justifient à elles seules de découvrir cet album.

Et enfin, même lorsque ce n'est pas passionnant, c'est toujours du Davodeau.  Wink


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Raymond

Raymond
Admin

J'ai feuilleté le week-end dernier le dernier album d'Etienne Davodeau. Il s'intitule les Couloirs aériens et il a été réalisé avec Joub et Christophe Hermenier.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Couloi10

Je ne l'ai pas acheté mais cela viendra bien un jour.  Wink

Gilles Ratier dit du bien de cet album :

http://bdzoom.com/148093/actualites/la-crise-de-la-cinquantaine-vue-par-davodeau-et-ses-copains…/


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Raymond

Raymond
Admin

J'ai bien aimé les couloirs aériens, mais je n'ai hélas pas eu le temps d'en écrire une chronique (c'est la faute à Jacques Martin qui me prend tout mon temps Wink ).

Heureusement, Auracan a pondu une petite critique assez élogieuse !

http://www.auracan.com/albums/3281-les-couloirs-aeriens-par-etienne-davodeau-christophe-hermenier-et-joub-etienne-davodeau.html

c'est un album que je recommande !  Very Happy


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eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonsoir

Je l'ai lu et ai plutôt été refroidie, non parce-que l’ouvrage se passe en hiver, dans le Jura ( Laughing ), mais par le personnage principal Yvan, profondément antipathique.

Le héros vient d'avoir la cinquantaine et, après le décès de ses parents et la perte de son emploi, sombre dans l'auto-apitoiement. Aussi part-il se ressourcer auprès d'un ami d'enfance dans la montagne.
Les métaphores avec la nature sont nombreuses. Ainsi, la neige qui recouvre le paysage incarne la pureté, comme dans Tintin au Tibet, sauf que Yvan est tout sauf pur. Il trompe son épouse lors d'une aventure d'un soir et prends même quelques photographies (très) indiscrètes de celle qui s'est offerte à lui ! Ses enfants ont fui sa famille, l'un au Canada et l'autre dans l'activisme. Les secrets du passé d'Yvan nous sont distillés à l’instar d'un poison, goutte à goutte. Par ailleurs, la surface gelée d'un lac figure la droiture mentale du héros et, bien évidemment, la glace se brise lorsqu'il marche dessus...
Changeons de paradigme.. pour arriver à une conclusion identique... Yvan et son frère ayant pris la décision de vendre la maison familiale, il retrouve ses affaires, ce qui donne lieu à de nouvelles scènes de nostalgie où Davodeau dessine un gaufrier de vieux jouets, jouets devant lesquels Yvan s'abîme dans une complaisante mélancolie.
Bref, un héros peu sympathique, pour ne pas dire plus.

Je préfère infiniment Stendhal lorsqu'il évoque la même (auto) inquiétude dans la vie d'Henry Brulard (https://fr.wikipedia.org/wiki/Vie_de_Henry_Brulard). Et je ne résiste pas au plaisir de vous donner cet extrait de l’œuvre :
Ah ! dans trois mois j'aurai cinquante ans, est-il bien possible ! 1783, 93, 1803, je suis tout le compte sur mes doigts.., et 1833 cinquante.
Est-il bien possible ! cinquante ! Je vais avoir la cinquantaine et je chantais l'air de Grétry : Quand on a la cinquantaine.
Cette découverte imprévue ne m'irrita point, je venais de songer à Annibal et aux Romains. De plus grands que moi sont bien morts !... Après tout, me dis-je, je n'ai pas mal occupé ma vie, occupé ! Ah! c'est-à-dire que le hasard ne m'a pas donné trop de malheurs, car en vérité ai-je dirigé le moins du monde ma vie ?
Aller devenir amoureux de Mlle de Griesheim ! Que pouvais-je espérer d'une demoiselle noble, fille d'un général en faveur deux mois auparavant, avant la bataille de Iéna ! Brichard avait, bien raison quand il me disait avec sa méchanceté habituelle : “ Quand on aime une femme, on se dit qu'en veux-je faire ?
Je me suis assis sur les marches de San Pietro et là j'ai rêvé une heure ou deux à cette idée. Je vais avoir cinquante ans, il serait bien temps de me connaître.Qu'ai-je été, que suis-je, en vérité je serais bien embarrassé de le dire.


Bonne soirée
Eléanore



Dernière édition par eleanore-clo le Mar 31 Déc - 7:47, édité 1 fois

Raymond

Raymond
Admin

Evidemment, si on compare Davodeau à Stendhal …   Very Happy

Mais pour ma part, je ne l'ai pas trouvé tellement antipathique, ce vieux ronchon vaincu par la vie. Je l'ai surtout trouvé très humain. J'ai souvent observé qu'à partir d'un certain âge, on souffre beaucoup (et on ne se pardonne pas) du mal que l'on a laissé derrière soi. C'est vrai qu'il y a de l'auto-apitoiement chez ce personnage, mais il y a surtout de la détresse. Toutes ses illusions ont volé en éclat et il n'a plus rien pour se distraire. Il ne lui reste plus qu'à faire le bilan de sa vie.

Les paysages enneigés créent souvent une ambiance magique (par exemple dans les BD de Cosey  Wink ). Mais dans ce livre, c'est tout à fait le contraire. Dans ces paysages blanchis par l'hiver, on découvre surtout un froid, probablement mordant, et une nudité implacable de la nature qui accentuent le sentiment de solitude. Je trouve que cette ambiance est très bien construite par l'auteur, et elle résonne très juste. On peut parfois vivre ce genre de situation dans les paysages du Jura en hiver.

J'ai rencontré un certain nombre de personnages de ce genre, dans mon travail, et le plus souvent ils ne sont pas antipathiques. Il faut essayer d'aller au-delà des apparences.

C'est du moins comme cela que je comprends ce livre. jap


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eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Merci pour cette vision  Very Happy .

Après avoir réfléchi, je crois qu'on peut avoir plusieurs visions d'Yvan.

La première, positive, est que la BD conte sa rédemption et son acceptation de la cinquantaine. Il fait ainsi le deuil de ses parents durant le vide-grenier, se réconcilie avec sa jeunesse en recevant le pardon de Valérie dont il a détruit ou changé la vie (au choix), renoue avec sa taïwanaise d'épouse, prend l'avion pour rendre visite à son fils, soutient sa fille lorsqu'elle occupe les locaux d'Amazon, etc. Sous cet angle, la maison de son ami devient un cocon duquel, telle une chrysalide, sort un nouvel homme. La neige qui cerne la maison de son ami protège Yvan d'un dehors agressif. Et le décès de Marcel marque un don de vie. Le départ du vieil homme coïncide en effet avec la renaissance d'Yvan, comme dans Lulu femme nue où le décès de Marthe correspond à un nouveau départ pour Lulu.

La seconde, négative, est qu'Yvan est un incurable narcissique, avec un infime soupçon de perversité. Sa fumette et sa "virée" dans la campagne, sa balade irresponsable sur le lac glacé, les photos de Julia nue, prises (volées) durant le sommeil de la jeune femme, sont autant de preuves de son infantilisme et de son égoïsme. D'ailleurs, le dialogue final entre Yvan et son ami de jeunesse est révélateur :
- (Yvan) C'est curieux, je ne sais pas si je dois vous remercier
- (Thierry) Moi non plus je ne sais pas.

En fait, je trouve que cette BD est une anamorphose. Davodeau joue avec son lecteur pour rendre sympathique l'antipathique. Ne serait-ce pas la marque de ce (très grand) auteur ? Des convictions certes mais une discrète manipulation ?  Rolling Eyes

Cordialement
Éléanore

Raymond

Raymond
Admin

Quelques nouvelles d'Etienne Davodeau dont le prochain album sortira en septembre 2021 !

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Davode12

Il s'intitulera Droit du sol et racontera un long périple de l'auteur à travers la France. ActuaBD vous l'explique à l'adresse ci-dessous :

https://www.actuabd.com/+Etienne-Davodeau-evoquera-Le-Droit-du-sol-dans-son-prochain-livre-prevu-pour+


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Khyron


alixophile
alixophile

eleanore-clo a écrit:Bonsoir

Je suis née dans un milieu ouvrier au cœur des Trente Glorieuses. Et je ne crois pas que la France était coupée en deux. La séparation entre "droite" et "gauche" était différente du fait de la stature du général de Gaulle. Beaucoup de petites gens étaient ainsi gaullistes car il incarnait la résistance et la victoire sur le nazisme. Il était celui qui avait su sortir le pays du guêpier algérien et tous les appelés du contingent (pacifistes de raison ou de cœur) lui en étaient reconnaissants. N'oublions pas que le gouvernement provisoire du général De Gaulle avait créé la la sécurité sociale (donc une institution de solidarité) et avait donné le droit de votes aux femmes (et le féminisme est souvent perçu comme une valeur de gauche).

La vrai cassure est arrivée plus tard en 1968, portée par les milieux intellectuels (Sartre et les maoïstes) et ouvriers (la grève des usines Bréguet...).

Davodeau me semble trop dogmatique avec le monde patronal. Cela ne me générait pas de la part d'un écrivain engagé se revendiquant comme tel. Mais son ton est professoral.

Sinon, oui, Les mauvaises gens est un bel ouvrage. C'est une superbe chronique sur l'époque, vue sous un angle et d'un point de vue. Et si on garde cela en tête, oui, le livre en vaut la peine.

Cordialement
Eléanore-clo

Bonjour,

Je suis entièrement d'accord avec toi. J'ai beaucoup de mal à apprécier le travail de Davodeau sur le fond (je n'ai rien à redire à la forme de son univers graphique) pour deux raisons que tu as citées :
- une dimension manipulatoire vis-à-vis du lecteur, utilisant la force des émotions dans le cadre d'une optique politique ;
- une nette tendance à présenter, sous un angle apparement didactique/professoral des opinions discutables comme des faits avérés et intangibles.

L'album où l'auteur va le plus loin est Un homme est mort qui reprend sans aucune nuance la version du parti communiste français de l'époque (et de ses organisations satellites) sur les évènements de Brest de mars-avril 1950. L'album se présente lui-même comme une "BD documentaire" et non comme une oeuvre engagée (donc forcément partiale), ce qui est déjà biaisé. Un dossier en fin d'album prend un peu plus de recul sur le contexte, c'est vrai. Mais l'oeuvre dessinée est ce qu'elle est.  

C'est dommage car les thèmes évoqués en valent la peine, en nous faisant sortir des sentiers trop rebattus.

La ligne sous-jacente de ses oeuvres est "quand tous les hommes de bonne volonté auront construit le monde idéal dont ils rêvent (et moi aussi), l'humanité sera enfin heureuse et toute cette tristesse que je décris disparaîtra tout en servant de butte-témoin pour les générations futures".

Vision dont je ne partage "ni les attendus ni les conclusions" comme disait le général de Gaulle.

Raymond

Raymond
Admin

On annonce un nouvel album d'Etienne Davodeau, qui s'intitule Droit du Sol, et j'ai l'impression que cela va être une des grandes œuvres de la rentrée.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Droit-10

Le livre raconte un voyage à pied du dessinateur à travers la France, qui a duré un mois, et qui lui a permis et qui lui a permis d'élaborer une belle réflexion, pouvant avoir des conséquences politiques.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Droit-11

Le côté politique ne me passionne pas mais le livre m'intéresse vraiment.

Philippe Tomblaine le commente de son côté d'une façon élogieuse.

http://bdzoom.com/170945/lart-de/%c2%ab-le-droit-du-sol-journal-d%e2%80%99un-vertige-%c2%bb-etienne-davodeau-tres-terre-a-terre/


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Raymond

Raymond
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J'ai donc lu le Droit du Sol, d'abord avec enthousiasme et ensuite avec un peu de peine. C'est sans nul doute un livre intéressant, mais il est quand même très orienté et militant.

Le point de départ, c'est un long voyage à pied que Davodeau a fait il y a plus d'une année à travers la France, en partant de la grotte de Pech Merle dans le Lot, pour aller jusqu'à Bure en Lorraine. C'est là que le gouvernement français est en train de créer un lieu de stockage souterrain pour les déchets des centrales nucléaires.

Le "droit du sol" est donc un titre qui à double sens. Il y a d'une part le droit du promeneur qui s'adonne au plaisir de la marche, et qui entretient avec le sol terrestre une sorte de complicité vivante et ludique, et d'autre part le droit du sol terrestre qui est présenté comme une véritable couche vivante qui enveloppe notre planète, qui est productrice de nourriture et de tout ce qui est indispensable à la vie, et sans laquelle notre existence deviendrait impossible. Ce sol terrestre est bien sûr de plus en plus malmené par les actions humaines, en particulier lorsqu'on y enterre des déchets qui vont rester toxiques pendant environ 100'000 ans.

Au début du livre, Davodeau nous parle cependant surtout du plaisir de la marche. Une grande partie de ses loisirs et de ses vacances sont consacrés à de longues promenades faites à travers la France et le dessinateur est ainsi un marcheur bien entraîné. Le simple fait d'arpenter un pays de long en large est d'ailleurs une source d'équilibre et de plaisir. L'album qui raconte son long périple est donc rempli d'images paisibles et de paysages ordinaires, dans lesquels l'auteur s'adonne à son passe temps favori.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Droit-12

La pensée vient en marchant et on peut même dire que les idées affluent pendant cette activité. Beaucoup d'écrivains y trouvent leur inspiration et Davodeau nous offre ainsi de belles réflexions sur le plaisir d'accomplir ce chemin etd e découvrir la nature autour de lui. La solitude qu'il a volontairement choisie pour effectuer son périple est également la source de belles expériences et le premier tiers du livre est donc presque un simple reportage sur la vie quotidienne du marcheur.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Droit-13

Mais voilà, Davodeau ne va pas n'importe où ! S'il part de la grotte de Pech Merle, un lieu qui nous montre les traces d'une vie très ancienne, il se rend vers un endroit beaucoup plus sinistre qui va être la source d'émanations toxiques pendant des dizaines de milliers d'années. Et pendant ce long trekking, l'entrepôt de déchets nucléaires (qui est sa destination) va rapidement absorber toutes les pensées (et le discours) de l'auteur !  Crying or Very sad

Dès lors, le Droit du Sol se transforme en un ouvrage didactique, dans lequel Davodeau convoque (fictivement) tout un défilé de spécialistes qui vont instruire le lecteur sur les risques du nucléaire et sur les tactiques utilisées par le gouvernement français pour concrétiser son projet d'entrepôt nucléaire souterrain. Des ingénieurs et des universitaires viennent donc longuement nous expliquer les dangers de l'énergie atomique et ... c'est hélas un peu trop long.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Droit-14

Quelques militants écologistes et hommes politiques locaux défilent également dans cet ouvrage, et il en résulte une accumulation d'argumentaires qui nous éloignent totalement du plaisir de la promenade. C'est en fait surtout un débat sur le nucléaire que nous propose ce livre (qu'il sera intéressant de confronter au dernier album de Christophe Blain) et disons le tout net, je me suis parfois franchement ennuyé. Quelque soit la justesse des arguments, la discussion détaillée de la politique municipale de Bure suite au projet d'enfouissement des déchets a été pour moi assez soporifique. Et en voulant ainsi démontrer de multiples choses, le livre de Davodeau perd peu à peu toute sa force, et toute sa séduction.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Droit-15

Au final, le Droit du Sol me parait donc être un livre plutôt ambitieux, par moments très inspiré mais également sur la fin assez ennuyeux. Il manque de plus une vraie conclusion à cette marche écologique, qui se termine d'une façon plutôt abrupte, mais peut-être était-ce volontaire de la part de Davodeau que de laisser ainsi une "fin ouverte". L'enfouissement de ces déchets atomiques ne s'est pas encore concrétisé et peut-être l'auteur a t-il encore un espoir ? Mais peut-être faudrait-il aussi se demander où mettre les déchets nucléaires actuels si le projet de Bure ne devait pas aboutir. Etienne Davodeau se garde bien de répondre à cette question épineuse.

Je me garderai sinon de mettre une note à ce livre, puisque mes sentiments sont très mitigés et que ce livre n'est pas sans mérite. Les admirateurs de Davodeau l'achèteront certainement, mais je me demande ce que fera le grand public ?

En ce qui vous concerne, vous êtes dorénavant avertis !   Cool


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Raymond

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David Taugis est plus indulgent que moi au sujet de Droit du Sol et il présente avec bienveillance ce livre sur ActuaBD !

https://www.actuabd.com/Le-Droit-du-sol-l-appel-a-l-eveil-d-Etienne-Davodeau-chez-Futuropolis

Selon lui, il y a quelque chose du Depardon qui arpente la France en images dans cette curiosité partageuse de notre patrimoine !

Ce livre n'est donc pas sans mérite.


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eleanore-clo

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Loire est un roman graphique d'Etienne Davodeau

Louis vient de recevoir une invitation d’Agathe, une ancienne amante. Envahi par la nostalgie et l'espoir, il prend la route et se rend dans un hameau sur les bords de la Loire. A sa grande surprise, son ex-compagne n'est pas là mais il retrouve Jalil, l'homme l'ayant remplacé dans le cœur de son amie ! Et les surprises ne s'arrêtent pas là puisque Agathe a envoyé son appel à toutes les personnes l'ayant côtoyée. Louis fait ainsi la connaissance d'inconnus et surtout de Laure, la fille de sa maîtresse (un mot que je n'aime pas mais qui me semble ici bien adapté !), dont il se demande s'il ne serait pas le père. Et surtout, notre héros découvre que son ancienne relation est décédée et que les invitations ont été envoyées par un couple d'amis auquel elle a donné sa maison ! Et tout ce petit monde va se découvrir et interagir sur les bords du cours d'eau, sur ses rives pleines de mystères et de beauté.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Aa230

Résumer l'intrigue relève ici de l'exploit car les faits bruts font penser à un mauvais vaudeville alors que le but ou plutôt les buts de Davodeau se situent ailleurs.
Tout d'abord, l'auteur brosse une audacieuse comparaison entre Agathe et la Loire. L'héroïne ressemble beaucoup au "dernier grand fleuve sauvage de France". Comme lui, elle est changeante. Ainsi, de la même façon que les crus peuvent survenir inopinément, Agathe est imprévisible. Et en parallèle des sécheresses, on peut bien évidemment considérer le manque de fidélité du personnage. Dans un autre registre, les rives de la Loire abritent une belle biodiversité que l'on peut rapprocher de l'incroyable panorama des relations d'Agathe. Davodeau ose donc un rapprochement étrange que l'on aime ou n'aime pas !
L'auteur se veut aussi le chantre de la Nature. S'appuyant sur le mythe d'un fleuve épargné par l'homme, le bédéaste construit la vision idyllique d'un monde innocent, accueillant et quasi-maternel. Davodeau, scénariste engagé, poursuit ici son virage écologiste. Et il n'est pas innocent que Laure soit maraîchère dans la ZAD de Notre Dame des Landes. Dans cet univers, l'homme retourne à l'état tribal avec un fonctionnement communautaire (communautariste ?). Et bien évidemment, le progrès n'a pas droit de cité dans ce petit paradis.
La conclusion de l'ouvrage relève de la même veine avec une étrange incursion dans le droit à mourir dignement.

Les reportages d'Etienne Davodeau - Page 2 Aa232

Le graphisme ne surprendra pas les amateurs du bédéaste. Si le dessin des personnages s'inscrit dans la droite lignée des précédents ouvrages de Davodeau, celui des paysages apparaît plus nouveau. Manifestement, l'auteur, originaire d'Angers, s'est assis le long du fleuve, a sorti son carnet de croquis et a essayé de saisir la beauté des rives de la Loire. Les dernières pages du récit, muettes, constituent une succession de cartes postales.

Finalement, ce sera EEE. EEE car la démarche est intellectuellement cohérente, et car les vignettes font rêver. Après, tout un chacun pourra ou pas adhérer à un militantisme que je trouve personnellement simpliste.

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Merci de cette intéressante présentation. C'est un titre que j'achèterai certainement car le thème de la Loire semble être très bien traité.

Je suis assez d'accord avec ce que tu écris sur le militantisme du dessinateur. Je reste toutefois très admiratif de tout ce que dessine Davodeau, car ce sont des BD adultes, ambitieuses et personnelles. Bien sûr, je ne partage pas toujours ses idées militantes mais il faut bien admettre certaines différences. Wink


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Raymond

Raymond
Admin

Planète BD commente assez mollement l'album Loire, avec une note assez moyenne !

https://www.planetebd.com/bd/futuropolis/loire/-/52593.html


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Raymond

Raymond
Admin

J'ai lu à mon tour Loire le week-end dernier et je rejoins assez volontiers l'appréciation finale d'eleanore-clo. Cette BD est intelligente et personnelle, et elle propose de plus un scénario assez original, mais les personnages me semblent trop superficiels. Il aurait fallu que le personnage principal (Agathe qui est décédée et que l'on présente comme une énigme) possède quand même un peu plus de substance, et surtout davantage de réalisme pour que l'on croie à cette histoire ! Comme on ne sait rien sur cette Agathe et que les hommes (et femmes) qui l'ont connue sont eux-mêmes cernés d'une façon très floue, le récit devient un peu abstrait. Cette pantalonnade manque cruellement de chair et d'humanité. La seule chose qui soit réelle et bien sentie dans cette histoire, c'est la Loire avec ses paysages charmants, ses dangers possibles et ses habitants paisibles.

Davodeau ayant renoncé aux aspects psychologiques de son scénario, il nous reste en fait un récit anecdotique. L'intrigue n'est pas désagréable à lire mais elle manque de puissance. Il n'y a pas grand chose à comprendre et je ne m'y suis pas vraiment intéressé. J'ai contemplé les images avec plaisir mais il y manque vraiment un petit quelque chose. C'est assez dommage.

Le EEE me semble sinon correct car l'album possède tout de même certaines qualités.


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Raymond

Raymond
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ActuaBD commente élogieusement Loire et c'est au fond mérité !

https://www.actuabd.com/Loire-Par-Etienne-Davodeau-Ed-Futuropolis

Pour résumer la pensée du critique : voilà donc un très bel ouvrage, tant sur la forme que sur le fond, qui en dit beaucoup sans être bavard. C'est fort bien dit ! Very Happy


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eleanore-clo

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vieux sage
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Les libraires œuvrant derrière le prix RTL de la meilleure BD ont élu Loire pour le mois d'octobre :
https://www.rtl.fr/culture/arts-spectacles/loire-d-etienne-davodeau-sacree-bd-rtl-du-mois-d-octobre-7900315164.
La notoriété est bien utile...

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

OUIIII ... certes ... bien sûr, mais Davodeau a beaucoup travaillé pendant toute sa carrière pour acquérir sa bonne réputation.  Wink


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