Les belles images de Jean-Pierre GIBRAT

Ex-libris.

"Cécile".

Sortie prévue le 12 octobre.

La version luxe sera également disponible à la même date.

Affiche promotionnelle pour la sortie imminente de ce nouvel album; elle sera visible dans les gares.

Bonjour

Mattéo poursuit sa traversée du XXème siècle. Il semble rechercher les tempêtes de l'histoire et possède le talent rare de se retrouver, à chaque fois, dans l’œil d'un cyclone ! Gibrat emmène donc nos héros, ce couple qui ne dit pas son nom mais dont toutes les lectrices(lecteurs) ont compris l'existence, en Espagne, au cœur du conflit. Amélie va exercer ses talents d'infirmières, tandis que Mattéo, l'anarchiste, se retrouve à la tête d'une brigade internationale. L'opus raconte  la conquête meurtrière d'un petit village catalan tenu par les nationalistes.
L'histoire est donc vue par le petit bout de la lorgnette, à travers le destin de gens ordinaires. On retrouve donc les recettes éprouvées et inventées dans Le Sursis et Le vol du corbeau. On pense au docteur Jivago, pris aussi dans un évènement plus grand que lui. Néanmoins, Amélie et Mattéo sont plus que des spectateurs, ils se veulent acteurs. Amélie soigne les soldats et Mattéo va mener l'assaut. Gibrat nous révèle une facette inconnue de sa personnalité, un humour grinçant un peu à la sauce Charlie Hebdo, et le personnage du curé fait débat. Doit-on en rire ou en pleurer ? Il soulève aussi moult questions philosophiques ? Jusqu'où suivre ses idées ? La religion est-elle un vecteur de paix ? Quel sens donner à sa vie ?

J'ai été séduite ( ) par la relation entre nos deux héros qui m'a fait penser à la chanson d’Édith Piaf : La Foule. L'infirmière et l'anarchiste tournent l'un autour de l'autre, s'éloignent pour mieux se rapprocher. Et leurs toquades (Amélie semble s'amouracher d'un aviateur britannique pendant que Mattéo est très proche d'une franc-tireur polonaise...) ressemblent à un jeu d'acteurs. La fin est ouverte. Et il nous faudra attendre le 5ème opus pour connaitre le sort des deux personnages.

Le dessin est égal à lui même. La beauté des femmes est parfaitement mise en valeur, et une grande sensualité émane d'elles. Les hommes, euh, bon, bah, comment dire, et bien, on ne demande pas spécialement à un homme d'être un canon de beauté ( ) ! Les paysages catalans font rêver, tant la campagne que le village. Et les couleurs sont franches, éclatantes, solaires. Un délice.

En résumé, un Gibrat très classique. Pas du niveau du Sursis bien évidemment, mais qui se tient et traduit l'engagement sans faille d'un artiste intègre.

Cordialement
Eléanore

J'ai donc lu aujourd'hui cette "4ème époque" de Matteo, et j'avoue ne pas avoir pensé à la chanson d'Edith Piaf !  

Cela fait bien 4 ans que Gibrat dessinait cette histoire, et je dois avouer que j'avais un peu oublié le tome précédent. Mais il ne m'a pas été difficile de renouer avec le récit. Matteo et ses amis étaient donc en fuite vers l'Espagne, en emmenant un stock d'armes, et il ne leur a pas été difficile de s'engager aux côtés des républicains espagnols.

J'étais curieux de voir comment Gibrat allait présenter cette terrible Guerre d'Espagne ... et le dessinateur reste fidèle à sa manière. Il se concentre sur ses personnages et dédaigne la grande stratégie. Il n'y a donc pas de grande explication sur la situation politique de 1936 (quoique les dissensions entre anarchistes et communistes soient évoquées) ! L'auteur préfère nous dévoiler le vécu des simples combattants, avec leur équipement rudimentaire, la longue attente des batailles, et leurs réactions à vif devant la cruauté ou l'absurdité de certaines situations. Les combats eux-mêmes sont montrés d'une façon assez pudique, avec quelques belles images muettes, en évitant d'exagérer les effets.



Sinon, en dehors des combats, Matteo et Amélie se livrent à un plaisant marivaudage, mais il est vrai que la guerre est assez propice à ce genre d'instabilité sentimentale. Le récit avance par ailleurs assez peu, et en dehors de la prise d'un village qui était occupé par les fascistes, la situation des protagonistes n'a pas beaucoup évolué à la fin de l'album. Gibrat progresse en fait lentement et je me demande comment il va poursuivre cette histoire.

C'est un bel album, en tout cas, dont l'ambiance très justement décrite m'a remémoré certaines lectures, comme "Pour qui sonne le glas" (quoique Hemingway soit un peu plus romantique) ou comme "l'Espoir" (mais Malraux reste plus politique). Petit bémol à reconnaître, tout de même, le dessin de Gibrat m'a paru presque un peu trop joli par rapport à l'univers guerrier qu'il décrit, mais ... on ne va pas reprocher à un dessinateur de faire de belles images.  

Voilà ! Il faudra maintenant se montrer patient avant de connaître la suite, car il me semble  que Gibrat dessine de plus en plus lentement, mais Matteo reste une valeur sûre pour tous les amateurs de BD historique.

C'est donc un des beaux albums de cet automne.

Henri Filippini s'exprime à son tour sur ce nouvel épisode de Mattéo.


http://bdzoom.com/120889/bd-de-la-semaine/%c2%ab-matteo-t4-quatrieme-epoque-aout-septembre-1936-%c2%bb-par-jean-pierre-gibrat/

Jean-Pierre Gibrat s'exprime sur son nouvel album de Mattéo.


http://sequencebd.fr/matteo-jean-pierre-gibrat/

Une bonne demi-heure d'entretiens avec Gibrat pour évoquer son nouvel album de Mattéo et nous faire comprendre comment construire un style.

Une dédicace de toute beauté (au sens propre comme au figuré).

J'ai eu la chance de faire un stage de BD dirigé par Gibrat en 1983, à Loctudy. À l'époque, il travaillait sur "Goudard et la Parisienne". C'était déjà un stakhanoviste du détail juste, et un fabuleux coloriste. Et pourtant, bien loin encore de ce qu'il devait devenir plus tard ! Je suis son travail depuis ses premières publications dans Pilote vers 1974, et même ses Grandes Gueules dans Télé 7 jours où il avait pris la succession de Mulatier. J'ai lu les premières planches de Goudard, avec un trait très caricatural, vestige de ses débuts dans Télé 7 jours, dans l'hélas éphémère BD Hebdo vers 1977. Très vite son trait a évolué vers le trait réaliste que nous lui connaissons. Un trait d'une élégance rare. Il m'a beaucoup appris en une semaine, et je lui dois un peu de ce que je fais aujourd'hui. Même beaucoup. Mais bon sang, son talent me rend dingue de jalousie !!

A la manière d'André Juillard pour le cahier bleu :

J'aime bien ces clins d'oeil entre artistes...

"Le vol du corbeau".

Là, c'est justement un point de l'histoire où Gibrat n'a pas été assez scrupuleux (et c'est rare !). Le trajet qu'il fait faire au bateau (Paris-Montbouy apparemment, même si Montbouy n'est pas citée), il le fait faire en un jour et demi. Or il faut presque 4 jours pour le faire : Paris-St-Mammès : une journée, St-Mammès-Montargis : deux (petites) journées, Montargis-Montbouy : une petite journée. Un bateau tel que celui de l'histoire, ça va à 5 km/h en canal, et le canal n'est ouvert que de 6h30 à 19h30.
Cela n'affecte en rien l'admiration que je lui porte.

Médecins sans frontières / "Mission en Thaïlande" / Mise en couleur des planches 40 à 45.

Quel dommage que l'imprimeur se soit foutu du boulot de Gibrat et n'ait pas mieux soigné la correspondance des couleurs avec le train. je comprends que Gibrat soit passé à la couleur directe par la suite !
À part ça, c'était déjà du sacrément bon boulot !!

La couleur directe, ça lui réussit vraiment (comme à Bilal). Bon sang quel talent !!

Une dédicace tout à fait intéressante puisque qu'elle réunit deux personnages issus des séries de Gibrat : "Léa", la "bolchevik" de "Mattéo" (deuxième époque) tient dans ses mains un portait de "Cécile", semblable à la couverture de l'album du "Sursis", tome 2