Tantôt hors norme et tantôt mainstream, la série Lapinot se poursuit envers et contre tout depuis presque 30 ans. Elle m'apparait de plus en plus comme étant la grande série de Lewis Trondheim, car elle compte maintenant une vingtaine de volumes. L'auteur nous offre maintenant le 5ème tome des nouvelles aventures du héros, et ce nouvel opus s'intitule
L'apocalypse joyeuse.
Jusqu'à ce jour, cette résurrection du bondissant lapin m'avait laissé un peu mitigé. Les "nouvelles aventures" ne semblaient pas en effet avoir le même niveau d'intérêt que les anciennes mais ... avec "
l'Apocalypse joyeuse", j'ai eu le plaisir de retrouver une sorte d'élan de jeunesse, et une fraîcheur d'inspiration qui fait revivre la série. Lewis Trondheim semble en fait avoir retrouvé sa motivation et ce nouvel album m'a redonné le plaisir naïf des années 90, lorsque je lisais des BD comme "Slaloms" ou "Pitchenettes".
La première force de Lewis Trondheim, c'est certainement son imagination et ses scénarios. L'auteur réussit comme personne à nous faire aimer des personnages ordinaires, qui font face à des événements plus ou moins improbables. Et l'incident improbable à l'origine de cette aventure est simplement la chute d'une météorite, qui vient détruire la voiture de Richard, le meilleur ami de Lapinot (hélas pour lui).
Les météorites ont une certaine valeur pécuniaire et Richard (qui s'est auto-déclaré propriétaire du céleste caillou) doit tout-à-coup faire face à une avalanche de réclamations avides et de prétentions infondées. il en résulte de savoureuses disputes, de nombreuses scènes de poursuite et diverses péripéties que j'éviterai soigneusement de raconter. Je me contenterai donc d'ajouter que le récit est vif, souvent riche en gags, et que la lecture de cette œuvre se fait agréablement au premier degré, pour le simple plaisir de lire une BD. Il n'y a pas d'explication pénible, pas de casse-têtes ni de recherche de significations cachées, et c'est parfois bien agréable.
Et puis, on retrouve un autre ingrédient qui est typique des histoires de Lapinot, à savoir ces dialogues vifs et incisifs (et parfois vachards) entre les principaux personnages de la série. Leurs discussions sont très proches du monde d'aujourd'hui et elles possèdent une séduisante aura de vérité. Le monde de Lapinot y apparait assez "franchouillard", au fond, et surtout très inspiré du quotidien. Les aventures deviennent ainsi très crédibles et ce mélange de fantaisie et de réalisme abrupt me rappelle un peu la recette magique des anciens classiques franco-belges, comme par exemple Gil Jourdan.
L'apocalypse joyeuse est donc un excellent Lapinot, qui nous permet de retrouver un Lewis Trondheim en pleine forme. Ce n'est pas l'album de l'année, bien sûr, mais simplement une bonne BD que l'on peut aborder sans fausse honte, pour le simple plaisir de lire et de se cultiver.
C'est déjà pas si mal !