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eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Peut être suis-je une monetiste ? Laughing
Bonne lecture Very Happy

177je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Lun 11 Fév - 23:06

Draculea

Draculea
vieux sage
vieux sage

Je comprends votre préférence envers Gramercy Park chère eléonore-clo ! J'avoue avoir aussi un grand faible pour ce roman graphique à mn avis bien supérieur à Villevermine auquel vous ne rendez pas moins justice avec élégance.

http://www.marchenriarfeux.net

178je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mer 20 Fév - 17:58

Raymond

Raymond
Admin

Je suis allé jusqu'au bout de mon envie et j'ai acheté les Nymphéas noirs !   Very Happy

J'ai bien sûr lu cet album et je comprends un peu mieux maintenant certaines remarques d'eleanore-clo.

Ce qu'il faut souligner, avant tout, c'est qu'il y avait au départ un formidable roman policier écrit par Michel Bussi, qui a obtenu un succès tout à fait mérité il y a une quinzaine d'années. Ne l'ayant pas lu à l'époque, et découvrant naïvement l'intrigue grâce à la BD, j'ai bien sûr été séduit par ce polar qui, il faut bien le dire, est un peu retors. Bussi lance en effet très malicieusement son lecteur sur une fausse piste … avant de lui révéler (à la fin de l'histoire) jusqu'à quel point il s'est trompé. J'ai aussitôt relu l'album pour mieux comprendre certains détails ... et j'ai alors découvert d'astucieuses phrases à double sens, très trompeuses pour le néophyte et malgré tout pleines de pertinence quand on comprend finalement toute l'intrigue. C'est vraiment un beau travail d'écrivain, qui peut être lu de deux manières.

Rien que pour cette raison, les Nymphéas noirs se lisent donc avec beaucoup de plaisir. Et puis, comme il s'agit d'une BD, vous savez déjà d'une manière générale  que "quand le scénario est bon, tout est bon" ... ou presque. Quand il y a un vrai plaisir de lecture, on ne fait pas trop le difficile.

Mais si on s'intéresse de plus près au dessin, ensuite l'enthousiasme est plus mesuré. Certes, Didier Cassegrain fait bien son travail. C'est très professionnel et on découvre surtout de beaux effets de couleur, avec une dominance de teintes bleutées ou violacées qui évoque un peu les "Nymphéas" de Monet (de loin). Mais le style du dessin est sinon assez standard, et il n'atteint pas la dimension artistique que certains auraient pu imaginer (et que de nombreux lecteurs du roman ont probablement imaginé en n'ayant que le texte) dans cette enquête qui se déroule à Giverny, le célèbre lieu de vie de Claude Monet. Ce n'est pas trop grave, à mon avis, mais ce petit manque représente quand même toute la différence qui peut exister entre un "boulot correct" et un vrai chef d'œuvre. Cassegrain n'a pas démérité, répétons-le, mais le charme nait avant tout du récit qui est déroutant et très évocateur de l'univers impressionniste.

Globalement, c'est quand même une excellente BD, qui entraîne le lecteur dans un univers équivoque, pour le plus grand plaisir de ce dernier. Et puis, c'est une œuvre qui donne aussi des envies de relecture … tout aussi plaisante d'ailleurs que la découverte originale.

Et voilà ! Toutes ces remarques décrivent finalement un des tout bons albums de ce début d'année 2019, que les amateurs de "bonne BD classique" ne devraient pas manquer !  

Et donc, je vous le recommande. pouce


_________________
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179je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mer 20 Fév - 18:08

2J

2J
membre de l'académie
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je viens de - Je viens de lire - Page 8 10307810
et pour le dessinateur que je connais bien mal ...
https://www.bedetheque.com/auteur-6897-BD-Cassegrain-Didier.html

180je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mar 5 Mar - 0:04

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonsoir Raymond

Raymond a écrit:Un album de BD est consacré à Milady, la redoutable adversaire féminine de d'Artagnan dans les Trois Mousquetaires.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Milady10

Le thème (Milady est la véritable héroïne du roman) est intéressant mais ... est-ce que cela fait vraiment une bonne BD ?


J'ai lu Milady pour essayer de répondre à votre question Very Happy

Et ma réponse sera grise, comme les vignettes de cette œuvre, où la couleur est absente Smile. Je suis très partagée. La BD n'est ni bonne ni mauvaise, et chacun peut se lancer dans l’aventure, sans être certain ne pas y récolter un mauvais coup d'épée !

L'intrigue s'inspire librement des Trois mousquetaires. Librement car la tonalité, le caractère des personnages et la conclusion de l'intrigue diffèrent. D'ailleurs et pour une raison mystérieuse, le scénariste s'est senti obligé de justifier ses écarts sur le site www.ligneclaire.info. Il y explique ainsi que le roman original fut écrit à quatre mains, celles d'Alexandre Dumas bien évidemment, mais aussi celles d'Auguste Maquet, et que lui, Sylvain Venayre, n'a fait que retirer l'apport du second...

La tonalité n'est clairement pas celle d'un roman de cape et d'épée. Nous sommes plutôt confrontés à un roman de mœurs voire d'espionnage. Roman de mœurs car la BD va au-delà de l'image proprette du livre source. C'est un roman historique spaghetti ! Les bonnes âmes et les motivations nobles et glorieuses n'existent pas. Ce n'est pas un pour tous, tous pour un, mais plutôt chacun pour soi, et advienne que pourra. Milady est aussi un roman d'espionnage et nous suivons la carrière de cette ancêtre de James Bond, confrontée d'ailleurs comme lui aux contingences du service et manquant parfois des moyens nécessaires à la réalisation de ses missions. L'intrigue est complexe émaillée de multiples rebondissements.

les personnages ne sont jamais ce qu'ils semblent être. Beaucoup jouent un jeu équivoque. Et je confie m'être parfois perdue dans les tenants et aboutissants. Ainsi le lien entre les viols de Milady et l'intrigue politico-diplomatique a demandé une deuxième lecture. On pourrait aussi dire que Milady est le négatif des Trois mousquetaires. D'Artagnan y est dépeint comme un spadassin, manipulateur et sans scrupule. La cruauté d'Athos nous est livrée sans aucun filtre. A contrario, la comtesse de La Fère apparait plutôt comme une victime, dans un monde d'hommes où les femmes usent de leur charme pour survivre et grappiller quelques miettes du pouvoir. On peut effectivement y voir un regard féministe, quoique aucune des héroïnes du livre ne soit pas non plus un parangon de vertu. Notons que certains personnages clés de Dumas, comme Aramis, Porthos, ou encore M.de Tréville, font office de figurants.

Milady se termine à peu près au chapitre 58 des Trois Mousquetaires : Milady, telle une sirène, charme Fulton, son geôlier, pour s'échapper du château des Winter. Que fera-t-elle après ? Ira-t-elle tuer Constance Bonacieux ? On ne le sait pas. Et ce serait d'abord illogique au vu de l'intrigue.

Le dessin de Frédéric Bihel est à l'unisson du scénario. Il ne s'agit pas de peindre un univers fastueux, mais plutôt un monde âpre et sale, exact reflet du caractère des personnages ! Les châteaux baignent dans des douves malsaines. Et Milady n'est pas une très belle femme (SOS Jean-Pierre Gibrat  Laughing ) ! Nous n'aurons donc pas droit au Bal des Échevins.  Crying or Very sad

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A32   je viens de - Je viens de lire - Page 8 A33

Le recours à la technique du lavis, donne une image quelque peu artificielle d'ancienneté. L'âge d'or de la photographie en noir et blanc est bien trop éloigné du 17ème siècle.

Voilà, voili, voilou.
Bonne soirée
Eléanore

181je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mar 5 Mar - 3:26

2J

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je viens de - Je viens de lire - Page 8 Verso402
je viens de - Je viens de lire - Page 8 Tzolz170

182je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mar 5 Mar - 13:31

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
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Bonjour Raymond

Raymond a écrit:Faut-il croire certaines critiques élogieuses, comme par exemple celle de Didier Queila-Guyot au sujet de Ada, un nouvel album de Barbara Baldi ?

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Ada-co10

Il est vrai que le style graphique est plein d'élégance. Mais la lecture est-elle intéressante ?

J'ai lu la BD et elle m'a séduite.

L'histoire se passe en Autriche, durant la première guerre mondiale. Ada est une jeune femme. Elle vit avec son père dans la ferme familiale. Le père est un rustre. Il abrutit sa fille de travail et la prive de toute compagnie, inquiet à l'idée qu'elle fuit l'exploitation, comme l'a fait sa mère avant elle. Néanmoins, Ada se révèle une maitresse-peintre, une autodidacte brillante et sensible. Elle va ainsi faire la connaissance d'Egon Schiele et de Gustav Klimt. Son père refuse cette ouverture et va même, par jalousie ou vengeance, tuer la seule compagne d'Ada, une petite chienne....

Le scénario est très épuré et des pages entières se succèdent sans le moindre dialogue. Le monde rural y est âpre. Barbara Baldi lorgne du côté de Zola et se garde bien de fréquenter Rousseau. On pense parfois à Silence de Comès. L'absence de texte  n'est absolument pas gênante et permet au lecteur de se concentrer sur l'essentiel, sur le drame familial, sur ce Mozart qu'un père tente d'assassiner.

Le principal intérêt de l'ouvrage réside dans le dessin. Est-ce d'ailleurs une BD ou un livre d'illustrations, oserais-je même dire un livre d'art ? Les vignettes se succèdent toutes aussi somptueuses les unes que les autres. Baldi nous livre une magnifique succession d'aquarelles, jugez-en par vous même :

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A34 je viens de - Je viens de lire - Page 8 A35 je viens de - Je viens de lire - Page 8 A37

Le contraste entre le visage angélique d'Ada et celui diabolisé du père est impressionnant. Et le portrait du paysan rappelle quelque peu le style de Bill Sienkiewicz.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A36

Ada est la BD RTL de février : https://www.rtl.fr/culture/arts-spectacles/ada-de-barbara-baldi-est-la-bd-rtl-de-fevrier-2019-7797060745. Ce n'est pas un hasard  Very Happy .

Bonne lecture ? Smile

Cordialement
Eléanore

183je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mar 5 Mar - 13:36

Raymond

Raymond
Admin

Oui, je chercherai cet album samedi prochain ! Wink


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184je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mer 6 Mar - 9:55

Draculea

Draculea
vieux sage
vieux sage

Cela semble en effet très prometteur ! Encore une belle découverte en perspective ! Je snes que nous serons deux samedi prochain à acquérir cet album ! Very Happy

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185je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mer 6 Mar - 18:24

Raymond

Raymond
Admin

eleanore-clo a écrit:Bonsoir Raymond

Raymond a écrit:Un album de BD est consacré à Milady, la redoutable adversaire féminine de d'Artagnan dans les Trois Mousquetaires.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Milady10

Le thème (Milady est la véritable héroïne du roman) est intéressant mais ... est-ce que cela fait vraiment une bonne BD ?


J'ai lu Milady pour essayer de répondre à votre question Very Happy

Et ma réponse sera grise, comme les vignettes de cette œuvre, où la couleur est absente Smile. Je suis très partagée. La BD n'est ni bonne ni mauvaise, et chacun peut se lancer dans l’aventure, sans être certain ne pas y récolter un mauvais coup d'épée !

L'intrigue s'inspire librement des Trois mousquetaires. Librement car la tonalité, le caractère des personnages et la conclusion de l'intrigue diffèrent. D'ailleurs et pour une raison mystérieuse, le scénariste s'est senti obligé de justifier ses écarts sur le site www.ligneclaire.info. Il y explique ainsi que le roman original fut écrit à quatre mains, celles d'Alexandre Dumas bien évidemment, mais aussi celles d'Auguste Maquet, et que lui, Sylvain Venayre, n'a fait que retirer l'apport du second...

La tonalité n'est clairement pas celle d'un roman de cape et d'épée. Nous sommes plutôt confrontés à un roman de mœurs voire d'espionnage. Roman de mœurs car la BD va au-delà de l'image proprette du livre source. C'est un roman historique spaghetti ! Les bonnes âmes et les motivations nobles et glorieuses n'existent pas. Ce n'est pas un pour tous, tous pour un, mais plutôt chacun pour soi, et advienne que pourra. Milady est aussi un roman d'espionnage et nous suivons la carrière de cette ancêtre de James Bond, confrontée d'ailleurs comme lui aux contingences du service et manquant parfois des moyens nécessaires à la réalisation de ses missions. L'intrigue est complexe émaillée de multiples rebondissements.

les personnages ne sont jamais ce qu'ils semblent être. Beaucoup jouent un jeu équivoque. Et je confie m'être parfois perdue dans les tenants et aboutissants. Ainsi le lien entre les viols de Milady et l'intrigue politico-diplomatique a demandé une deuxième lecture. On pourrait aussi dire que Milady est le négatif des Trois mousquetaires. D'Artagnan y est dépeint comme un spadassin, manipulateur et sans scrupule. La cruauté d'Athos nous est livrée sans aucun filtre. A contrario, la comtesse de La Fère apparait plutôt comme une victime, dans un monde d'hommes où les femmes usent de leur charme pour survivre et grappiller quelques miettes du pouvoir. On peut effectivement y voir un regard féministe, quoique aucune des héroïnes du livre ne soit pas non plus un parangon de vertu. Notons que certains personnages clés de Dumas, comme Aramis, Porthos, ou encore M.de Tréville, font office de figurants.

Milady se termine à peu près au chapitre 58 des Trois Mousquetaires : Milady, telle une sirène, charme Fulton, son geôlier, pour s'échapper du château des Winter. Que fera-t-elle après ? Ira-t-elle tuer Constance Bonacieux ? On ne le sait pas. Et ce serait d'abord illogique au vu de l'intrigue.

Le dessin de Frédéric Bihel est à l'unisson du scénario. Il ne s'agit pas de peindre un univers fastueux, mais plutôt un monde âpre et sale, exact reflet du caractère des personnages ! Les châteaux baignent dans des douves malsaines. Et Milady n'est pas une très belle femme (SOS Jean-Pierre Gibrat  Laughing ) ! Nous n'aurons donc pas droit au Bal des Échevins.  Crying or Very sad

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A32   je viens de - Je viens de lire - Page 8 A33

Le recours à la technique du lavis, donne une image quelque peu artificielle d'ancienneté. L'âge d'or de la photographie en noir et blanc est bien trop éloigné du 17ème siècle.

Voilà, voili, voilou.
Bonne soirée
Eléanore

Voilà ! J'ai moi aussi acheté finalement Milady ou le Mystère des Mousquetaires, que j'ai lu en ce début de semaine.  

La curiosité a été la plus forte. Il faut dire que "les Trois Mousquetaires" ont été une des grandes lectures de ma jeunesse.  Wink

Avant de commencer cette BD, je m'attendais bien sûr à lire un livre féministe, puisque le scénariste (Sylvain Venayre) focalise toute l'attention du lecteur sur le sort funeste (et peut-être injuste) que subit un personnage féminin. Mais curieusement, ce n'est pas vraiment l'intention principale de l'ouvrage. Milady n'est en effet pas réellement sympathique, et elle n'est pas réellement innocente (si j'ai bien compris le portrait du personnage qui reste un peu flou). En fait, l'intention de Venayre semble plutôt de rédiger un "exercice de style" car il imagine ce qu'aurait pu écrire (selon lui) Alexandre Dumas s'il avait écrit ce livre tout seul, sans Auguste Maquet.

Et après avoir refermé ce livre, je constate curieusement que cette BD m'a un peu "laissé sur ma faim". C'est un peu une déception.

De quoi suis-je déçu ? Tout d'abord de cette idée de revisiter la création des Trois Mousquetaires en se concentrant sur le binôme Dumas-Maquet. Il est en effet notoire (et Alexandre Dumas l'annonçait lui-même dans sa préface du roman) que cette œuvre reprend en grande partie l'intrigue d'un "roman" paru au XVIIIème siècle, qui s'intitule les Mémoires de M. d'Artagnan, et qui était écrit par Gatien de Courtilz de Sandras. En fait, il y a eu un "trio" d'écrivains et le processus de création est plus complexe que ce que Venayre imagine. Et donc le projet d'imaginer le "vrai récit" que Dumas aurait raconté en l'absence d'Auguste Maquet me parait très hasardeux, et un peu futile.

Par ailleurs, en se concentrant sur "l'architecture" du récit (qu'il inverse), Venayre néglige un peu trop à mon avis ce qui fait le sel d'un scénario, à savoir l'identité et le caractère des personnages. Certes, il modifie un peu les personnalités de Milady et d'Artagnan, mais les portraits qu'il nous propose sont assez superficiels, surtout si on les compare à ceux de Dumas, qui sont plein de verve, de fougue et de trouvailles. Loin d'être dérangeant, le récit de "Milady" selon Venayre me parait assez pâle, et pauvre en surprises.

Et puis, ce qui m'a aussi irrité, c'est que le récit est incomplet. Il y a de longs épisodes (presque tous les "Ferrets de la reine", en fait) qui sont supprimés, et le récit me semble déjà ainsi bien déséquilibré. Mais le pire, c'est que la fin du roman (avec l'assassinat de Buckingham, puis l'arrestation et la mort de Milady) est totalement supprimée. Ce choix me semble particulièrement malheureux, car ce sont des péripéties que l'on pouvait raconter avec un autre regard (celui de Milady), et parce que tout récit doit nécessairement avoir une bonne conclusion. Le scénariste se prive donc (et bien maladroitement) de moments qui sont essentiels pour parachever son scénario, et on n'en retient hélas que son caractère incomplet.

Pour ce qui concerne le dessin, je le trouve assez réussi, même si Milady n'est (il est vrai) pas très séduisante. Frédéric Bihel semble viser le modèle des anciennes illustrations que l'on trouvait dans les livres du 18ème ou 19ème siècle, et ce n'est pas un mauvais choix. Ce style volontairement désuet nous replonge dans l'ambiance des vieux livres, et ce serait plutôt astucieux si le scénario était à la hauteur de son modèle. Malheureusement ... ce n'est pas le cas.

A tout prendre, plutôt que d'avoir cet essai un peu trop intellectuel, j'aurais préféré découvrir une intrigue plus radicalement féministe, qui prenne totalement le contrepied du récit de Dumas, et qui assène quelques idées féminines réellement dérangeantes. Cela aurait pu produire une oeuvre ressemblant à cette pièce de théâtre qui s'intitule "Célimène et le Cardinal", dans laquelle tout le message que Molière mettait dans le "Misanthrope" était astucieusement détourné. Mais ce n'était vraiment l'intention de Sylvain Venayre, bien sûr, qui n'arrive donc pas à capter l'intérêt du lecteur.    Rolling Eyes

Au final, cela donne une BD un peu anecdotique, malgré l'originalité de l'idée de départ.

Et en conclusion, personne ne doit se sentir obligé de la lire.    Wink


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186je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mer 6 Mar - 21:17

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonsoir Raymond

Je partage votre avis. Concernant la fin inachevée, j'y vois plutôt une ouverture vers un éventuel tome 2 au cas où les ventes seraient bonnes Smile

Oui, le scénario manque de consistance, si ce n'est peut être par son regard dur et acéré sur les relations entre femmes et hommes.

Du coup, il me semble nécessaire de signaler que le scénario d'Ada comporte aussi quelques (petites) faiblesses. Ainsi l'origine de la relation entre Ada et Egon Schiele est improbable. Et leurs premiers échanges sont dignes d'un roman pour adolescents. D'autres points me gênent aussi mais je ne veux pas dévoiler la conclusion et nous pourrons en discuter la semaine prochaine.... J'espère donc que Draculea et vous apprécierez quand même l’œuvre et ne regretterez pas votre achat.  Embarassed

Cordialement
Eléanore

187je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Jeu 7 Mar - 10:50

Raymond

Raymond
Admin

Relevons qu'il y a déjà eu une BD consacrée à l'histoire de Milady il y a quelques années. C'est une œuvre en 2 tomes intitulée Milady de Winter et elle a été dessinée par Agnès Maupré.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Milady11

Ce récit comporte 2 tomes qui font un ensemble de 280 pages (environ), et il y a également eu une intégrale. Le style graphique (en noir et blanc) est léger et dynamique, et soutient en fait très bien le récit.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Milady12

J'avais emprunté cet ouvrage à la bibliothèque, il y a quelques années, mais mes souvenirs sont devenus un peu flous. Je me souviens en tout cas que "l'auteure" (c'est comme cela que l'on dit maintenant  Cool  ) adapte à sa manière le récit de Dumas en le centrant sur Milady. Agnès Maupré féminise donc l'histoire, mais elle le fait avec une certaine habileté, en ajoutant des scènes qui expliquent les réactions de son personnage principal  (et qui la rendent plutôt sympathique).

Il faudrait que je retrouve ce bouquin ... dont je n'ai lu en fait que le tome 1. Dans me souvenirs, il est meilleur que le "Milady" actuel.   Rolling Eyes


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188je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mar 12 Mar - 11:48

Raymond

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eleanore-clo a écrit:Bonjour Raymond

Raymond a écrit:Faut-il croire certaines critiques élogieuses, comme par exemple celle de Didier Queila-Guyot au sujet de Ada, un nouvel album de Barbara Baldi ?

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Ada-co10

Il est vrai que le style graphique est plein d'élégance. Mais la lecture est-elle intéressante ?

J'ai lu la BD et elle m'a séduite.

L'histoire se passe en Autriche, durant la première guerre mondiale. Ada est une jeune femme. Elle vit avec son père dans la ferme familiale. Le père est un rustre. Il abrutit sa fille de travail et la prive de toute compagnie, inquiet à l'idée qu'elle fuit l'exploitation, comme l'a fait sa mère avant elle. Néanmoins, Ada se révèle une maitresse-peintre, une autodidacte brillante et sensible. Elle va ainsi faire la connaissance d'Egon Schiele et de Gustav Klimt. Son père refuse cette ouverture et va même, par jalousie ou vengeance, tuer la seule compagne d'Ada, une petite chienne....

Le scénario est très épuré et des pages entières se succèdent sans le moindre dialogue. Le monde rural y est âpre. Barbara Baldi lorgne du côté de Zola et se garde bien de fréquenter Rousseau. On pense parfois à Silence de Comès. L'absence de texte  n'est absolument pas gênante et permet au lecteur de se concentrer sur l'essentiel, sur le drame familial, sur ce Mozart qu'un père tente d'assassiner.

Le principal intérêt de l'ouvrage réside dans le dessin. Est-ce d'ailleurs une BD ou un livre d'illustrations, oserais-je même dire un livre d'art ? Les vignettes se succèdent toutes aussi somptueuses les unes que les autres. Baldi nous livre une magnifique succession d'aquarelles, jugez-en par vous même :

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A34 je viens de - Je viens de lire - Page 8 A35 je viens de - Je viens de lire - Page 8 A37

Le contraste entre le visage angélique d'Ada et celui diabolisé du père est impressionnant. Et le portrait du paysan rappelle quelque peu le style de Bill Sienkiewicz.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A36

Ada est la BD RTL de février : https://www.rtl.fr/culture/arts-spectacles/ada-de-barbara-baldi-est-la-bd-rtl-de-fevrier-2019-7797060745. Ce n'est pas un hasard  Very Happy .

Bonne lecture ?  Smile

Cordialement
Eléanore

Bonne lecture ?      Idea

Eh bien … oui, j'ai acheté cet album, d'abord parce que tu en dis du bien, et ensuite que le dessin est très joli.   Wink

Tu résumes très bien le scénario, mais il m'a laissé un peu sur ma faim. En fait, Ada est avant tout un beau livre, un album qui séduit l'acheteur par sa maquette élégante et ses dessins qui sont parfois de véritables petits tableaux.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Ada-ho10

Barbara Baldi a des goûts assez classiques en matière de peinture et je devine d'après son récit qu'elle ressent une certaine affinité pour les œuvres de la Sécession viennoise, en particulier celles de Gustave Klimt et d'Egon Schiele. Cette influence n'apparait toutefois qu'assez peu dans ses images. L'album expose en effet beaucoup de paysages naturels assez tristes, qui me font plutôt penser aux premières toiles flamandes de Van Gogh, et qui montrent beaucoup de ciels grisâtres, d'intérieurs dénudés ou de sombres forêts inquiétantes. La silhouette assez frêle d'Ada évolue au sein de ces tableaux froidement réalistes, et bien rares sont les moments qui viennent rompre cette monotonie. Il est vrai que le récit est avant tout celui dune "Cendrillon moderne", opprimée par son père et condamnée à travailler comme une esclave.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Ada-be10

Tu nous avais prévenus : il y a très peu de texte dans cette œuvre qui fait 110 pages. Ce choix radical m'a paru tout de même un peu décevant, car le scénario devient ainsi plutôt maigre, et on aurait envie de mieux comprendre ce qui permet à l'héroïne d'avoir une telle résilience. Elle se réfugie dans la peinture et possède sans aucun doute une vie intérieure très riche, contrairement à ce que nous suggère l'interminable succession d'images silencieuses choisies de ce livre. Le très court épisode pendant lequel Ada rend visite à Egon Schiele est presque autant silencieux que le reste (Ada ne dit presque rien), et seules les invectives du père apportent finalement un commentaire bien sinistre à cette existence effacée et laborieuse de l'héroïne.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Ada-vi10

Barbara Baldi ne nous épargne donc rien pour nous faire comprendre le triste sort d'Ada, et la conclusion du récit, qui est plutôt positive, en devient presque surprenante. Je m'attendais plutôt à un drame comparable aux romans d'Emile Zola mais, au fond, pourquoi ne pas imaginer que cette jeune femme a suffisamment de ressources (et de chance) pour échapper à son destin ? Il y a ainsi quand même une petite lueur au sein de cette sombre histoire.   Wink

Et pour conclure, j'admets que cette œuvre est intéressante, certes, mais elle me laisse tout de même un léger sentiment de frustration. Un peu plus de texte n'aurait pas nui à ce récit pour lequel on pouvait imaginer quelques développements parallèles à la vie quotidienne d'Ada.

Cette lecture n'a donc pas fait de moi un grand admirateur du style narratif de Barbara Baldi et … je resterai probablement assez circonspect pour ses prochains ouvrages.

Eh oui !   deso


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189je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Mar 12 Mar - 13:22

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonjour

Merci de cet avis et de la confiance en ma recommendation. Very Happy
Spoiler:
La transformation de la ferme en huit-clos est aussi une belle prouesse narrative. Alors que la nature infinie est à portée de main, la chaumière se transforme en un réceptacle de toutes les tensions et les passions.
Pour ce qui est des paysages d'hiver, j'y vois le reflet de l'âme d'Ada. Et on peut imaginer que la vie de l'héroïne refleurira avec le printemps qui arrive.
J'y vois aussi une référence à la célèbre toile de Brueghel, les Chasseurs de la neige, conservée d'ailleurs dans le Kunsthistorisches Museum à Vienne.
je viens de - Je viens de lire - Page 8 Chasse10

Cordialement
Eléanore

190je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Ven 15 Mar - 9:13

Raymond

Raymond
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Je vais répondre au spoiler par un autre spoiler.    Wink

:


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191je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Dim 24 Mar - 10:54

Raymond

Raymond
Admin

Le Concerto pour la main gauche est une œuvre célèbre de Maurice Ravel, dédiée à un pianiste nommé Paul Wittgenstein, qui perdit son bras droit lors de la guerre de 14-18.

C'est maintenant le titre d'une BD de Yann Damezin, un jeune dessinateur que je ne connais pas, qui raconte justement la vie de Paul Wittgenstein.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Concer10

Le style graphique est très particulier, et il fait curieusement alterner des caricatures simplifiées (les personnages principaux) avec des décors très sophistiqués, envahis par des dentelles orientales.
je viens de - Je viens de lire - Page 8 Concer11
C'est donc un livre assez singulier, qui m'attire un peu (j'aime son sujet), mais j'attends quand même de lire ce qu'en diront les critiques.  

Didier Della-Guyot en dit en tout cas du bien, sur BDZoom :

http://bdzoom.com/140463/actualites/un-concert-graphique-haut-la-main/


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192je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Dim 24 Mar - 12:19

Draculea

Draculea
vieux sage
vieux sage

Ce que tu en montres est en tout as très beau ! Very Happy
Il existe de nombreuses versions de ce concerto par de grands interprètes.
En voici une qui est historique, celle du pianiste français Samson François :



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193je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Dim 7 Avr - 12:30

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonjour

Le tome 2 de Villevermine vient de paraitre. Le garçon aux bestioles conclut ainsi le diptyque commencé avec l'homme aux babioles. Au delà du jeu de mots et de sonorités sur les titres, que penser de ce nouvel opus ?

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A38

On va dire du bon et du moins bon !
Le bon réside, me semble-t-il, dans cette étrange société sans adultes, créée à Villevermine, par les enfants de la rue. On pense à Deux ans de vacances de Jules Verne. Est-ce que ces jeunes vont imiter la société des adultes ou inventer un nouveau monde ? En tout cas, ils ont créé un singulier corpus juridique qui tient plus des maximes que des lois. J'ai aussi beaucoup apprécié le regard portée sur la folie, celles du savant et de son frère bien évidemment, mais pas uniquement. Chaque personnage porte en lui des germes de bizarrerie. Ne peut-on y voir une fable sur le genre humain où la normalité n'existerait pas et masquerait une universelle petite anormalité, socialement tolérable et encadrée par les codes sociaux ?
Le moins bon réside dans la fin du récit. La résurrection du gamin est très artificielle, de même que le renouveau du dialogue entre Peuplier et les objets. Notons aussi le combat final entre l'insectoïde géant et les héros quelque peu grand-guignolesque. Quant à la conclusion, la lectrice (le lecteur) y verra, au choix, une pâte sirupeuse ou un couronnement heureux.
Le style des dessins est identique à celui utilisé dans le tome 1. Lambert fait donc preuve d'une grande cohérence, louvoyant entre BD franco-belge et manga. Je confie ne pas avoir été trop séduite.

Bon dimanche
Eléanore



Dernière édition par eleanore-clo le Dim 7 Avr - 20:33, édité 1 fois

194je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Dim 7 Avr - 12:57

Raymond

Raymond
Admin

J'ai acheté hier le Concerto pour la Main gauche de Yann Damezin, et j'ai beaucoup aimé !  

Pour ce qui concerne le récit, l'auteur raconte avec finesse la vie du pianiste Paul Wittgenstein, qui ne se résume pas à la simple perte de son bras droit. Ce musicien a bien sûr vécu la Première Guerre Mondiale, dont il a été victime, mais il était avant tout un homme fortuné qui vivait librement sa vie sans trop se préoccuper des contingences matérielles. Il a bien sûr eu l'énergie remarquable de reprendre son piano après son amputation, et d'apprendre à n'en jouer que de la main gauche, et ce moment fatidique est bien raconté.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Concer12

Mais le drame de sa vie fût aussi sa naissance dans une famille juive, avec une persécution de la part des nazis qui l'obligea à fuir aux Etats-Unis. Il y eu de même une tragédie familiale peu banale, avec les suicides successifs de plusieurs de ses frères, et le récit s'intéresse en fait davantage à la colère intérieure de ce "pauvre homme riche", dont les vrais handicaps étaient de nature psychique plutôt que somatique. L'album illustre d'ailleurs d'une façon remarquable les multiples conflits intérieurs du pianiste, grâce à un découpage audacieux de certaines pages et aussi à l'utilisation d'éléments décoratifs surabondants qui deviennent souvent un véritable "commentaire graphique" des événements.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Concer13

Et c'est en fait ce dessin au style très personnel qui est le véritable intérêt du livre. Il devient en effet une "manière de raconter", sans fioriture inutile (contrairement à ce que l'on pourrait croire) et sans excès de pathos, en particulier lorsque le récit devient dramatique. Et c'est ainsi que lorsque Wittgenstein doit fuir son pays, par exemple, on découvre la structure de la page qui s'effondre, et aussi une interminable frise cauchemardesque qui envahit toutes les cases, comparable à une menace rampante et à une progression inexorable vers un cauchemar.

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Et c'est réellement avec ravissement qu'en lisant le Concerto pour la Main gauche, on découvre à la fois les événements de la vie du pianiste et la "métaphore graphique" (si j'ose dire Wink ) que le dessinateur va choisir pour les illustrer. Parfois, les péripéties sont présentées d'une façon assez plate, sans effet de mise en page, et la nudité du dessin devient alors une austérité du regard, une absence de commentaire qui a d'ailleurs aussi du sens. Mais bien plus souvent, la séquence d'images est bousculée par une architecture inventive ou par une profusion de détails qui agissent à la manière d'un masque, comme une façon de voiler l'horreur, ou de dissimuler l'excès des sentiments.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Concer15

Vous l'avez maintenant compris, je pense, ces jeux avec la structure de la page et cette profusion de dentelles ne sont pas un banal exercice de style et encore moins un excès d'effets  décoratifs. Ils représentent d'abord le commentaire graphique (je l'ai déjà dit) d'un récit, mais aussi une sorte d'accompagnement musical des événements, et surtout un regard d'auteur sur un genre (le biopic) qui se limite bien trop souvent à la plate et impersonnelle transcription des moments marquants d'une vie. Yann Damezin, dans ce livre, a choisi de nous épater en dessinant une multitude d'images labyrinthiques ou fortement symboliques, à la fois splendides pour l'œil et riches de sens, et ceci sans jamais perdre la continuité de son récit ou les émotions qui accompagnent une existence. C'est à la fois un tour de force et une réussite complète.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Concer16

Est-il nécessaire d'en dire plus ?   Very Happy

Je pense que non, et vous savez maintenant à quoi vous en tenir !  Wink


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195je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty viens de lire Dim 7 Avr - 13:19

Draculea

Draculea
vieux sage
vieux sage

Cela semble vraiment exceptionnel ! Merci de cette présentation détaillée cher Raymond. Voilà un album a découvrir d'urgence c'est évident ! Very Happy

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196je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Dim 7 Avr - 18:24

Raymond

Raymond
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eleanore-clo a écrit:Bonjour

Le tome 2 de Villevermine vient de paraitre. Le garçon aux bestioles conclut ainsi le diptyque commencé avec l'homme aux babioles. Au delà du jeu de mots et de sonorités sur les titres, que penser de ce nouvel opus ?

je viens de - Je viens de lire - Page 8 A38

On va dire du bon et du moins bon !
Le bon réside, me semble-t-il, dans cette étrange société sans adultes, créée à Villevermine, par les enfants de la rue. On pense à Deux ans de vacances de Jules Verne. Est-ce que ces jeunes vont imiter la société des adultes ou inventer un nouveau monde ? En tout cas, ils ont créé un singulier corpus juridique qui tient plus des maximes que des lois. J'ai aussi beaucoup apprécié le regard portée sur la folie, celles du savant et de son frère bien évidemment, mais pas uniquement. Chaque personnage porte en lui des germes de bizarrerie. Ne peut-on y voir une fable sur le genre humain où la normalité n'existerait pas et masquerait une universelle petite anormalité, socialement tolérable et encadrée par les codes sociaux ?
Le moins bon réside dans la fin du récit. La résurrection du gamin est très artificielle, de même que le renouveau du dialogue entre Peuplier et les objets. Notons aussi le combat final entre l'insectoïde géant et les héros quelque peu grand-guignolesque. Quant à la conclusion, la lectrice (le lecteur) y verra, au choix, une pâte sirupeuse ou un couronnement heureux.
Le style des dessins est identique à celui utilisé dans le tome 1. Lambert fait donc preuve d'une grande cohérence, louvoyant entre BD franco-belge et manga. Je confie ne pas avoir été trop séduite.

Bon dimanche
Eléanore
Il est malheureusement fréquent que des BD apparemment prometteuses finissent par (plus ou moins) décevoir. C'est l'incertitude des mini-séries. Les bonnes idées ne sont pas toujours suffisantes, et il faut que l'ensemble soit cohérent.

je vais voir pour ma part si cette BD a été acquise par la bibliothèque municipale de Lausanne.    Wink



Dernière édition par Raymond le Dim 25 Aoû - 10:35, édité 1 fois


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197je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Dim 7 Avr - 22:03

Loup79


grand maître
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Raymond a écrit:Il est malheureusement fréquent que des BD apparemment prometteuses finissent par (plus ou moins) décevoir. C'est l'incertitude des mini-séries. Les bonnes idées ne sont pas toujours suffisantes, et il faut que l'ensemble soit cohérent.
J'ai eu le même sentiment en lisant Sanctuaire de Christophe Bec ce weekend. Un sujet intéressant, promettant même mais l'ensemble est décevant en finalité. Shocked Le pire, c'est qu'il a remis ça avec Sanctuaire Genesys. On retrouve le même sujet intéressant, la même décevante fin : Bec a copié les même erreurs de la série mère. Evil or Very Mad
Je me demande si toute son œuvre est identique ? Faudrait que je m'intéresse à une troisième de ces séries... alien

198je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Jeu 29 Aoû - 17:58

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonjour

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Indes_10

Les Indes Fourbes est assurément une des sorties les plus attendues de cette rentrée 2019. La distribution de cette superproduction est de premier plan. Elle réunit Alain Ayroles, le scénariste de la série De Cape et de Crocs, et Juanjo Guarnido, le dessinateur de Blacksad. L’alchimie entre ces deux immenses talents a-t-elle pris ? La qualité est-t-elle au rendez-vous ? Sans hésiter, je réponds affirmativement.  Cool

Les Indes Fourbes est une autobiographie où Pablos, un homme issu d’un milieu misérable et délinquant, raconte ses mille et une ruses pour s’enrichir et s’élever socialement dans l’empire espagnol et plus particulièrement dans sa colonie péruvienne. La BD se veut la suite du roman El Buscón, écrit en 1626, par l’auteur espagnol Francisco de Quevedo (https://en.wikipedia.org/wiki/El_Busc%C3%B3n, attention, le lien est dirigé vers un article en anglais car celui en français ne donne pas le résumé de l’œuvre). Aussi Ayroles met ses pas dans ceux de son lointain prédécesseur pour nous livrer une histoire brillante, ponctuée de moult rebondissements où le lecteur est abusé et induit sur de fausses pistes. Et l’ultime pirouette de la narration, pour invraisemblable qu’elle soit, s’inscrit tout à fait dans la tonalité du récit.  

La BD se veut picaresque (https://fr.wikipedia.org/wiki/Roman_picaresque) et s’appuie sur (presque) tous les codes du genre. Les aventures extraordinaires de Pablos, son incroyable épopée, servent de prétexte pour dépeindre la vie sous l’empire espagnol. Ainsi, l’humour (noir) cache une critique sociale et un manifeste anticolonialiste virulents. Par exemple, la traite des noirs y est abordée avec un regard ironique lorsque le scénario nous raconte que les esclaves africains ne bénéficient pas de la protection papale à contrario du peuple inca... Sachant que les uns et les autres sont persécutés, volés, assassinés, la différence est infime ! Comme indiqué, la BD respecte presque tous les codes du roman picaresque à l’exception du naturalisme ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Naturalisme_(litt%C3%A9rature) ). Ou plutôt, si les parents et le frère de Pablos n'échappent pas à leur destin de gueux, le jeune homme, au contraire, connaitra une étrange réussite.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Enfanc10

Ayroles et Guarnido pratiquent l’un et l’autre la mise en abyme. Ayroles en utilisant le récit de voyage d’un jésuite comme élément de sa narration et Guarnido en reproduisant moult œuvres d’art du siècle d’or espagnol dont, bien sûr, les célèbres Ménines de Vélasquez (pages 10, 158 et 159), mais aussi Le Jeune Mendiant de Murillo (page 151).

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Mzonin10 je viens de - Je viens de lire - Page 8 Mendia10

L'utilisation de ces deux tableaux est tout sauf anodin puisque la vie de Pablos oscille entre ces deux extrémités. Et le choix de portraiturer Philippe IV dans le miroir des Ménines, que maints critiques d’art ont essayé d’expliquer, trouve ici une explication simple, naturelle et brillante. Est-ce que Les Indes Fourbes serait au final la réalité ?  Laughing . Notons au passage que la couverture s’inspire du portrait de Juan de Pareja de Velázquez.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Indes_10 je viens de - Je viens de lire - Page 8 Pareja10

Les dessins de Guarnido sont sublimes. Tout le talent déployé dans Blacksad s’exprime ici. Alors que de plus en plus de dessinateurs s’expriment directement sur des tablettes numériques, l’artiste espagnol recourt à la technique de l’aquarelle pour nous représenter un Pérou pittoresque, à mi-chemin entre la civilisation inca et celle espagnole. Les paysages de montagne ou de jungle paraissent dignes des plus belles cartes postales.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Paysag10

Les visages des personnages sont merveilleusement expressifs, et les animaux ne sont pas en reste (le lama, le singe, et.), nous replongeant dans les anthropomorphismes de Blacksad. La double-page (72-73) représentant la capitale d’Eldorado atteint la qualité d’une peinture et les édifices gréco-romains (Arc de Constantin, statue d’Athéna, etc.) font penser aux toiles d’Hubert Robert (https://fr.wikipedia.org/wiki/Peintures_d%27Hubert_Robert). Et que dire des ombres, magnifiques en diable ? Elles sont aussi belles que dans L'enfer, le silence (Blacksad n°4), c'est peu dire. Le trait est dynamique, plein de vie, et se marie parfaitement avec une narration rapide et échevelée.

Guarnido s’amuse beaucoup et multiplie les clins d’œil. Don Diego sur son cheval et Pablos sur son âne en page 58 font référence à Don Quichotte et Sancho Panza. Certains décors nous rappellent Le Temple du Soleil d’Hergé comme en haut des pages 63 et 79 (la rue descendante), en bas de la page 85 (le temple inca) ou encore au milieu de la page 112 (le pont). Je soupçonne aussi qu’Ayroles et Guarnido connaissent leur Disney et plus particulièrement le feuilleton Zorro, preuves en sont la réutilisation de Don Diego (laissé par Quevedo en Espagne) ou encore la curieuse ressemblance d’un convive de la page 144 avec le Sergent Garcia.

je viens de - Je viens de lire - Page 8 Don_di10

Signalons enfin que Delcourt a mis les petits plats dans les grands pour attirer les deux artistes vedettes. L’objet livre est splendide : grand format, papier de qualité et signet ! Tout pour plaire ou presque vous dis-je. Smile

Au final, Les Indes Fourbes tient sa promesse. C’est une BD magnifique, belle, intelligente, désenchantée, qui nous fait rire, rêver et réfléchir. Est-ce un chef d’œuvre absolu ? Peut-être pas et je me permets d’émettre un petit bémol. Si la construction est d’une incroyable intelligence, elle n’en manque pas moins d’un zeste d’émotion. Avoir de l’empathie pour un anti-héros, une fripouille, un imposteur, et pour une gallerie de personnages, tous plus sinistres les uns que les autres, n’est pas aisé ! Et le sort des femmes est rien moins que désespérant... Mais que cela ne vous retienne pas et je confie avoir été très heureuse de le lire. L'humour omniprésent aide à faire passer la noirceur !

Bonne lecture !

Eléanore



Dernière édition par eleanore-clo le Ven 30 Aoû - 14:00, édité 2 fois

199je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Re: Je viens de lire Jeu 29 Aoû - 19:27

Raymond

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Merci beaucoup ! Very Happy

Je me permettrai juste de transférer ton billet dans le sujet "je viens de lire", où il sera plus facile à retrouver. Wink


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200je viens de - Je viens de lire - Page 8 Empty Indes fourbes Jeu 29 Aoû - 22:31

eleanore-clo

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vieux sage
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Bonsoir Raymond
Aucun souci Very Happy
Cordialement
Eléanore

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