Je reviens à La rançon, maintenant que ma lecture en est terminée.
J'ai pris jusqu'au bout beaucoup de plaisir à cet album qui sait entrelacer avec beaucoup d'habileté et d'efficacité plusieurs niveaux d'intrigues déployés en des lieux divers qui se rejoignent autour d'une même problématique historique et anecdotique, celle de cette Afrique du Sud des années 1950 où l'étau de l'Apartheid se resserre de plus en plus - Mandela n'a pas encore été arrêté et jeté en prison - et où les suprématistes blancs exercent une pression considérable pour que la politique de ségrégation achève de se déployer dans toute son ampleur.
A cela s'associent les intérêts économiques, les rivalités, dans une cadre qui tient du récit policier, de la saga familiale, presque du récit d'espionnage et trouve dans le village où se jouent les dernières scènes un point culminant particulièrement réussi, puisque ce village vidé de ses habitants pour servir de repaire aux ravisseurs et à leurs sbires est comme une image en miniature de l'Afrique confisquée par la rapacité de ceux des européens qui la considèrent comme un coffre au trésor dont les légitimes propriétaires doivent être exclus.
Comme les conquérants de l'ouest américain décimaient indiens et bisons, les racistes sud-africains n'ont eux non plus aucun respect, ni pour les natifs qu'ils méprisent, ni pour la faune unique de ces régions. J'ai trouvé fort intéressant de mettre en parallèle ces deux violences. Car si elles ne sont pas équivalentes, elles participent d'un même état d'esprit. Comme j'ai trouvé intéressant de montrer que dès cette époque, il se trouvait heureusement des blancs pour rejeter l'idéologie dominante. Une fois de plus, Roger Seiter a su placer Lefranc dans un moment clé de l'histoire en marche et créer mille résonances passionnantes qui font de cette histoire une aventure palpitante réunissant tous els registres de la série en un seul album.
Je rends enfin hommage au magnifique travail de paysagiste de Régric qui fait de cet album une grande réussite, sans oublier la somptueuse mise en couleur de Bruno Wesel. On notera un clin d'oeil très réussi au litre fondateur puisque Jacques Martin apparaît bien me semble-t-il dès le début à la gare de Strasbourg !
Régric nous offre aussi un bel hommage au
Mystère Borg autant qu'à
La grande menace :
Admirons enfin le talent de paysagistes de Régric, aussi bien pour la ville que la nature :