A mon tour, j'ai lu cet album.
Ce Jhen à Venise est construit autour d'une intrigue que je trouve intéressante, mais qui nécessite de s'intéresser à l'histoire politique de la Renaissance italienne. Elle met aux prises le Doge de Venise Francesco
Foscari, son épouse, le
Conseil des Dix (véritable gouvernement occulte de Venise), le duc de Milan Filipo Visconti ( un ancêtre du célèbre
cinéaste ) et le condotierre
Francesco Sforza, futur duc De Milan et fondateur d'une véritable dynastie. Le récit est au fond assez dense, mais ces complots intéressent peu Jhen qui est venu sur place pour rechercher un livre, le fameux
codex Voynich.
Dans l'ancien forum, nous avions parlé de ce manuscrit et de ses mystères. Nous nous demandions quel rôle il jouerait dans le récit et de ce point de vue, c'est assez décevant. Jhen ne découvre le codex (de façon presque miraculeuse) qu'à la fin de l'histoire et ce livre n'intéresse au fond personne, à l'exception de Gilles de Rais. Le connétable recherche l'élixir de longue vie mais ce livre porte en fait malheur à celui qui le possède. On peut donc deviner ce qui va bientôt arriver à "Barbe Bleue".
De même que pour
les Sorcières, il y a peu de récitatifs et il faut parfois deviner ce qui se passe (ou deviner qui sont les personnages). C'est un peu le contraire du "style Jacques Martin" qui expose toujours de façon claire les lieux, les situations et les intervenants. On trouve par ailleurs des séquences qui contiennent la narration simultanée de plusieurs actions et il faut les relire plusieurs fois pour bien les comprendre. Cette absence de texte explicatif se retrouve dans de nombreux albums actuels et cette caractéristique pourra déplaire à tous ceux qui appréciaient le classicisme des premiers Jhen.
Avec cette nécessité de souvent revenir en arrière pour mieux comprendre, je n'ai pas eu l'impression d'une lecture trop courte. C'est à nouveau un album qui est plus agréable à relire qu'à découvrir.
Le dessin de Pleyers reste digne des albums précédents. La colorisation est bien faite mais il y a une prédominance d'aplats de couleurs pâles, et je préfère les couleurs chaudes des premiers albums qui ont (à mon avis) plus de relief.
La dernière image, qui montre Jhen et Prelatti en train de s'embarquer pour un vaisseau à destination de Bruges, annonce le prochain récit qui sera s'intitulera le
Duc d'Occident. On peut d'ailleurs voir sur le
blog de Thierry Cayman la première planche de cette histoire à venir et qui fait suite à la
Sérénissime de manière logique. C'est une bonne idée de lier tous les récits par un fil chronologique, et de leur donner une place dans le temps. J'espère que les scénaristes n'auront pas peur de faire vieillir le héros par la suite, et de lui donner ainsi plus de réalisme.
Au total, c'est un album que j'ai apprécié, même si je regrette un peu les récitatifs de Jacques Martin qui donnaient au récit plus d'ampleur et de clarté. Je me réjouis de retrouver Jhen dans l'album suivant.