Un complot se trame contre Napoléon III. Une de ses favorites qui devait l'empoisonner a reculé au dernier moment et les commanditaires du complot l'assassine. Et malheureusement pour les malfrats, une jeune bohémienne, vivant avec sa mère et son petit frère sur le chantier de l'exposition, possède un réel don de voyance qui lui permet d'identifier les tueurs. Ceux-ci prennent alors en otage l'épouse d'un lieutenant-colonel de l'armée, proche de l'empereur. Et les assassins menacent d'abattre la jeune femme si son mari ne tue pas Napoléon III....
Le scénario très enlevée de cette BD multiplie les rebondissements. La narration s'inspire des poupées russes. A chaque fois que le lecteur pense l'intrigue conclue et les coupables neutralisés, un rebondissement relance la cavalcade. Je reprocherai d'ailleurs au scénario la conclusion où l'imposture d'un des personnages semble un peu trop artificielle. Quelques petites touches d'humour ici et là détendent une atmosphère qui eut pu facilement devenir glauque.
Un autre intérêt du livre réside dans le contraste entre le Paris des pauvres et celui de l'Exposition Universelle. Derrière l'humour et l'aventure se cache une critique sociale. La même approche permet à l'auteur de dénoncer la Guerre de Crimée et le sort du Maghreb.
Des personnages riches en couleur et très typés peuplent la BD. Tous très différents, ils constituent une micro-société avec ses rouages et ses interactions.
L'histoire se veut aussi pédagogique car elle nous instruit plaisemment sur les années 1850, tant à travers le contexte historique (la fin de la conquête de l'Algérie) qu'à travers la vie quotidienne (les inventions exposées).
Côté graphisme, le trait caricatural de Willem reflète son parcours dans les studios produisant des dessins animés et ses vignettes fleurent bon Walt Disney.
Par ailleurs, le foisonnement des détails dans les décors et les costumes ainsi que des visages très expressifs donnent une grande crédibilité à ce Second Empire de papier.
On peut aussi souligner les couleurs solides de Tanja Cinna-Wenisch qui contribuent magnifiquement a l'ambiance.
Au final, nous avons une belle BD de divertissement :
EEE.
Eléanore