Qui est le véritable dessinateur d'Ô Alexandrie ? Il y a toujours eu un certain flou sur cette question car, lors de sa parution, le dessin de l'album avait été attribué à Rafael Morales. Le grand public s'était alors réjoui de l'apparition d'un repreneur aussi talentueux et, par la suite, il a été bien déçu. En fait, si l'on se réfère à la page de titre, l'unique auteur de l'album serait Jacques Martin, Morales étant crédité de sa participation aux décors, tandis qu'une "participation" au dessin des personnages est attribuée au même Morales et à Marc Henniquiau.
Est-ce que cette présentation minimise le rôle de Rafael Morales dans l'album ? Je ne le pense pas, car il semble bien que Jacques Martin ait débuté seul cette histoire, plusieurs années avant sa finition. Il bénéficiait encore d'une vision normale et on reconnait par moment sa patte, en regardant le visage d'Alix dans les premières pages.
Pablo Morales ayant voulu assumer seul le dessin du personnage dans les albums suivants, il est maintenant assez facile de reconnaître sa participation au dessin des visages dans l'album. Les exemples sont plutôt rares, mais cette silhouette d'Alix (en bas de la planche 16) est sans doute de sa main.
Le dessin de Marc Henniquiau est moins connu, mais il semble bien que son talent ait permis une reproduction presque mimétique des visages à la manière de Jacques Martin. Rappelons que ce dernier fournissait à cette époque des crayonnés très poussés, mais l'encrage n'était pas toujours réussi avec le même bonheur par ses "élèves". Il m'est difficile de savoir à quelle page de l'album débute vraiment la participation d'Henniquiau, mais on peut admettre que la deuxième partie de l'histoire lui doit beaucoup. Ces deux cases tirées de la planche 44 reflètent probablement la qualité de son travail.
Ò Alexandrie est donc un travail d'équipe (on pourrait même dire un travail "de studio") qui a été dirigé de près par Jacques Martin. Ce dernier ne pouvait plus dessiner seul, mais il était encore au début de sa maladie visuelle. Il pouvait probablement bien contrôler la production de ses assistants et c'est ainsi que Rafael Morales dessine ses premiers décors égyptiens. D'emblée, il fait preuve d'une grande maîtrise dans cet exercice.
Mais que raconte cet album, qui est bien souvent dénigré aujourd'hui ? Il n'y a pas de grande aventure, il faut l'admettre, car les combats et les cavalcades sont remplacés par des intrigues de cour. Invité à Karnak par son ami Senoris, Alix se retrouve pris au piège car l'ancien vizir, qui sait comment trouver le trésor de la reine Hatshepsout, est tombé en disgrâce. Le héros devient la cible de deux clans rivaux, où l'on découvre d'un côté la fameuse Cléopâtre, et de l'autre son demi-frère Ptolémée XIII, un enfant capricieux et alcoolique. Tandis qu'Alix s'enfuit et cherche à faire libérer Senoris, Jacques Martin s'attarde avec gourmandise sur cet affrontement entre les descendants corrompus et décadents des pharaons. Cette sombre description de l'histoire des Lagides semble d'ailleurs être le véritable sujet de l'album.
L'intrigue n'est pas vraiment palpitante, même si Alix se démène et risque sa vie. On s'intéresse d'avantage aux personnages qui sont parfois de vieilles connaissances. On découvre la séduisante Cléopâtre, dont le charisme semble dominer Alix, et on retrouve l'honnête Senoris, qui est victime de son intégrité, ainsi que l'intriguant Qâa, dont les mystérieux pouvoirs vont rendre de grands services au héros du récit.
A la fin du récit, Alix retrouve Cléopâtre avec qui il noue une relation ambigüe. On se demande alors s'il faut résumer Ô Alexandrie comme une nouvelle aventure amoureuse d'Alix ?
Tel est donc cet album qui réécrit l'histoire officielle d'une manière souvent subtile. Ô Alexandrie a rapidement été catalogué comme un "album Morales" et cela explique peut être pourquoi il est aujourd'hui bien mésestimé. En le relisant aujourd'hui, je le trouve pourtant assez caractéristique de cette dernière période "martinienne" qui est brillante, et que l'on peut reconnaître par ses intrigues dramatiques, son ambiance souvent pessimiste, son contexte historique bien documenté et ses images minutieusement dessinées. J'en conclus ainsi qu'Ô Alexandrie est tout simplement le dernier album d'Alix dont le scénario et le dessin ont été bien maîtrisés par Jacques Martin.
Est-ce que cette présentation minimise le rôle de Rafael Morales dans l'album ? Je ne le pense pas, car il semble bien que Jacques Martin ait débuté seul cette histoire, plusieurs années avant sa finition. Il bénéficiait encore d'une vision normale et on reconnait par moment sa patte, en regardant le visage d'Alix dans les premières pages.
Pablo Morales ayant voulu assumer seul le dessin du personnage dans les albums suivants, il est maintenant assez facile de reconnaître sa participation au dessin des visages dans l'album. Les exemples sont plutôt rares, mais cette silhouette d'Alix (en bas de la planche 16) est sans doute de sa main.
Le dessin de Marc Henniquiau est moins connu, mais il semble bien que son talent ait permis une reproduction presque mimétique des visages à la manière de Jacques Martin. Rappelons que ce dernier fournissait à cette époque des crayonnés très poussés, mais l'encrage n'était pas toujours réussi avec le même bonheur par ses "élèves". Il m'est difficile de savoir à quelle page de l'album débute vraiment la participation d'Henniquiau, mais on peut admettre que la deuxième partie de l'histoire lui doit beaucoup. Ces deux cases tirées de la planche 44 reflètent probablement la qualité de son travail.
Ò Alexandrie est donc un travail d'équipe (on pourrait même dire un travail "de studio") qui a été dirigé de près par Jacques Martin. Ce dernier ne pouvait plus dessiner seul, mais il était encore au début de sa maladie visuelle. Il pouvait probablement bien contrôler la production de ses assistants et c'est ainsi que Rafael Morales dessine ses premiers décors égyptiens. D'emblée, il fait preuve d'une grande maîtrise dans cet exercice.
Mais que raconte cet album, qui est bien souvent dénigré aujourd'hui ? Il n'y a pas de grande aventure, il faut l'admettre, car les combats et les cavalcades sont remplacés par des intrigues de cour. Invité à Karnak par son ami Senoris, Alix se retrouve pris au piège car l'ancien vizir, qui sait comment trouver le trésor de la reine Hatshepsout, est tombé en disgrâce. Le héros devient la cible de deux clans rivaux, où l'on découvre d'un côté la fameuse Cléopâtre, et de l'autre son demi-frère Ptolémée XIII, un enfant capricieux et alcoolique. Tandis qu'Alix s'enfuit et cherche à faire libérer Senoris, Jacques Martin s'attarde avec gourmandise sur cet affrontement entre les descendants corrompus et décadents des pharaons. Cette sombre description de l'histoire des Lagides semble d'ailleurs être le véritable sujet de l'album.
L'intrigue n'est pas vraiment palpitante, même si Alix se démène et risque sa vie. On s'intéresse d'avantage aux personnages qui sont parfois de vieilles connaissances. On découvre la séduisante Cléopâtre, dont le charisme semble dominer Alix, et on retrouve l'honnête Senoris, qui est victime de son intégrité, ainsi que l'intriguant Qâa, dont les mystérieux pouvoirs vont rendre de grands services au héros du récit.
A la fin du récit, Alix retrouve Cléopâtre avec qui il noue une relation ambigüe. On se demande alors s'il faut résumer Ô Alexandrie comme une nouvelle aventure amoureuse d'Alix ?
Tel est donc cet album qui réécrit l'histoire officielle d'une manière souvent subtile. Ô Alexandrie a rapidement été catalogué comme un "album Morales" et cela explique peut être pourquoi il est aujourd'hui bien mésestimé. En le relisant aujourd'hui, je le trouve pourtant assez caractéristique de cette dernière période "martinienne" qui est brillante, et que l'on peut reconnaître par ses intrigues dramatiques, son ambiance souvent pessimiste, son contexte historique bien documenté et ses images minutieusement dessinées. J'en conclus ainsi qu'Ô Alexandrie est tout simplement le dernier album d'Alix dont le scénario et le dessin ont été bien maîtrisés par Jacques Martin.