J'ai acheté hier ce 2ème tome de l'intégrale, et je suis ravi de cet achat.
Au premier plan, il y a d'abord la magnifique introduction écrite par Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault, qui raconte avec beaucoup de détails (et parfois d'informations inédites) les débuts de la carrière d'Eddy Paape. Rappelons que ce dernier a toujours entretenu des rapports mi-figue mi-raisin avec Charles Dupuis, qui avait ouvertement ses préférences. Dupuis admirait en effet sans réserve les BD de Franquin et Morris, et dédaignait par contre le travail de cet habile artisan qui avait eu la gentillesse de venir s'installer à Charleroi, tout près de l'imprimerie, pour assumer diverses tâches graphiques dans le journal. Les premières aventures de Valhardi dessinées par Paape avaient donc été privées d'album, alors qu'elles n'étaient pas forcément plus maladroites que les premiers Spirou de Franquin. Cette décision peut apparaître aujourd'hui légèrement injuste.
Cette intégrale rend donc hommage aux débuts de Paape, et nous permet de découvrir son impressionnante évolution graphique de 1946 à 1950. La première histoire est émouvante, car elle est dessinée de façon assez raide. Elle révèle d'emblée un statut de dessinateur débutant.
Mais quatre ans plus tard, les progrès sont impressionnants. Le dessin est plus dynamique et les personnages sont devenus expressifs. Paape n'a pas encore acquis son style définitif (plutôt influencé par Hubinon), mais il fait déjà preuve d'une certaine maîtrise.
Les scénarios sont d'un intérêt variable, et ce sont au fond de simples aventures à rebondissement multiples. Les deux histoires de Jean Doisy se lisent facilement, de même que celles d'Yvan Delporte, tandis que la longue aventure intitulée "Valhardi détective" a probablement été créée par improvisations successives, et m'a parue un peu longue.
L'intérêt de ce gros volume, c'est bien sûr de nous faire découvrir certaines facettes méconnues du journal Spirou. A ce sujet, il faut encore féliciter les deux auteurs de cette formidable préface, pour l'intelligence de leur approche. De même, on peut louer le travail de "rafraichissement" qui a été effectué sur les planches et sur leurs couleurs, qui nous permet de les découvrir dans un état assez proche de leur publication originale. Grâce à ce travail, ces vieilles BD peuvent quasiment être découvertes "dans leur jus".
Tous les nostalgiques de l'âge d'or du journal Spirou (qui se situe pour moi pendant les années 50 et 60) apprécieront sans réserve cette intégrale bourrée d'inédits intelligemment présentés.