Bonsoir
J'ai lu et apprécié !
Louisiana sera une saga en plusieurs épisodes, et ce premier opus porte le titre de
La Couleur du Sang. Derrière ce titre symbolique se cache une œuvre amère et implacable. Et nous sommes à mille lieues d'
Autant En Emporte Le Vent. La scénariste, Léa Chrétien, a aussi voulu écrire une histoire de femmes. Homme y est synonyme de mauvais et la misandrie effleure derrière le drame.
L'intrigue se déroule en Louisiane, en 1810.
Laurette est l'épouse d'Augustin, un planteur. Alors que la jeune femme se révèle humaine face à la tragédie de l’esclavage, son mari incarne la violence, le racisme et la misogynie. On parlerait aujourd'hui de prédateur. Telle mère, telle fille. Tel père, tel fils. Les deux enfants du couple, Joséphine et Antoine, reproduisent le modèle parental. Le comportement d'Augustin pousse au suicide l’esclave noire dont il avait fait sa chose. Et Maly, l'amie noire de Joséphine, meurt alors qu'elle accouche de l'enfant d'Antoine. Ces tragédies poussent Laurette et Joséphine à se révolter contre un système inique et destructeur.
Le scénario est d'une grande violence. Comme le dit Dante dans sa
Divine Comédie,
Lasciate ogne speranza, voi ch'intrate (Vous qui entrez ici, laissez toute espérance). On pense aussi au très récent
Shi de Zidrou et Homs.
La couverture de Gontran Toussaint est magnifique : les deux héroïnes se consolent sous un fond de soleil rougeoyant. On pense à un
Angélus de Millet profane. La posture de Laurette et de Joséphine nous fait cependant comprendre que le soleil se couche sur leurs espoirs de bonheur, et qu'il ne leur reste que le sang, le labeur, les larmes et la sueur (
Blood, toil, tears and sweat, merci Winston Churchill !).
D'une façon plus globale, le dessin est au diapason du texte : les traits des visages sont durs, l’âpreté de la vie omniprésente dans des mouvements crispés.
On peut enfin saluer la restitution criante de vérité de la Louisiane.
Et les couleurs sont franches, dures, comme les émotions ressenties par les personnages.
Une œuvre implacable, comme l'époque qu'elle stigmatise.
Bonne soirée
Eléanore