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Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste

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eleanore-clo

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vieux sage
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Aimée de Jongh est une dessinatrice néerlandaise née en 1988.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Fibd2010

Grâce à L’Obsolescence programmée de nos sentiments, sur un scénario de Zidrou, elle a accédé à la notoriété en 2018. Elle bénéficie même d'une page sur Wikipédia !

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Obsole12

Elle a depuis progressé  Very Happy et vient de sortir, Jours de sable, une œuvre qu'elle a scénarisée et dessinée.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Couv-j12

En 1937, John Clark, un jeune photographe américain est embauché par l'administration fédérale en charge d'aider les fermiers victimes de la Grande Dépression. Son travail sera de rendre compte de la souffrance des agriculteurs vivants dans le bassin de la poussière, un territoire situé dans les Grandes Plaines, à cheval sur les états du Kansas, de l'Oklahoma et du Texas. Ce bassin, le Dust Bowl, est touché par la sécheresse et une succession de tempêtes de sable. Le jeune homme peine d'abord à prendre connaissance avec des paysans hostiles à l'idée de devenir l'objet de ses photographies. Mais, petit-à-petit, John s'intègre dans la communauté, prend fait et cause pour ses habitants et fait même la connaissance de Betty, une jeune veuve...

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 1920px-Dust_Storm_Texas_1935

L'ancrage historique de l'intrigue est parfait et le livre est découpé en chapitre, chacune préfacée par une photographie des Dust Bowl. Une postface pose le contexte et fournit maintes informations complémentaires. L'auteure insiste sur la responsabilité écologique des fermiers dont la surexploitation des terres a contribué au désastre. Faut-il y avoir un cri d'alarme et un appel à notre responsabilité collective face aux défis du 21ème siècle ?

Mais De Jongh va bien plus loin. Elle nous montre la lente évolution du photographe. Il perd toute distanciation avec ces sujets au point même de se remettre en cause et de de ne plus supporté le travers voyeuriste et manipulateur de sa mission. Voilà donc une thématique très actuelle que l'on peut aisément projeter sur les médias actuels. Où s'arrête l'information objective et de qualité ? Où commence l'approximation et la mise en scène calculatrice ?

Le graphisme me plait beaucoup et j'ai essayé de résumer ce style dans le titre du fil. Les personnages semblent sortis de photographie et la dessinatrice réussit non seulement à les rendre beaux  (sans Photoshop  Smile  )  mais aussi et surtout à faire parler leur visage. Le caractère des héros de cette BD se lit sur leurs traits, dans leurs yeux. Une belle prouesse. Et les décors ne sont pas en reste, à New-York comme dans le Dust Bowl.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste PlancheS_74665 Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 185745471_10158944709972110_8783744966120762445_n.jpg?_nc_cat=101&ccb=1-3&_nc_sid=730e14&_nc_ohc=ts2vLfgDhGYAX-S1i2e&_nc_ht=scontent-cdt1-1
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En fait, cette BD constitue un magistral prologue aux Raisins de la colère de Steinbeck. De Jongh nous fait mieux comprendre le dilemme de ces fermiers, déchirés entre leur terre et la promesse d'un avenir meilleur en Californie.
L'auteure est un talent en devenir, une future grande pour citer Raymond, et nul doute qu'elle saura nous enchanter encore davantage dans ses prochaines créations.

EEE

Eléanore



Dernière édition par eleanore-clo le Mer 8 Sep - 23:30, édité 1 fois

Raymond

Raymond
Admin

Bonne idée de dédier un sujet à cette jeune et prometteuse dessinatrice !   pouce

Il faudra que je m'intéresse à son dernier album !   Idea


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eleanore-clo

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vieux sage
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Jours de sable fait la une du magazine dBD  Very Happy

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http://www.dbdmag.fr/dbdpresse/numeros/detail/413.html?fbclid=IwAR3meJRd3Lrcai5Mm4OTrsspgOlCfgwmWiijrU82tuutNtnKu53hd25i4UI

Eléanore

Raymond

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Admin

Il me semble que l'on avait parlé dans le forum de l'Obsolescence programmée de nos sentiments, ou est-ce que je me trompe ?


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eleanore-clo

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vieux sage
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Vous avez une belle mémoire Very Happy .
Nous avons échangé sur cette BD dans les messages 16 à 20 du fil relatif à Zidrou : https://lectraymond.forumactif.com/t2041-zidrou-scenariste-a-tout-faire?highlight=zidrou

Eléanore

Raymond

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Admin

Je me suis promené cet après-midi et j'y ai trouvé beaucoup de livres plus attirants. J'ai donc remis à plus tard l'achat de Jours de Sable. 


Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Couv-j11

Mais j'ai lu en rentrant la critique de Didier Quella-Guyot. Il faudra que je m'y intéresse.   Wink

Agriculture et grains de sable ! | BDZoom.com


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Raymond

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Admin

J'ai lu hier soir Jours de sable et ... c'est pas mal !

L'histoire se passe donc pendant les années 30 aux USA mais la thématique est assez actuelle, à savoir la disparition progressive des terres arables provoquée par l'agriculture intensive. Le personnage principal (un photographe) est mandaté par le gouvernement pour aller en Oklahoma et trouver des images exemplaires de ce processus de désertification. Il y rencontre la profonde humanité de ces agriculteurs chassés de leurs demeures par ces terribles vents de poussière, qui engloutissent tout sur le passage (comme le simoun des déserts tropicaux), et il se dégoûte peu à peu du rôle de spectateur qu'il doit tenir face à ce drame.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Vnets_10

Le bouquin est épais mais il se lit étonnamment très rapidement,un peu  comme un manga, car il y a peu d'images sur chaque planche. L'intrigue est par ailleurs facile à suivre ... et c'est peut-être même un peu trop facile. Peut-être que ce qui est vite lu ne s'imprime pas beaucoup dans le subconscient. Par ailleurs, ce jeune homme inexpérimenté qui se lance dans un grand reportage ne m'a pas trop ému. Le scénario manque un peu de malice.    deso

Le dessin est élégant et efficace mais un peu trop sage, à mon avis. J'aurais préféré qu'il soit plus dramatique, à l'image du terrible destin qui s'abat sur ces centaines de milliers de familles devant s'exiler pour fuire les nocifs vents de poussière. Ceci dit, le travail graphique d'Aimée de Jongh reste d'une belle qualité.

Je n'ai donc pas été transporté par cet album auquel il manque (à mon goût) un petit quelque chose d'original et de personnel. C'est surtout le sujet du récit qui est très singulier, et un agréable petit dossier est proposé à la fin de cette BD, pour préciser l'histoire de ces vents de poussière qui ont spontanémement disparu après une dizaine d'années, après de fortes pluies.

Je n'y mettrai donc pas la note maximale, mais c'est quand même un bon EEE.    jap


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eleanore-clo

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Bonjour

Carton plein pour Jours de sable. Après avoir été nominé au prix Ouest-France Quai des bulles, le voici maintenant sélectionné pour le prix des libraires de bande dessinée Canalbd

https://www.canalbd.net/glbd_plibre_33-10_Selection-2022

Éléanore

eleanore-clo

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vieux sage
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Taxi est une BD d'Aimée de Jongh

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Taxi-c10

Aimée de Jongh raconte quatre courses de taxi qu'elle a effectuées à Jakarta, Washington, Los Angeles et Paris.
Chacune permet non seulement de découvrir l'auteure et son histoire mais aussi et surtout les pays visités. Les conducteurs bavards, taiseux, bougons ou encore empathiques, finissent tous par se dévoiler et confier leur vie et leurs espoirs. Et au-delà des histoires personnelles, chaque acte de la BD permet d'aborder un pays et sa culture. Par exemple, concernant le trajet parisien, nous découvrons un chauffeur émigré d'origine maghrebine et qui essaye de vivre de son métier, le tout sur fond des attentats du Bataclan.
Aimée de Jongh, dont le père est indonésien et la mère néerlandaise, porte un regard complice et solidaire avec ses chauffeurs. Et la banale course se transforme en un manifeste politique sur l'émigration et le racisme ordinaire. Sans oublier la petite chanson sur la concurrence déloyale d'Uber.

Les dessins sont en noir et blanc et manquent peut être un peu de puissance et de détails. D'ailleurs l'autoportrait de l'auteure est bien peu ressemblant  lol! .

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Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3303_P6

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3303_P8

Au final, une histoire simple, engagée, humaniste, remplie de bons sentiments, sur fond de mondialisation.
EE

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Je n'ai pas vu passer cet album, mais j'imagine qu'il vient de sortir.

Le thème est en tout cas original ! pouce


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Raymond

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Admin

Aimée De Jongh a récemment été interviewée par Planète BD  !

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Photo_19

Cet entretien filmé se trouve sur cette page :

https://www.planetebd.com/interview/aimee-de-jongh/1387.html#image


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Raymond

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Je remets dans ce sujet l'excellente critique d'eleanore sur un ancien album d'Aimée de Jongh. Il y sera tout à fait à sa place :

eleanore-clo a écrit:L'obsolescence programmée de nos sentiments est scénarisée par Zidrou et dessinée par Aimée de Jongh.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Obsole11

Méditerranée, 61 ans, célibataire et sans enfant, vient de perdre sa mère. Ce drame la ramène à sa propre mortalité, et elle s’interroge sur sa vie. Ulysse, 59 ans, veuf, vient d’être licencié.  Et lui aussi s’interroge sur son parcours. Et bien évidemment, ces deux âmes en peine vont se rencontrer, et s’aimer.  
La fin, heureuse, est surprenante, invraisemblable, irréelle, ahurissante mais aussi tellement logique qu’elle en perd toute artificialité et sonne parfaitement juste. En fait, cette conclusion peut être perçue comme mielleuse ou suave, selon la sensibilité de la lectrice (du lecteur).

Clairement, L'obsolescence programmée de nos sentiments est un conte des temps modernes. Et Zidrou se positionne ici en Perrault du 21ème siècle. D’ailleurs, Blanche Neige est citée. Mais le recours au merveilleux est un prétexte cachant un manifeste sociétal. Non, les personnes âgées ne vivent pas dans une grisaille permanente, et oui, la société cadenasse ses anciens dans des cases stéréotypées et fausses. Déjà, le poète américain Samuel Ullman (1840-1924) déclarait : « Youth is not a time of life ; it is a state of mind; it is not a matter of rosy cheeks, red lips and supple knees; it is a matter of the will, a quality of the imagination, a vigor of the emotions. Nobody grows old merely by a number of years. We grow old by deserting our ideals ( La jeunesse n’est pas un moment de la vie ; c’est un état d’esprit ; ce n’est pas une histoire de joues roses, de lèvres rouges et de genoux souples ; c’est une affaire de volonté, de qualité de l’imagination, de vigueur des émotions. Personne ne devient vieux du fait de son âge. Nous vieillissons en abandonnant nos idéaux. ) ». Cette citation célèbre est d’ailleurs souvent attribuée au général MacArthur, grand amateur d’Ullman, et qui le citait fréquemment ! Et bien, Zidrou fait sien ce discours :  Ulysse et Méditerranée, au soir de leur vie, vont donc marcher sur les pas de Rodrigue et Chimène  Very Happy . Et si Faust recherchait la jeunesse éternelle, par peur de la vieillesse, Ulysse, lui, assume parfaitement son âge.

Le titre de la BD fait bien évidemment référence à l’obsolescence programmée des appareils électriques et électroniques, qui vise à réduire leur durée de vie et donc à favoriser leur renouvellement. Le message relève donc du manifeste. Notre vie sentimentale, notre aptitude à aimer sont-elles des biens de consommation, prématurément usés par le temps  Rolling Eyes  ? Bien évidemment, la fin de la BD prend le contrepied de cette idée et délivre un message d’espoir sur l’éternelle capacité des êtres vivants à se renouveler.

On retrouve aussi dans la BD le thème en vogue de la deuxième chance, si cher à Guillaume Musso. Aussi, un malicieux destin offre à Méditerranée et Ulysse l’opportunité de recommencer et de reconstruire leur vie.

Le scénariste aborde enfin d’autres thèmes sociétaux comme la réinsertion des délinquants (Bérangère), le chômage des travailleurs âgés (Ulysse), la prostitution économique (la mère de famille du 44 avenue Voltaire), etc.

Les textes de Zidrou sont poétiques et touchants, et je ne résiste pas au plaisir de vous donner deux citations : « Le corps se résigne plus vite que l’âme. Le temps le ride, l’injurie, l’humilie, le varice, le ménopause, l’essouffle, le caricature… Il fait avec, le corps, beau joueur. L’esprit, lui est mauvais perdant. Il met du temps à souffler le même nombre de bougies que le corps. Il ne conçoit que par à-coups… par révélations douloureuses… par effrois successifs… », « Ulysse, l’homme de ma vie. De ma fin de vie » .

Le style d'Aimée de Jongh se marie parfaitement au texte de Zidrou. Avec un culot admirable, à mille lieues d’un Manara, la  dessinatrice figure des corps normaux, oserais-je dire les nôtres…. D’ailleurs, la célébrissime publicité de Body Shop ne disait-elle pas : « There are 3 billion women who don't look like supermodels and only 8 who do (Il y trois milliards de femmes qui ne ressemblent pas à des mannequins et seulement huit qui en sont) » ? Et je suis persuadée que le monde quelque peu masculin de la BD devrait s’inspirer de ce slogan…

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Obsole11

D’une façon générale, la gestuelle des corps est magnifiquement restituée. Et chaque attitude reflète parfaitement les pensées. Quant au physique massif d’Ulysse, il se marie merveilleusement ( Very Happy ) avec le corps évanescent de Méditerranée.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Obsole12 Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Obsole14

Les couleurs sont douces, paisibles.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Obsole13

J’ai beaucoup hésité à écrire un petit mot sur cette BD, sortie d’ailleurs fort discrètement. Néanmoins, ce superbe conte mérite qu’on parle de lui. Ulysse et la Méditerranée doivent-ils être réservés au seul Homère ( Laughing ) ? Et puis, dans un tout autre genre, Harold et Maude (https://fr.wikipedia.org/wiki/Harold_et_Maude), a bien su trouver son public… D’ailleurs, Méditerranée, Maude, avez-vous remarqué que les deux prénoms commencent par M ?  Smile
Et si la conclusion imaginée par Zidrou peut dérouter, les superbes vignettes d'Aimée de Jongh méritent le détour. La jeune dessinatrice néerlandaise est assurément un talent à suivre.

Peut-être que d’autres habitué(e)s du forum ont lu la BD ? Je suis curieuse de connaitre leur avis…

Bien cordialement
Eléanore


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Raymond

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Admin

Aimée de Jongh vient de remporter un prix en Hollande pour son livre Jour de Sable.


Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3c1cad10

Il s'agit du prix Stripschap et c'et la récompense la plus prestigieuse dans ce pays :

Aimée de Jongh remporte le prix Stripschap en Hollande - ActuaBD


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eleanore-clo

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Soixante printemps en hiver est une BD scénarisée par Chabbert et dessinée par De Jongh.

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Couv_447913

Le jour de son 60e anniversaire, Josy décide de quitter son époux, ses enfants et petits-enfants. Elle part avec un vieux van et entreprend un chemin vers la liberté. Cette voie va lui permettre de découvrir d'autres femmes, toutes ayant rompu avec leurs époux : Camélia et aussi et surtout Christine dont elle devient l'amante. Mais la famille de Josy, d'abord éberluée, puis choquée, essaie de ramener la sexagénaire à la raison. Au final, le destin réservera un troisième chemin à notre héroïne....

Voilà une BD (très)² intelligente qui nous fait réfléchir sur la maturité, sur ce que nous attendons de la vie, sur la marginalité,...
Le premier thème est bien évidemment celui de l'individualisme. Dans notre monde moderne, l'ego est roi. Et le choix de Josy reflète le désir effréné du soi. Josy a aimé son époux mais ne supporte plus l'absence de passion. La tendresse du cocon familiale ne satisfait pas son besoin d'un petit grain de folie, si nécessaire à la vie. Les attentes de ses enfants et de ses petits enfants, le bonheur tranquille de les voir grandir, s'effacent devant un besoin irrépressible de liberté et de transgression sociétale. Quel est le but de la sexagénaire ? On ne le sait pas. Quelle aurait été la vie avec Christine ? Chacun verra midi à sa porte ? Est-ce que la pression sociétale l'aurait détruite ou, au contraire, l'aurait tolérée voire même favorisée ? On peut d'ailleurs avoir un autre regard. Josy a conquis chèrement sa liberté et n'aurait pas accepter d'y renoncer aussi vite. Après, chaque chose a un prix et le destin cruel ne fait que refléter cette nécessité. Eve a quitté le paradis et a payé fort cher son indépendance. Il en sera de même pour notre héroïne.

Le deuxième thème est le féminisme. Les deux autrices ont créé une BD de femmes où les hommes sont bien absents et où leur seul représentant, l'époux de Josy, apparaît bien creux. Dans cette famille qui se déchire, le combat pour le retour au paraître et à la "normalité" est menée par la fille de l'héroïne. Stéphanie va ainsi tout essayer : la culpabilisation, la réprobation, le harcèlement téléphonique, etc. Mais Josy est une maîtresse femme au caractère trempé et obstiné... L'éditeur met l'accent sur la bisexualité de l'héroïne. Dans notre monde occidental où l'ouverture à d'autres sexualités est devenu un lieu de militantisme, je pense que ce racolage n'a pas lieu d'être car le vrai sujet de la BD est ailleurs, dans la recherche de nouveaux horizons, et de liberté.

La tolérance est aussi au cœur de cette BD et face à l’incompréhension de la société, le Club des Vilaines Libérées et les petits enfants de la sexagénaire portent un message de mansuétude et d'ouverture d'esprit. Ce point peut choquer car Chabbert survalorise la marginalité.

Le titre est très beau. Situé dans la continuité de L’obsolescence programmée de nos sentiments, il instaure un jeu de mot. Rosy, entrée dans l'hiver de sa vie, essaie de renaître et la sève de sa relation amoureuse avec Catherine symbolise le printemps. Aimée de Jongh choisit ses scénarios avec beaucoup de constance et le choix d'une personne âgée comme héroïne rappelle bien évidemment la BD sus-cité, écrite par Zidrou.

Le dessin réaliste d'Aimée de Jongh se marie fort bien avec l'intrigue. Et les successions de planches, sans aucun dialogue, installent une atmosphère particulière. Le choix de placer l'intrigue en hiver, avec le repli forcé sur un lieu intérieur pour se protéger du froid, crée un espace unique, propice au recueillement et à la réflexion. Toutes ces scènes m'ont rappelé la maison des parents d'Homer dans Saïgon - Hanoï de Cosey, ou encore la caravane dans Angel Rock (Caroline Baldwin 6).
Le style de la dessinatrice évolue quelque peu. Il est ici plus évanescent, moins ancré dans le réel. Et après-tout, n'est pas la meilleure manière de restituer la vie de Josy qui, a, en quelque sorte, quitté le monde ?

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3473_p10 Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3473_p11 Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3473_p12 Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3473_p13 Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste 3473_p14

J'ai apprécié cette BD qui,cependant, ne manque pas d'interroger.
EEE ou EEEE ? Je ne sais pas. Clairement, la personnalité de Rosy, son ambiguïté, sa réalité, sont clivantes et jettent une ombre sur cette BD. La sexagénaire est-elle une héroïne militante ou encore une victime qui se dresse courageusement face à la dictature du quotidien ? Au contraire, faut-il percevoir une anti-héroïne narcissique et égoïste ? Face à ce grand écart, et en un mot, le personnage de Chabbert est-il crédible ? L'intérêt qu'un lecteur peut porter ou non à la BD dépend beaucoup de s vision de Josy. A titre personnel, je n'y crois pas Shocked , d'où le EEE. Quoiqu'il en soit, la bande dessinée est originale, captivante, habile et bellement dessinée, d'où le EEEE ! En tout cas, nul doute que Soixante printemps en hiver va profondément marquer les esprits et je parie que la critique va s'y intéresser Very Happy . Elle démontre en tout cas la brillance d'Aimée de Jongh, une autrice jeune, brillante et prodigue. Nul doute que d'autres chefs d’œuvres surgiront de son talent.

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Merci de cette présentation, eleanore ! Je pense que je vais m'y intéresser  Very Happy


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eleanore-clo

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vieux sage
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Bonne lecture !
Nous pourrons échanger sur la BD Very Happy
J'ai depuis repensé à la BD et y ai vu un rapprochement avec la vie de la scénariste. Ingrid Chabbert ne cache pas son homosexualité et a d'ailleurs écrit plusieurs ouvrages traitant du sujet de l'homoparentalité. Du coup, on peut penser qu'elle a mis beaucoup d'elle-même dans le personnage de Josy. Et que l'incompréhension de la famille de la sexagénaire, voire son agressivité, sont des épreuves que l'autrice a elle même traversées.

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Gilles Ratier a bien apprécié Soixante Printemps en hiver et il commente en détail cet album sur BDZoom !

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste De-jon10

Sinon, j'ai lu moi aussi cet album pendant le week-end et je suis pour ma part ... bien plus réservé.  deso  Il faut avouer que ce que je n'ai pas aimé du tout, c'est avant tout le thème du récit. L'histoire de la grand-mère qui quitte sa famille sur un coup de tête, cela ne m'amuse pas du tout, tout comme je n'aime pas d'ailleurs les vieux messieurs qui quittent leur famille pour aller vivre une jeunette. Les deux comportements reflètent un peu la même chose, à savoir une revendication de l'égoïsme. C'est hélas une attitude très moderne et à la mode, et elle ne me plait pas.

Je me suis donc ennuyé à lire cette histoire, même s'il faut reconnaître que l'album est bien construit. Ingrid Chabert est une vraie scénariste et elle imagine des situations tout à fait réalistes qui apportent des rebondissements au récit. Les dialogues sont plutôt bien ciselés mais tout cela est mis (à mon avis) au service d'une mauvaise cause.

Le dessin d'Aimée de Jongh est par ailleurs parfait pour ce récit intimiste, avec une succession d'images la fois sage et expressive. Les couleurs sont appliquées d'une façon délicate et elles me paraissent pleines de goût. Certaines pages sont ainsi très séduisantes pour l'oeil !

Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste De-jon11

Mais voilà, quand on n'aime pas une histoire, la somme de toutes ces qualités est égale à zéro. Je suis désolé de cette conclusion mais c'est finalement un livre dont j'ai regretté l'achat.

Pour vous consoler, je vous propose d elire les commentaires de Gilles Ratier qui vous plairont certainement mieux que mes commentaires.    Wink

« Soixante Printemps en hiver » : encore un indispensable Aire libre ! | BDZoom.com


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eleanore-clo

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Bonjour Raymond

Tout d'abord, je vous remercie pour avoir lu ce livre sur lequel je suis dubitative. D'ailleurs, si j'ai noté EEE et pas EEEE, c'est que j'hésite, beaucoup, encore et toujours. Non sur la qualité de la BD qui est certaine mais plutôt sur le manifeste qu'elle véhicule.

Votre opinion rejoint mon premier avis. Josy est égoïste et son départ correspond au caprice d'un enfant gâté par la vie (petits enfants, union longue, etc.). C'est pourquoi j'identifie l'individualisme comme premier thème. Après, ma position s'est enrichie. Finalement, tous les membres de la famille ne sont-ils pas individualistes ? Le mari de Josy qui ne s’intéresse qu'à son jardin ? Sa fille Stéphanie qui ne s’intéresse qu'à son apparence sociale ? Et lorsque Josy s'occupe de ses voisins, elle n'est pas autolâtre. Partant de là, outre l'individualisme et le féminisme, le troisième thème ne serait-il pas celui de la normalité ? La société définit des normes. La grand-mère doit s’occuper des ses petits enfants et vieillir doucement à côté d'un époux qu’elle n'aime plus. La tendresse est le devenir de l'amour. Etc. Le choix de Josy est de dire qu'il n'y a pas de norme et que toutes les voies sont moralement acceptables.

Qu'en pensez-vous ?

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Les deux enfants de Josy sont en effet égoïstes car ils ne se préoccupent pas du tout du bien de leur mère. Ils veulent plutôt sauver l'image (ou la normalité) de leur famille et c'est bien souvent ainsi que réagissent les adultes lorsque les parents se séparent. Curieusement, les jeunes enfants (qui pourraient davantage souffrir du divorce) s'adaptent souvent mieux à une séparation que les adultes et le scénario du livre correspond ainsi assez bien à la réalité.

Quant au mari, il m'est difficile de dire s'il est égoïste. On ne le voit pas assez souvent pour le savoir. J'ai plutôt l'impression qu'il est tolérant et que son épouse le quitte à nouveau dès qu'il manifeste une crise de colère (dont la cause est étrangère aux relations de couple). Mais ce n'est qu'une impression personnelle.

Il est possible que Josy ait été plus généreuse que les autres membres de sa famille pendant toute son existence, mais pourquoi alors change t-elle d'attitude ? Logiquement, il devrait y avoir une cause mais la scénariste n'en donne aucune. La mère de famille fait tout à coup le choix de partir sans raison apparente ! On pourrait imaginer diverses justifications à une telle attitude égoïste mais la scénariste n'en trouve aucune et ... c'est cela qui m'irrite !   Wink


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eleanore-clo

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vieux sage

Concernant le départ final de Rosy, il est lié à un chat. Ce chat contre lequel le mari de Josy rouspète (légitimement ?) lui rappelle le chat de la caravane et donc cette autre famille. Car sur le fond, nous avons bien deux familles différentes. Celle de Josy, son mari et Stéphanie (je passe sous silence les autres membres de la famille car nous assistons ici à un plongeon dans le passé) et celle de Josy, de Camélia et de son bébé. Et donc Josy compare les deux familles et fait un choix… C'est un moment très dur et incompréhensible car l'héroïne met sur le même plan la famille qu'elle a créée dans sa jeunesse et qui a (naturellement) vieilli et cette famille de bric et de broc, sur le parking municipal.

Après, on peut aborder d'autres sujets dans la BD. J'ai beaucoup apprécié le choix de la saison, l'hiver, qui instaure un parallèle entre la vie de Josy (la vieillesse approche) et la nature autour d'elle. Aimée de Jongh enfonce le clou en situant les ultimes pages au Printemps. Printemps chez Josy, printemps dans le jardin du mari de Josy.

J'ai aussi beaucoup apprécié le courage de dessiner des corps usés. Dessiner une femme âgée nue est un superbe pied de nez à ces clichés de modes et surtout aux fantasmes de beaucoup qui imposent à la femme d'avoir un corps éternellement jeune et lui refusent ce qu'ils acceptent (bon gré mal gré) pour eux même. On retrouve là toute la finesse de L'obsolescence programmée des sentiments où Méditerranée, ancien mannequin et modèle, se retrouve face au miroir et finit par s'y aimer.

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Cette BD a en tout cas l'intérêt de stimuler la discussion. Il est souvent intéressant de discuter pourquoi on n'aime pas une histoire.

Ceci me fait penser à Fun Home, un roman graphique américain publié il y a une quinzaine d'années par Allison Bechdel. Je l'ai absolument détesté, tout en reconnaissant le sérieux et l'intérêt du propos. J'ai par la suite adoré en parler avec quelques amis qui avaient apprécié ce livre.

A l'époque, j'avais ouvert un sujet sur cette BD mais j'ai assez vite arrêté d'en parler car je n'avais pas envie de faire un long monologue sur une BD que je n'aimais pas!

Fun Home - Fun Home d'Alison Bechdel (forumactif.com)

Soixante ans de printemps en hiver nous interpelle également au sujet de nos principes et de nos valeurs. Le récit possède par ailleurs une sensibilité féministe qui n'est pas du tout la mienne et j'ai le sentiment que les hommes y sont simplement rejetés. Cette attitude est très à la mode et cela m'énerve bien sûr de la retrouver dans une BD. Le "Club des Vilaines Libérées" est au fond une belle idée et il y a là-dedans un côté sympathique, mais cela ne suffit pas à sauver le livre !


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Et toujours ... Aimée de Jongh un dessin beau, sage et humaniste Charli10
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eleanore-clo

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vieux sage
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Oui. Je partage cette  vision. Les hommes sont ici présentés plutôt négativement. L'époux de Josy apparait mou et laisse sa fille Stéphanie faire le "sale boulot", à savoir culpabiliser sa maman. Et la municipalité (le maire ? ) est insensible et dure face à la détresse de Camélia. Et oui, le club des Vilaines Libérées" semble mépriser les hommes devenus les boucs émissaires des problèmes de couple, alors que la réalité est très souvent plus complexe . On peut donc effectivement caractériser la BD de misandre. Après, et vu que Chabbert affiche ouvertement son homosexualité, aller dans cette direction me semble relever d'un cliché... Après, vu le nombre impressionnant de BDs où les femmes sont moins que rien, je peux intellectuellement comprendre une démarche revancharde. De plus, les dessins au pastel d'Aimée de Jongh adoucissent considérablement la tonalité.

Pour trancher définitivement sur Josy, il eut fallu qu'elle vive avec Christine pour que l'on sache si elle est capable d'aimer et de donner.

Avez-vous remarqué que Josy a les cheveux courts ? Ce choix fait par de nombreuses sexagénaires simplifie le rituel quotidien de l'entretien d'une belle chevelure (je porte les cheveux longs et peut témoigner du temps nécessaire à leur beauté !). D'un autre côté, Josy apparaît plus masculine. En fait Chabbert et peut être De Jongh ont mis beaucoup d'elles même dans ce personnage.

Le recours au van Volswagen mérite aussi réflexion. J'y trouve un parfum de Woodstock et des hippies. Et donc de liberté.

Éléanore

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
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Je viens de relire Quartier Lointain de Taniguchi et le père du héros s'y comporte exactement comme Rosy ! Apparemment heureux, il décide d'abandonner les siens et son entreprise pour tout recommencer, pour essayer de construire une toute autre vie. Et on peut faire un rapprochement similaire entre Stéphanie et le héros japonais. Tous les deux sont blessés par la fin de leur monde et ils vont tout essayer pour sauver les couples de leurs parents.
Chabbert se serait-elle inconsciemment inspirée du grand mangaka ?

Eléanore

Raymond

Raymond
Admin

Il me semble que Quartier lointain est quand même une histoire très différente.

il est vrai que le personnage principal fait une petite "escapade", mais il n'a pas l'intention de quitter sa famille. Il veut retrouver les lieux de son enfance, puis il est transporté dans le passé à cause d'un phénomène surnaturel, ce qui lui permet de revivre certains moments de sa jeunesse. Et à la fin, lorsqu'il se retrouve projeté dans le présent, il retourne tout naturellement vers sa famille. Il ne rejette pas sa femme et ses enfants, mais il a soudainement besoin de revoir les lieux de son enfance. C'et quand même très différent.


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vieux sage
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Bonjour Raymond
Vous confondez le héros et le père du héros. Le père du héros fait exactement le même choix que Rosy. Et ke héros lui-même allait refaire sa vie avec une autre femme mais son incarnation dans son corps d'adolescent et le fait de revivre cette période et surtout le drame du départ de son père le fait changer d'avis.
Eléanore

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