Thorgal

J'ai lu avec un certain étonnement sur le site auquel Tarmac nous renvoie une critique généralisée des albums de Thorgal depuis Le Sacrifice. J'avoue être perplexe car je trouve au contraire ces épisodes très réussis ainsi la manière à mon goût époustouflante adoptée par Rosinski depuis cet album. Il est certain que le dessin peinture rompt avec les habitudes et a dû laisser perplexe plus d'un lecteur, mais j'y vois pour ma part une originalité admirablement maîtrisée qui a donné à l'art de Rosinski un souffle nouveau capable de le distinguer de tous les créateurs contemporains et pourtant ils sont nombreux dont la qualité est immense !

Les histoires elles-mêmes, contrairement à ce que semblent suggérer les débateurs du forum Thorgal m'ont passionné et j'ai du mal à comprendre à titre tout à fait personnel de quel perte de souffle et de quelle dénaturation ils parlent. Thorgal n'a cessé de se métamorphoser et de prendre des directions narratives et graphiques inattendues depuis le point de départ de la série.

L'album 35, signé Xavier Dorison et Rosinski, Le feu écarlate, me semble à cet égard exemplaire d'une immense réussite. Thorgal depuis Le Sacrifice avait pris des directions multiples en superposant les niveaux de récit et en entrecroisant des routes diverses, un peu sur le modèle des Mille et une nuits, avec une virtuosité qui m'a fascinée. Le plus récent album rassemble ces écheveaux avec non moins de talent, tout comme aussi le font les Mille et une nuits, et l'art de Rosinski y est à l'un de ses sommets, il suffit de voir les études préparatoires dans l'édition collector. Bref, j'ai du mal à saisir les reproches que j'ai lus sur la page à laquelle nous renvoie Tarmac, mais cela s'explique peut-être ainsi : les identifications absolues à un univers par les admirateurs de longue date ont parfois cet effet intégriste qui les poussent à rejeter toute nouveauté au titre qu'elle trahit une prétendue essence de leur série favorite.
J'ai en tout cas grande envie de découvrir l'art book qui nous a été indiqué plus haut !

Ci-desous : Rosinski travaillant à une planche du Feu écarlate :

Oui, c'est vraiment une nouvelle aussi triste qu'inattendue !

Je ne l'ai pas encore lu et du coup je ne puis te dire. Je l'ai juste aperçu à sa sortie mais c'est une lecture que je compte faire dès que possible. Sans doute pendant ces Fêtes ! Que je te souhaite par la même occasion très heureuses !

J'ai déjà lu ces échanges et je comprends ô combien la consternation de Tarmac. En revanche, je n'avais pas lu le Numéro 110 de Casemate. je vais donc me hâter de le découvrir. Merci de cette indication.

Je suis bien d'accord. Une des limites de Thorgal était à mes yeux cet espèce d'angélisme sous-jacent qui présidait parfois trop aux destinées du personnage, même contrariées par mille sorts. L'évolution donnée par Dorison m'intéressait donc vivement et était admirablement accompagnée par Rosinski. Mais comme je n'ai pas encore lu le numéro où ce dossier est traité, le dessinateur a-t-il eu son mot à dire ?

Ah, oui, évidemment. Je comprends que cette position a dû peser considérablement. Rosinski a une légitimité qui lui donne l'autorité de faire pencher les orientations de ton. Peut-être a-t-il eu tort. J'en ai peur en tout cas. Trop de successions rapides à la barre narrative d'une série nuit à la cohérence de celle-ci, quand il ne s'agit pas d'un jeu maîtrisé d'alternance entre des repreneurs choisis à l'avance, mais d'alternances en situation de crise. Tout ceci est bien triste.

Splendide ! Elle va tout à fait dans le sens de ce que dit Rosinski dans la récente interview de Casemate qu'il veut continuer d'explorer au-delà des habitudes du dessin de bande dessinée au trait classique avec encrage.

Hélas, je partage ces craintes. J'attends avec impatience la suite du Feu écarlate afin de voir ce qu'il en sera. A mon avis, Rosinski a commis une erreur en contribuant au départ de Dorison. Je trouvais que l'orientation prise était très intéressante et cohérente de surcroît avec la grande complexification qui s'était glissée dans la série depuis Le sacrifice. D'autant plus que Dorison se proposait de réunir progressivement tous les mondes qui s'étaient ouverts depuis cette phase de l'oeuvre et qu'il avait les moyens scénaristiques de le faire de manière convaincante et puissante. Espérons que nous n'aurons pas trop à le regretter.