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326Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mer 23 Déc - 14:03

eleanore-clo

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vieux sage
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Bonjour

La femme papillon est une BD écrite par Michel Coulon et dessinée par Grégory Mardon.

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Gred Mardon est un bédéiste qui se met en scène dans des œuvres intellectualistes. Malheureusement, les ventes de ses ouvrages s'effondrent, titre après titre. Aussi, son éditeur lui conseille de se réorienter et de dessiner des comics, avec un super-héros de préférence noir ou maghrébin ! A force de réfléchir, notre scénariste imagine le personnage de Butterflywoman, une femme de ménage ayant acquis ses pouvoirs dans un accélérateur de particules, où elle s'était réfugiée pour fuir le harcèlement sexuel de son employeur. L'idée séduit l'éditeur et  l'ouvrage est un succès. Une effigie de la femme papillon est fabriquée pour accompagner Greg durant sa tournée de dédicaces. Cependant, dans le cosmos, la rencontre de deux trous noirs crée un étrange rayonnement qui donne vie à l'effigie. Et que fait une super-héroïne dans notre monde de violence et de terrorisme ?  

Résumer l'intrigue réduit clairement le projet des deux auteurs, et je confie être quelque peu embarrassée par l'image véhiculée par mon introduction  Embarassed .
En effet, La femme papillon est un objet à n dimensions où l'auteur entremêle avec fantaisie et bonheur les comics, le conte mythologique, le féminisme et le monde de l'édition. Côté comics, la référence est immédiate que ce soit par les super-pouvoirs et l'anonymat de la super-héroïne, ou encore par l'existence d'un talon d'Achille (elle doit régulièrement respirer du pollen de fleurs faute de quoi sa force disparaît  Laughing ). Mais Coulon n'a pas voulu faire une pâle copie de Spiderman. Il nous emmène donc du côté des légendes et plus particulièrement celle de Pygmalion et de Galatée (https://fr.wikipedia.org/wiki/Pygmalion_et_Galat%C3%A9e). Partant de là, Greg va donc s’énamourer de sa créature... Le féminisme est aussi à l'honneur et Butterflywoman est la digne héritière de Wonderwoman avec l'humour en plus. La vignette représentant la super-héroïne portant Greg blessé dans ses bras, sur fond d'une affiche cinématographique où l'acteur principal fait de même avec une actrice, est un clin d'œil à la condition féminine. Enfin, on rit beaucoup dans cette mise en abyme. Le héros de la BD est l'homonyme du dessinateur et il travaille comme lui pour Futuropolis ! Coulon, à l'instar de Ferri, met en scène un auteur de BD sauf que Paris a remplacé Les Ravenelles (https://www.bedetheque.com/serie-4491-BD-Retour-a-la-terre.html). L'auto-dérision tendre est ici reine. Une autre mise en abyme est à remarquer : la femme papillon est l'héroïne de la BD et aussi de la BD dans la BD  Smile !

Dans un tout autre registre, l'ouvrage se veut aussi engagé et il aborde, avec un volontarisme paisible, différents problèmes sociétaux de la France du XXIème siècle. L'ex-femme de Greg sert des repas aux Restos du Cœur, la super-héroïne dort dans un village de tentes montées par des sans-papiers, le meilleur ami de Greg est issu de l'immigration et l'enfant du bédéiste est gardé en alternance par ses deux parents. Le misérabilisme n'est pas de mise et le regard porté sur toutes ces situations est profondément optimiste. 
En fait, toute la BD se veut légère et positive. Il n'est pas anodin que Coulon ait créé de toutes pièces un anti-Bataclan où la tentative d'attentat se termine sans victime grâce à l'intervention de la femme papillon. Et bien évidemment, la fin est heureuse  Very Happy. Nous avons ainsi droit à un conte de Noël moderne !

Je suis restée sur ma faim concernant les dessins. Le style est semi réaliste, à l'instar d'un Alfred. Les paysages urbains parisiens fleurent bon la réalité (Montmartre, Notre-Dame, etc.) et de superbes vignettes de la taille d'une page nous invitent à la contemplation (Butterflywoman posée sur une des gargouilles de Notre Dame de Paris). Il me semble néanmoins que le dessin pourrait être davantage travaillé car la ligne est souvent sacrifiée au profit de l'expressivité.

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Voilà donc une bande dessinée de qualité. Elle ne bénéficiera pas des feux de la rampe a contrario du dernier Blake et Mortimer. Néanmoins, elle mérite d'être lue. Je crois aussi qu'il faut retenir le nom du scénariste, Michel Coulon, car son premier texte laisse entrevoir d'immenses qualités.

Bonnes fêtes de fin d'année à tous

Eléanore

327Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Jeu 24 Déc - 10:54

Raymond

Raymond
Admin

Je ne suis pas un fan de Grégory Mardon, qui a déjà une longue carrière derrière lui. Il a dessiné dernièrement d'assez bons albums, comme "le Travail m'a tué" ou les Bijoux de la Kardashian", mais il a aussi publié quelques BD du genre "art et essai" (comme Corps à Corps ou le Fils de l'Ogre) qui m'ont laissé plus perplexe.

Ce que tu décris me fait plutôt penser à une BD "art et essai".   Wink

En plus il y a du super-héros (ou plutôt une super-héroïne), ce qui n'est pas vraiment ma tasse de thé.  deso

Je ne vais donc pas me précipiter là-dessus. Mais on verra si je trouve cet album dans une bilbliothèque ...   Question Idea


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328Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Jeu 24 Déc - 11:50

Raymond

Raymond
Admin

Mais je ne vais pas en rester sur ces propos négatifs. J'ai lu dernièrement Anaïs Nin, sur le mer des mensonges de Léonie Bischoff et c'est une belle BD dont j'ai envie de parler.

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Il n'est pas besoin de rappeler que ce livre a été plusieurs fois sélectionné par différents jury parmi les meilleures œuvres de l'année 2020. Cette mise en lumière a suffi pour réveiller ma curiosité.  Wink

Anaïs Nin est une femme écrivain assez connue du XXème siècle, dont je n'ai jamais rien lu. Elle a écrit plusieurs romans et surtout un journal intime en double version, un journal "officiel" qui a été expurgé et un journal secret dans lequel elle raconte ses amours infidèles et sa découverte des plaisirs charnels. C'est ce dernier livre qui semble être à l'origine du scénario de cette BD. Certains critiques présentent cet album comme un biopic, car les faits sont réels, mais je le considère plutôt pour ma part comme un de ces classiques "romans d'apprentissage" (apprentissage du plaisir évidemment) qui offrent toujours au lecteur le bonheur de découvrir une conclusion optimiste. Et de fait, malgré l'aspect scabreux et immoral du récit, il n'y a "presque" rien de scandaleux dans cette BD qui se distingue par sa délicatesse, son impertinence et sa bonne humeur.

Puisqu'il s'agit d'un récit littéraire, il y a bien sûr l'envie de le comparer cette BD à d'autres œuvres classiques et je n'ai pas pu m'empêcher de penser à certains romans d'Henri Miller, qui est d'ailleurs un des protagonistes de cet album. Anaïs Nin adopte en tout cas dans sa vie de tous les jours les ambitions hédonistes et le comportement débauché du grand écrivain américain, qui a raconté tout cela dans des livres très connus comme "Sexus" ou "Tropique du Cancer". La BD se passe d'ailleurs au début des années 20, au moment ou Miller écrivait "Tropique du Cancer" et les liens avec le journal intime d'Anaïs Nin sont ainsi très directs.

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L'album utilise beaucoup les récitatifs et cela donne bien sûr l'impression de lire les mémoires d'Anaïs Nin. Je suppose que Léonie Bischoff a repris certains textes du fameux journal mais je n'ai pas cherché à le vérifier, car la finesse et la distinction de ces récitatifs possèdent une envergure littéraire évidente. Ces textes s'accordent très bien avec le style graphique de Léonie Bischoff, qui est à la fois précis et aérien, plein de grâce mais aussi capable d'exprimer toute la palette des sentiments.

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Je parlais d'un "roman d'apprentissage" et cette BD en possède la volonté inaltérable de progresser. Et c'est ainsi qu'après une série d'adultères et d'expériences pourtant très immorales, je ne suis pas arrivé à me fâcher avec la légèreté d'Anaïs Nin. Le livre se termine avec un bilan joyeux et rêveur, au moment ou Anaïs se sent devenue une femme à part entière, et le sentiment de libération qu'elle exprime est d'un optimisme presque contagieux.

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C'est donc une très belle adaptation littéraire, et ceci contredit d'une façon brillante mon opinion habituelle que les transpositions en bande dessinées d'œuvres artistiques classiques sont inexorablement vouées à l'échec, Bien sûr, je n'ai lu aucun livre d'Anaïs Nin et je ne peux donc pas me prononcer d'une façon définitive sur cette adaptation, mais c'est une bande dessinée totalement réussie et pleine de messages troublants. J'aurais dû la sélectionner dans les 10 meilleures BD de l'années 2020 et c'est hélas trop tard pour faire ça. Mais je peux vous recommander sans réserve cette BD si vous voulez faire une belle lecture d'hiver.  Very Happy


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329Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Jeu 31 Déc - 12:50

Raymond

Raymond
Admin

Parfois, je ressens le besoin de lire quelque chose de différent, comme par exemple un livre qui vient d'ailleurs, ou une œuvre relevant d'une autre tradition. Et c'est ainsi qu'après avoir lu quelque critiques élogieuses dans la presse sur L'arbre nu, un manhwa de la dessinatrice coréenne Keum Suk Gendry-Kim, j'ai tout de suite compris que c'était le livre qu'il me fallait pour les fêtes de fin d'année.  Very Happy

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L'arbre nu est l'adaptation en BD d'un roman d'inspiration autobiographique écrit par la romancière sud-coréenne Park Wan-seo, qui a été publié en 1970. Cette dernière racontait sa rencontre avec un peintre nord-coréen survenue en 1951, pendant la Guerre de Corée. Elle tomba amoureuse de cet homme marié et leur relation resta plutôt chaste, mais cet amour aida la future écrivaine à supporter les drames familiaux (mort de ses frères, désordre psychique de sa mère) secondaires à la guerre civile.

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Le récit est marqué par une très grande retenue dans l'expression des sentiments, mais ce choix reflète probablement d'une façon exacte ce que pouvait être le début d'une relation amoureuse en Corée à cette époque. C'est en fait une histoire sentimentale plutôt qu'un roman d'amour et la dessinatrice adopte donc un style volontairement sobre. Les visages restent expressifs mais les personnages évoquent très peu leurs sentiments.

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La guerre de Corée n'est présente qu'en arrière fond de ce roman, par exemple en évoquant le bruit des canons, ou en montrant la destruction d'une maison, ou alors en relatant la nécessité pour les hommes de se cacher lorsque la ville de Séoul est occupée par les communistes. Il y a peu de scènes d'action et le récit reste plutôt intimiste, en s'intéressant aux sentiments des personnages face aux GI américains qui se comportent comme s'ils étaient en pays conquis, ou au vécu des artisans (et du peintre) qui survivent en réalisant des images à caractère commercial. Le récit se distingue parfois par une certaine lenteur, mais il n'est jamais ennuyeux.

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Keum Suk Gendry-Kim varie en effet intelligemment les plans et le rythme de son roman graphique. Elle insère parfois entre deux conversations quelques grands dessins qui prennent toute la page, ou aussi d'occasionnelles séquences muettes ou alors des "arrêts" qui montrent d'étranges gros plans focalisés sur certains détails du décor. Cette variété d'effets révèle bien sûr une véritable maîtrise de la narration en bandes dessinées.

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il n'y a pas de véritable séduction esthétique dans ce livre, car la dessinatrice s'applique plutôt à recréer l'ambiance qui imprégnait la vie coréenne en ces temps de guerre. Son graphisme sobre et un peu triste correspond probablement assez bien à l'atmosphère qui régnait dans le roman original, mais ce n'est bien sûr qu'une supposition. Signalons que la fille de l'écrivaine a écrit une intéressante préface, dans laquelle elle reconnait une réticence initiale à apprécier cette BD, toutefois suivie d'une émotion plus grande à la relecture de l'ouvrage, se terminant avec la conclusion que la dessinatrice avait bien compris l'écrivaine. C'est ainsi une adaptation littéraire qui semble réussie.

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Je ne suis pas sûr que L'arbre nu (le roman graphique) soit un chef d'œuvre, car mon premier sentiment (en refermant le livre) était un peu mitigé, mais c'est sans aucun doute une BD d'une très haute tenue et digne d'éloges. Peut-être que mon ignorance de la vie coréenne m'a empêché d'apprécier certains détails du livre ?

C'est en tout cas une BD qui rencontre un véritable succès critique, et d'une façon méritée. Peut-être gagne t-elle au fond à être relue ?

C'est en tout cas un roman graphique que l'on peut recommander. Very Happy


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330Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mar 5 Jan - 10:25

Raymond

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J'ai dit plus haut tout le bien que je pense d'Anaïs Nin de Leonis Bischoff.

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Leonie Bischoff est interviewée d'une Façon intelligent et détaillée sur le site PlanèteBD :

https://www.planetebd.com/interview/leonie-bischoff/1362.html#image


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331Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Dim 17 Jan - 10:08

Raymond

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Admin

Il y a parfois des critiques qui font rêver ! Je n'ai pas vu hier en librairie la Ballade pour Sophie, une BD réalisée par deux portugais inspirés (Juan Cavia et Filipe Melo), mais  la critique de BDZoom me fait maintenant envie.

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"Comment rater sa vie en réussissant" l'intitule Didier Quella-Guyot et c'est un bien beau thème. C'est aussi un gros album de 300 pages, qui prend du temps pour être lu, mais dont le dessin est agréable.

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Je m'en souviendrai lorsque les librairies réouvriront ! L'article se trouve à cette page :

http://bdzoom.com/163657/actualites/comment-rater-sa-vie-en-la-reussissant/


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332Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Sam 30 Jan - 17:31

eleanore-clo

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vieux sage
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Bonjour

Je vais commencer cette chronique de Ballade pour Sophie par remercier Raymond pour sa trouvaille. Clairement, cette BD passera sous le regard des critiques. Clairement, elle ne touchera pas le grand public. Et pourtant, et je pèse mes mots, c'est un chef d'œuvre  Very Happy . Tout y est : l'émotion, le rythme, la poésie, la musique, l'Histoire et le graphisme. Et le mariage est harmonieux, facile à lire et ô combien riche.

Ballade pour Sophie est un roman graphique écrit par Filipe Melo et dessiné par Juan Cavia.

Julien Dubois, pianiste célèbre, a fui l'humanité. Il vit seul dans une grande maison, avec son majordome, Marguerite. Il soufre d'un cancer et est aigri. C'est alors qu'une journaliste, Adeline Jourdain, frappe à sa porte dans le but de l'interviewer. Le vieil homme refuse d'abord l'entretien. Puis il finit par accepter face à l'insistance de la jeune femme. Et il va se confier et raconter toute sa vie : une vie riche de tragédies, comme la Seconde Guerre mondiale, mais aussi de bonheurs, comme la musique. Le fil conducteur de cette vie est l'étrange amitié, ou jalousie, on ne sait pas, entre Julien et Frédéric Simon, un autre pianiste. Le scénariste nous conte deux vies, qui parfois s'éloignent mais qui toujours finissent par se croiser, d'une façon ou d'une autre.

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Les personnages sont parfaitement typés que ce soit l'ambitieuse mère indigne de Julien ou le généreux clochard Poux. Leurs actes nous interrogent et nous font réfléchir sur ce nous aurions fait à leur place.
Ainsi, la mère de Julien regarde du côté de Romain Gary (La promesse de l'aube), d'Hervé Bazin (Vipère au poing) ou encore de Léopold Mozart (les tournées exhibitions de Wolfgang Amadeus). Et la relation mère-fils est clairement un des sujets forts de l'ouvrage. Quoiqu'il en soit, le scénariste réserve une destinée très morale à cette maman qui récolte ce qu'elle a semé...
Quant à Frédéric Simon, il est dépeint come un ange. D'ailleurs son piano s'envole lorsqu'il joue. Et il semble n'aimer que la musique... Simon incarne aussi la vertu puisqu'il s'oppose aux nazis. Et qui dit ange dit démon. Julien Dubois serait-il un démon? Peut-être mais alors un démon bien ambigu puisqu'il jalouse et admire Frédéric Simon, et l'aide dans les moments les plus difficiles.

La BD réfléchit aussi sur le 4ème art et oppose la variété à la musique classique. On pense ainsi à Serge Gainsbourg comparant ses compositions et celles de Brahms. En fait, où s'arrête le divertissement et où commence le sérieux ? Ou plus raisonnablement, est-ce que cette dichotomie manichéenne et sotte a un sens ? En fait, tel Janus, Julien a deux talents pianistiques, un orienté vers le passé et Chopin, et l'autre tourné vers l'avenir et la variété. Une personnalité donc riche et complexe : bourrue et aimante, triste et gaie, généreuse et voleuse. Il incarne donc l'humanité avec ses penchants et ses contradictions, faisant parfois penser aux deux avatars de Milou dans Tintin au Tibet : ange ou démon ?
Un autre point majeur de la BD est le choix de sa destinée. La critique de BDZoom sur l'ouvrage (http://bdzoom.com/163657/actualites/comment-rater-sa-vie-en-la-reussissant/) s'intitule : "Peut-on perdre sa vie en la réussissant ?" Cependant, le dictionnaire de l'Académie Française donne plusieurs définitions pour le verbe réussir : https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9R2337#:~:text=Verbe%20transitif.,R%C3%A9ussir%20une%20sauce. Et clairement, la première est la bonne puisque la réussite de Julien ne lui plait pas, alors qu'elle parait enviable à tout en chacun. La question qu'on peut donc se poser est celle du bonheur. Le bonheur repose t-il sur le succès ou sur l'adéquation entre ses aspirations et sa vie ?

La dualité est au cœur du récit, nous l'avons perçu avec les différents couples (Julien, Simon), (Variété, Classique) mais elle est aussi présente à travers l'opposition/la complémentarité entre Julien et Adeline. Au début, la relation est houleuse, entre une journaliste tenace et un grincheux solitaire. Et puis, étrangement, les deux opposés se rapprochent jusqu'à la note finale dont je ne vous dirai bien évidemment rien  Smile ! Un autre contraste mérite d'être souligné : celui entre la mère de Julien et Marguerite. Au final, qui est la vraie maman du héros ? La biologique ou l'adoptée ?

La vieillesse est aussi un thème du récit. Vieillesse heureuse ou vieillesse triste ? That's the question. Et la réponse change au fur et à mesure que le récit progresse. Nous découvrons que Julien connait un bonheur tranquille avec Marguerite. Et grâce à Adeline, il va se pardonner son passé. L'interview en devient une confession, au sens religieux du terme. Du coup, la fin de vie du pianiste est paisible et gaie, comme le Requiem de Fauré. L'artiste maudit est devenu le mentor heureux.

Last but not least. La BD est militante et il n'est pas du tout innocent que les personnalités positives soient pauvres ou issues de milieux pauvres. Ici, l'argent ne fait pas le bonheur ...



Une autre qualité de la BD est le scénario. En effet, tel Ayroles dans Les Indes fourbes ou Bussi dans Les Nymphéas noirs, Melo joue avec le lecteur et enchaine les rebondissements jusqu'à la pirouette finale. Ceci pour dire qu'on ne s'ennuie jamais et que les 300 pages s'enchainent avec facilité, même si je conseille une lecture sur plusieurs jours pour mieux appréhender le pathos de la rhétorique.

Le graphisme et les couleurs sont splendides. Les visages sont délicieusement croqués, réalistes mais avec un soupçon de caricature qui leur donne un relief et une présence incomparables. Les angles et les lignes brisées sont élevés au rang de science et leur usage se marie parfaitement avec l'intrigue douce-amère. J'ai aussi apprécié les décors qui rendent hommage à l'architecture. La grande maison ou les théâtres fleurent bon la réalité.

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Et puis, représenter le beau-père de Julien sous la forme d'un bouc est non seulement un hommage à Blacksad (L'enfer le silence) mais aussi une belle idée du fait du choix d'un visage humain hircin.
Les couleurs sont signifiantes avec l'usage du noir et blanc pour le camp de concentration, ou encore celui d'un fond rouge pour les moments de passion. Les vignettes représentant l'enfer de la drogue sont psychédéliques à souhait et font penser à La corne de Brume (Chevalier Ardent).

Voilà, j'espère que je vous ai donné envie de lire Ballade pour Sophie. Cette BD est un formidable hymne à la vie, dans ce qu'elle a de triste mais surtout dans ce qu'elle a de beau. Et puis, la fin est heureuse, ce qui est une qualité fort utile par ces temps quelque peu troublés ! N'hésitez donc pas !
Enfin, comme l'ouvrage parle de piano et cite de nombreux morceaux, en voici deux qui ont lancé la carrière de Frédéric Simon : les Etudes Tristesse et Révolutionnaire de Chopin, par Arthur Rubinstein bien évidemment !





Enfin, pour tout ceux qui se plongeront (avec délice  Wink ) dans le roman graphique, je me permets de poser une devinette : quel est le point commun entre Julien Dubois et Robert Schumann ?  

Eléanore

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333Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Dim 31 Jan - 9:23

eleanore-clo

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Bonjour

Pour compléter mon précédent message, je souhaite évoquer la couverture et par derrière elle l'omniprésence de la fumée dans le récit.
La couverture nous présente Julien de dos, les mains levées et tenant une cigarette. Après avoir fait le tour du visage du pianiste, la fumée s'élève, se déforme et se transforme en touches de piano. La première image venant à l'esprit est celle d'un chef d'orchestre levant sa baguette, ici la cigarette, et dirigeant un concerto pour piano (celui de Ravel en sol bien évidemment...). Le moment doit être fortissimo car les deux mains sont levées comme durant une cérémonie religieuse. Du coup, le cercle de la fumée autour du visage de Julien ne matérialiserait-il pas l'auréole d'un saint ? Car le héros ne serait-il pas un ange déchu à défaut d'être un démon ?
En fait, la fumée est omniprésente dans le récit. Et j'y vois une signification car la fumée est mouvante, comme la vie et aussi car son opacité cache certains détails que nous ne souhaiterions pas voir !
Voilà, j'arrête (temporairement?) là mon panégyrique. En espérant ne pas vous avoir trop ennuyé par mes proposv Smile .

Bon dimanche
Eléanore

334Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Dim 31 Jan - 9:48

Raymond

Raymond
Admin

En tout cas ... moi, cela m'intéresse beaucoup !   pouce

C'est manifestement un album qui mérite d'être lu !

Mon libraire favori continue à vendre des albums sur le pas de porte, après que l'on ait fait une commande par e-mail, et j'irai lui faire une petite visite.  Wink


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335Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Dim 31 Jan - 10:34

Raymond

Raymond
Admin

eleanore-clo a écrit:(...)
je me permets de poser une devinette : quel est le point commun entre Julien Dubois et Robert Schumann ?  

Eléanore

Je n'ai pas lu l'album, mais je dirai que c'est probablement le sentiment d'avoir raté sa vie. Wink


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336Je viens de lire - Page 14 Empty Ballade Sophie Dim 31 Jan - 10:56

eleanore-clo

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vieux sage
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Merci d'avoir participé au jeu. pouce    

Le mal être mental est un aspect que je n'avais pas vu ! clap Celui auquel je pense est plus physiologique... Dans la page ci-dessous, regardez la main droite de Julien.

Et ce matin, j'ai découvert une référence majeure de l’œuvre : Richard Clayderman, pianiste au croisement de la musique classique et de la variété, dont un des tubes est Ballade pour Adeline Very Happy Bon, je sens que je vais pouvoir postuler comme rédactrice à BDZoom ou à ActuaBD  Laughing

Eléanore  

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337Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mer 10 Fév - 10:09

eleanore-clo

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Bonjour

Décidément, le Portugal et la dictature salazariste constituent une source inépuisable de références pour les auteurs. Et après Pereira prétend de Tabucchi puis de Pierre-Henri Gomont (https://lectraymond.forumactif.com/t1559-pierre-henry-gomont-et-pereira-pretend), voici Sur un air de Fado de Barral. Le dessinateur de Nestor Burma rend d'ailleurs hommage à ses confrères car un de ses personnages se nomme Pereira et surtout car l'intrigue est voisine. A noter aussi, et beaucoup plus surprenant, un clin d’œil rempli de tendresse et de poésie à la série Broussaille de Pé et Bom.

Je viens de lire - Page 14 Couv_413630.

Fernando Pais exerce la profession de médecin. Il soigne tous ses patients, que ce soit les inspecteurs de la police politique, leurs victimes ou plus simplement les lisboètes de son quartier. L'intrigue court sur deux lignes temporelles : 1958 et 1968. Ces deux années correspondent à des moments politiques importants de la vie lusitanienne mais aussi à des tournants dans la vie de Fernando. A l'occasion des élections présidentielles de 1958, le général Delgado affronte le candidat du régime et Fernando se marie avec Marisa une jeune opposante à l'Estado Novo (https://fr.wikipedia.org/wiki/Estado_Novo_(Portugal)). En 1968, le dictateur est victime d'un AVC et le doutor prend un nouveau chemin de vie avec sa dernière conquête, Ana...

A l'instar de Boris Pasternak dans Le Docteur Jivago, Barral entremêle savamment la vie politique du pays et la vie privée de ses personnages. Il est à noter que les deux héros des deux livres exercent la même profession. Ainsi, Fernando soigne les inspecteurs de la PIDE (https://fr.wikipedia.org/wiki/Pol%C3%ADcia_internacional_e_de_defesa_do_estado), et, par ce biais, nous pénétrons au cœur du dispositif. Rien ne nous sera épargné, des scènes de tortures à la bassesse des policiers. Et côté tragédie grecque, le frère du héros, Antonio, est un des piliers de la PIDE... L'atmosphère de la capitale est étouffante. Chacun surveille son voisin avec la menace d'une incarcération arbitraire à la clé. Chacun prend aussi parti. Et comme Gomont ou plutôt Tabucchi, Barral nous livre une démonstration éblouissante d'une société fracturée, où les familles se déchirent et où même les religieux, pourtant si choyés par Salazar, hésitent sur la conduite à tenir. Par ailleurs, faute de pouvoir s'exiler, beaucoup empruntent la voie de la fuite intérieure : Fernando enchaine les conquêtes féminines et son ami Horacio écrit des romans fantastiques. Un autre dérivatif est bien évidemment le Fado. Le Portugal a souvent été qualifié par les 3 F, le fado, Fatima et le football. Et bien évidemment, le chant triste et nostalgique nourrit les nuits des héros.  



Notons que les intitulés des chapitres de la BD sont en portugais (O último a sair que apague a luz, le dernier qui s'en va éteint la lumière) ce qui renforce l'atmosphère lusitanienne.
Last but not least, les guerres coloniales constituent l'arrière plan de cette fresque. Fernando a fait son service militaire en Guinée-Bissau, il courtise l'épouse d'un colonel engagé en Angola et deux bouquet d’œillets en page 100 (période 1958) et 105 (période 1968) préfigurent joliment le futur...

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Quoi qu'il en soit, le livre se lit très facilement car un savant suspens sur les choix et le devenir de Fernando nous pousse à tourner les pages.

Les dessins respirent Lisbonne et Barral enchaine les cartes postales, mais pas seulement car toutes celles et ceux qui ont visité la capitale portugaise reconnaitront l'âme de cette cité : les collines et les tramways du quartier de l'Alfama, le paisible front de mer, l'antique gare centrale, les grandes contre-allées de l'Avenida da Liberdade, les murs tapissés d'azuleros (https://fr.wikipedia.org/wiki/Azulejos) etc.
Je viens de lire - Page 14 Fado_9_tram_78
Le trait épais de Barral est très classique et je confie être admirative devant son travail sur les visages. Des expressions magnifiquement campées reflètent l'âme des protagonistes. La colère, la joie, la désillusion ou encore l'amour se lisent dans presque chaque vignette. Du grand Art.
Notons que les couleurs de la BD sont portées par une puissance dominante brune. On pense au sépia des vielles photographies, à la nuit lisboète ou encore à une certaine tristesse. Le Fado donc !

Je souhaite conclure cette chronique par la superbe couverture du livre. Elle attire l'œil. Sur un fond d'azulejos, les ombres menaçantes de la police politique cernent Fernando, le symbole parfait d'une société cadenassée.

Sur un air de Fado est une œuvre magnifique, oserais-je dire le deuxième chef d'œuvre de 2021, après bien évidemment Ballade pour Sophie  Smile  . Plus encore que Pereira prétend elle nous plonge dans le cœur lusitanien. L'épouse de Barral est portugaise, et nul doute que ses racines ont profondément influencé l'ouvrage.

Eléanore



Dernière édition par eleanore-clo le Sam 13 Fév - 15:35, édité 3 fois

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338Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mer 10 Fév - 14:30

Raymond

Raymond
Admin

Décidément, tu nous donnes très envie de lire ce que tu commentes ! Very Happy

J'ai vu passer quelques critiques sur le Web (BDZoom par exemple) mais ce n'était pas aussi dithyrambique ni aussi précis.

Je vais probablement m'y intéresser. En attendant, Nicolas Barral répond aux questions du journaliste de BDZoom sur cette page : Wink

http://bdzoom.com/163824/interviews/%c2%ab%e2%80%89sur-un-air-de-fado%e2%80%89%c2%bb-une-histoire-lisboete%e2%80%a6/




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339Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Jeu 11 Fév - 9:54

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonjour

Oui. J'ai apprécié ce livre d'autant plus qu'il porte une valeur qui m'est très chère : celle de la seconde chance.
Après, l'intrigue est vraiment très proche de celle de Pereira prétend avec des destins proches pour les personnages. Et de mémoire, cette BD n'avait pas séduit tou(te)s les lectrices(eurs).
A chacun de se faire son opinion Very Happy
Après le style graphique de Barral est fort différent de celui de Gomont, peut-être plus charmeur.

Eléanore

340Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Ven 12 Fév - 9:58

Raymond

Raymond
Admin

Sur un air de fado reçoit une critique très élogieuse de Charles-Louis Detournay également !

Je viens de lire - Page 14 Sur-un12

Son texte se trouve sur cette page d'ActuaBD :

https://www.actuabd.com/Coup-de-coeur-Sur-Un-Air-de-Fado-la-dictature-de-Salazar-par-le-prisme-de


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341Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Ven 26 Fév - 10:20

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Le plongeon est une BD scénarisée par Séverine Vidal et dessinée par Victor Pinel.

Je viens de lire - Page 14 Couv_413113

Yvonne, une veuve octogénaire, vit seule. Comprenant qu’elle aura de plus en plus de difficultés à garder son autonomie, elle prend la douloureuse décision de vendre sa maison et de rentrer en EPAD. Elle y découvre un autre univers, fait de règles, d’autorité infantilisante, de soins incompréhensibles, de soucis mémoriels, mais aussi de chaleur humaine, de complicité, de belles transgressions voire même d’amour.
 
Je viens de lire - Page 14 Plong110 Je viens de lire - Page 14 Plong210

Séverine Vidal anime des ateliers d’écriture en EPAD. Elle se met d’ailleurs en scène. En fine connaissance de ce monde à part, la scénariste brosse un vaste panorama, oserais-je dire une micro comédie humaine. Tous, quels que soient leurs passés, se retrouvent à vivre ensemble. Yvonne, dynamique et rebelle, s’emploie à faire souffler un vent de liberté et de jeunesse d’esprit. Le mouroir devient un  lieu de vie. La fin de la BD est heureuse avec un superbe jeu sur les multiples sens du mot plongeon.

Clairement, la vieillesse n’est plus taboue dans le monde de la bande dessinée. Après Les vieux fourneaux et L’obsolescence programmée des sentiments, nous retrouvons ce territoire nouveau, un territoire lumineux pourtant, et dans lequel tous nous évoluerons, d’une façon ou d’une autre. La BD n’est pas triste. Elle est au contraire fertile et riche en espérances. Une furieuse envie de vivre transcende la nostalgie du passé. Et les moments heureux ne se résument pas aux rares visites. Et puis, dans ce monde si spécial, les soignants sont à l’honneur. Youssef, l’infirmier, est bien plus que cela. Il est l’ami et le complice qui donne de la saveur à l’EPAD. Cette chaleur humaine ne se limite d'ailleurs pas à l'établissement puisque Martial, l'ami d'Yvonne, prend tous les risques pour elle...

Je viens de lire - Page 14 Plong112

Le style graphique de Pinel fait penser à celui d’Aimée de Jongh, notamment avec la superbe vignette d’Yvonne nue se regardant dans le miroir. Ce dessin est sublime et, de plus, se marie parfaitement avec le dialogue dans lequel Yvonne pastiche le propos de l’acheteuse de sa maison : « de beaux volumes mais il y a tout à refaire ». En fait, l'acquisition du domaine par le jeune couple crée une nouvelle histoire, reflet de celui d'Yvonne soixante années auparavant, amorce d'une boucle sans fin. Cette vignette est un chef d’œuvre que je n’hésite pas à mettre au pinacle de la BD, au même niveau, par exemple, que celle iconique de Schmettreling vu de dos dans QRN sur Bretzelburg.

Je viens de lire - Page 14 Plong111 Je viens de lire - Page 14 Plong211

Les couleurs sont douces, paisibles contribuant à l’ambiance mi-figue mi-raisin de la BD.
Voilà donc une très belle œuvre que je vous recommande. N’hésitez pas  Very Happy . Et pour conclure sur une ultime note, je vous propose de sublimer la couverture. Yvonne y est figure un poisson (bleu) dans un bocal. Ne pouvons nous pas, à l'instar de l'héroïne, défier le destin et nous projeter sur la célébrissime couverture de l’album de Nirvana ? L’enfance et la vieillesse se rejoignent. La boucle est bouclée.

Je viens de lire - Page 14 Nirvana-Nevermind-CD-Album-1052238117_L

Eléanore

342Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Ven 26 Fév - 10:32

Raymond

Raymond
Admin

Ce n'est donc pas un album triste ! J'avais lu quelques comptes-rendus de cet album et je craignais que ce soit un peu le cas.   Wink


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343Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Sam 27 Fév - 10:48

Raymond

Raymond
Admin

En fait, j'aurais peut-être dû mettre dans ce sujet ma récente lecture de "Sapiens" ? Je vous en mets donc ici une copie !

L'anthropologie est une science qui semble à priori assez éloignée de la bande dessinée, et pourtant ! On vient en effet d'adapter en BD un livre semble t-il très connue de Yuval Noah Harari (un anthropologue israélien) qui s'intitule Sapiens, la naissance de l'humanité. Les adapteurs sont David Vandermeulen (scénario) et Daniel Casanave (dessin).

Je viens de lire - Page 14 Sapien12

Mais pourquoi me suis-je lancé dans cette lecture ? Peut-être parce que j'aime bien les BD de Daniel Casanave ? Probablement aussi parce que certains libraires exposaient très avantageusement ce bouquin sur leurs rayons  et que ceci a titillé ma curiosité. Bref, finalement je l'ai acheté, ne serait-ce que pour lire quelque chose de différent des fictions habituelles.

Et j'ai ainsi découvert un livre qui a l'audace de vouloir écrire l'histoire de l'humanité ... mais la vraie humanité, celle des temps préhistoriques ! Il y avait alors plusieurs espèces humanoïdes qui cohabitaient sur la surface terrestre et cette idée apparait toute simple. Elle me semble toutefois lumineuse.

Je viens de lire - Page 14 Sapien13

Et sur cette intuition de départ, Harari développe diverses hypothèses qui cherchent à répondre à la question fondamentale : pourquoi l'homo sapiens sapiens (donc l'homme actuel) est-il devenu l'espèce ayant réussi à éliminer toutes les autres (à savoir l'homme de Néanderthal, l'homme de Java et j'en passe) ? Le chercheur propose ainsi des solutions qui valent de qu'elles valent (tout n'est pas forcément vrai), mais qui esquissent une séduisante histoire de l'humanité.  Cool

Je viens de lire - Page 14 Sapien14

Bien sûr, la question principale (pour notre forum  Wink ) est quand même de savoir si la BD est le meilleur vecteur pour enseigner l'anthropologie ? Et à mon avis ... il est probable que non. Les auteurs (Casanave et Vandermeulen) se donnent certes beaucoup de peine pour amuser le lecteur, mais l'exposé d'une théorie nécessite tout de même beaucoup de texte. Par ailleurs, l'introduction de petits trucs propres à la BD dans le scénario, avec l'idée d'intéresser le lecteur, ressemble davantage à des digressions futiles qu'à des intermèdes intelligents. J'ai le sentiment qu'il aurait été préférable pour les auteurs de cette BD de s'adresser sans complexe à des lecteurs affutés et désireux de savoir. Mais malgré ces quelques ajouts inutiles, le livre reste intéressant et on finit même par s'habituer à la petite image du prof qui développe son savoir, et qui nous fait découvrir les théorie modernes de l'anthropologie.

Je viens de lire - Page 14 Sapien15

Peut-être aurais-je mieux fait de lire directement le vrai livre de Yuval Noah Harari mais ... il est aussi probable que je n'aurais jamais eu l'idée de l'acheter. Wink  Cette BD est donc finalement assez utile, même si elle se présente sous une forme métissée.

Je suis en tout cas très content de cette lecture, même si ce n'est pas un chef d'œuvre du 9ème Art !

Et puis, on ne peut pas lire tous les jours que des chefs d'œuvre !   Very Happy


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344Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Sam 27 Fév - 11:23

Raymond

Raymond
Admin

Sinon, j'ai enfin lu hier après-midi Ballade pour Sophie et c'est effectivement un excellent album !

Je viens de lire - Page 14 Ballad15

C'est d'abord une très bonne histoire, passionnante de bout en bout et il y là le mérite du scénariste Filipe Melo qui se révèle être un excellent conteur. Eleanore-clo a déjà tout résumé et je ne détaillerai pas à nouveau cette intrigue qui raconte la vie et le bilan de carrière d'un pianiste à succès. J'y relèverai plutôt le choix malicieux du titre, que l'on ne comprend qu'à la fin du livre, et qui est un des mystères que l'on essaie de comprendre tout au long de la lecture de cette BD. Ballade pour Sophie est au fond un drame assez tendre, qui se montre plein d'ironie et de sagesse à propos de cette "foire aux vanités" que peut être une grande carrière. Mais qu'est-ce d'ailleurs qu'une vie réussie ?  Cool

Le dessin caricatural de Juan Cava donne un charme inattendu à cette histoire qui est au départ surtout mélodramatique. Il n'y a nul doute qu'avec un dessin neutre (ou qu'avec des images platement réalistes), cette BD n'aurait pas eu la même saveur.

Je viens de lire - Page 14 Ballad17

Les personnages sont croqués avec humour par le dessinateur et cela donne à cette BD ce ton ironique et tendre qui évite tout ce qui pourrait être du pathos ou de la lourdeur.  Les visages sourient par ailleurs beaucoup, même dans les circonstances pénibles, et l'humour devient une sorte de politesse, pour reprendre la fameuse expression de Boris Vian.

C'est donc un bel album, qui laisse un souvenir attendri et qui figurera probablement dans mon "top ten" à la fin de l'année.   Wink


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345Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Lun 5 Avr - 23:32

eleanore-clo

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Bonsoir

Je viens de lire Megafauna de Puzenat, et disons le d'emblée, suis très dubitative.

Je viens de lire - Page 14 Megafa10

L'œuvre est une uchronie où néandertaliens et homo-sapiens coexistent. Les premiers habitent dans le Nord et les seconds dans le Sud. Une muraille gigantesque séparent les deux espèces. Timoléon, jeune médecin sapiens, est envoyé en mission par delà la frontière pour soigner ses "cousins" nordiques. Il découvre une civilisation plus respectueuse de la nature, une culture autre où les métaux précieux et la sexualité n'ont pas la même valeur que dans le Sud. Il découvre aussi la malédiction des néandertaliens, à savoir l'infertilité des femmes. Durant son périple, il se lie avec le fille du roi mais doit prendre la fuite face à l'hostilité des guérisseuses locales.

Puzenat essaie de construire un manifeste en faveur de la différence. Il promeut la tolérance et s'efforce de démontrer que la civilisation est universelle et ne doit pas s'apprécier à l'aune de l'espèce, de la taille et même du genre. L'intrigue ne suit malheureusement pas. En premier lieu, l'auteur manque d'originalité et multiplie les emprunts. Ainsi Game of Thrones fournit la muraille et les amérindiens apportent les valeurs écologiques ainsi que leur architecture (les habitations des néandertaliens font penser aux pueblos des hopis). En deuxième l'intrigue est invraisemblable. Ainsi, l'acculturation de Timoléon le conduit à renier ses origines et à entreprendre une croisade "purificatrice" pour nettoyer le Sud, devenu le symbole du mal. Notons enfin une invraisemblance scientifique car les néandertaliens étaient d'une taille comparable à celle des sapiens, et non des géants.
En fait, la BD est surtout un apologue dénonçant notre société moderne, son racisme ordinaire, la place qu'elle accorde aux femmes, sa religiosité,son manque de respect pour l'environnement, ses injustices sociales, etc. Tout un programme ! Mais qui trop embrasse mal étreint et les messages multiples finissent par produire une image brouillée. De plus, la dernière page tournée, on ne distingue plus les héros des anti-héros, tous sont primaires, âpres, intolérants, antipathiques et quelque peu sanglants. Au final, aucune voie n'est proposée si ce n'est celle de la guerre et de l'assassinat.

Le graphisme de Puzenat ne m'a pas séduite. Il manque de réalisme même si certaines grandes vignettes proposent de beaux décors. Dans le même genre, je préfère nettement Alfred. Les couleurs sont variées mais manquent de nuances, de dégradés, etc.

Je viens de lire - Page 14 Megafa11

Je viens de lire - Page 14 Megafa12

Bon. Bah. Bof. Une BD appelant à se remettre en cause certes, mais surtout une œuvre par trop bien pensante, franchement négative, caricaturale et manquant de finesse. Néanmoins, Monique Younès, la critique BD de RTL, ne partage pas mon avis et a élu Mégafauna, BD du mois  Rolling Eyes  .

A vous de voir

Eléanore

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346Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mar 6 Avr - 11:56

Raymond

Raymond
Admin

Le dBD du mois de mars (N° 151) a fait lui aussi beaucoup d'éloges sur cet album, en lui donnant la meilleure note possible (niveau "chef d'oeuvre"), et j'i éprouvé la même perplexité que toi en feuilletant cette BD. Pour l'instant, je me suis abstenu.   scratch

A noter que BDZoom a également fait une bonne critique de Mégafauna, en classant cette œuvre parmi les BD pour la jeunesse.    Rolling Eyes 

  Neandertal et Sapiens se jaugent sans s’affronter dans une uchronie médiévale captivante… | BDZoom.com

Pour l'instant, j'ai plutôt envie de faire l'impasse.   Very Happy


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347Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mer 7 Avr - 16:38

eleanore-clo

eleanore-clo
vieux sage
vieux sage

Bonjour

Pierre Dillon, l'énigme Lapérouse est une BD écrite et dessinée par Beuzelin.

Je viens de lire - Page 14 Couv_419421

La Pérouse est un marin et explorateur français ayant vécu au XVIIIème siècle. Il est missionné par Louis XVI qui souhaite développer la connaissance de l'Océan Pacifique. Or l'expédition disparait corps et bien, et son sort fait l'objet de nombreuses hypothèses. La BD raconte l'l'enquête d'un britannique, Peter Dillon, qui va retrouver les restes des bateaux et élucider le mystère de la disparition.

Le scénario s'appuie sur des faits réels, tant la disparition de La Pérouse (https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Fran%C3%A7ois_de_La_P%C3%A9rouse) que la recherche menée par Peter Dillon (https://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Dillon). Seules les circonstances du décès de La Pérouse sont spéculatives. Un récit ancré dans l'Histoire donc. En fait, j'ai surtout apprécié la tonalité des textes et l'écriture. On croirait lire du Stevenson et je me permets de reproduire ci-dessous un extrait de L'Ile au Trésor, dans la traduction de Laurie  Very Happy .

L’Hispaniola roulait ferme, ses boutes-hors tirant sur les poulies, son gouvernail battant la poupe, toutes ses membrures craquant, gémissant et grinçant comme le plancher d’une usine. J’étais obligé de me tenir accroché à un cordage pour ne pas tomber ; tout tournait autour de moi : car, quoique assez bon marin quand nous étions en marche, je n’ai jamais pu m’habituer sans mal au cœur à me sentir ainsi roulé comme une bouteille flottante, surtout le matin, et l’estomac vide. Peut-être l’aspect désolé de l’île, avec ses bois mélancoliques, ses rochers stériles et les brisants sur lesquels on voyait la mer se précipiter en écumant, avec un bruit de tonnerre, avait-il aussi sa part dans l’impression de malaise et de tristesse que j’éprouvais. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’en dépit du soleil brillant au-dessus de nos têtes, en dépit des oiseaux qui remplissaient l’air de leurs gazouillements, et de la satisfaction qu’on éprouve généralement à voir la terre après une longue traversée, je sentais, comme on dit, mon cœur descendre à mes talons ; et jamais, depuis ce premier regard, je n’ai pu seulement penser sans dégoût à l’île au trésor.
Nous avions en perspective une matinée de rude labeur ; car il n’y avait pas le moindre souffle de vent, et il fallait par conséquent mettre les canots à la mer pour remorquer le schooner, à la rame, l’espace de trois ou quatre milles, jusqu’à l’étroit goulet qui conduisait au havre du Squelette. Je m’offris à aller dans un des canots, ou je n’avais naturellement que faire. Il faisait une chaleur accablante et les hommes pestaient de leur mieux en poussant l’aviron. Le canot où je me trouvais avait pour chef Andersen, qui, au lieu de maintenir la discipline, murmurait plus haut que les autres : « Enfin, dit-il en jurant, ce n’est pas pour toujours, heureusement ! »
Cela me parut fort mauvais signe, car jusqu’à ce moment les hommes avaient travaillé de bon cœur et de bonne humeur. Évidemment, la vue seule de l’île suffisait à mettre toutes les cervelles en ébullition.
Pendant toute la durée de cette laborieuse manœuvre, John Silver, debout dans le canot de tête, servit de pilote ; il connaissait manifestement la passe comme sa poche, et, quoique l’homme qui tenait la sonde trouvât fréquemment plus ou moins d’eau que n’en indiquait la carte, John Silver n’hésita pas une seule fois.


Les vignettes sont belles. Certes Beuzelin ne produit pas des marines du niveau de celle de Pellerin (L'épervier) ou de Delitte. Mais, sa représentation anthropologique est puissante. Les peuplades océaniennes sont reconstituées avec une magnifique subjectivité qui leurs confère une réalité inquiétante.

Je viens de lire - Page 14 3174_P13

Je viens de lire - Page 14 3174_P14

Voilà donc une œuvre plaisante à lire en cette période de disette ! Et puis, l'auteur vise à enseigner, ce qui est toujours fort agréable. Je puis donc vous la conseiller sans hésiter, au même titre d'ailleurs que la magazine Canal BD qui l'a choisie pour être un des deux "gros plans" des sorties d'avril et mai   Very Happy

Je viens de lire - Page 14 Alix11

Eléanore

348Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Mer 7 Avr - 16:49

Raymond

Raymond
Admin

Il y a beaucoup de bandes dessinées sur La Pérouse, me semble t-il. Delitte a en effet dessiné une bande dessinée sur cette histoire (dans la série Black Crow), et il y a une aussi  série toute récente qui s'intitule simplement "La Pérouse" et qui est parue chez un petit éditeur. Il me semble aussi avoir lu il y a quelques années une BD qui parlait du mystère de sa disparition, mais mes souvenirs sont assez flous. 

Il y a probablement encore d'autres albums. On s'y perd !   Very Happy

Mais concernant l'album dont tu parles, je retiens ton conseil.   jap


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349Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Jeu 8 Avr - 18:25

Godot

Godot
docteur honoris causa
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Je viens de lire - Page 14 Ballad15

eleanore-clo a écrit:Bonjour

Je vais commencer cette chronique de Ballade pour Sophie par remercier Raymond pour sa trouvaille. Clairement, cette BD passera sous le regard des critiques. Clairement, elle ne touchera pas le grand public. Et pourtant, et je pèse mes mots, c'est un chef d'œuvre  Very Happy . Tout y est : l'émotion, le rythme, la poésie, la musique, l'Histoire et le graphisme. Et le mariage est harmonieux, facile à lire et ô combien riche.

Ballade pour Sophie est un roman graphique écrit par Filipe Melo et dessiné par Juan Cavia.

[...]



eleanore-clo a écrit:
[...]
Voilà, j'espère que je vous ai donné envie de lire Ballade pour Sophie. Cette BD est un formidable hymne à la vie, dans ce qu'elle a de triste mais surtout dans ce qu'elle a de beau. Et puis, la fin est heureuse, ce qui est une qualité fort utile par ces temps quelque peu troublés ! N'hésitez donc pas !

Après avoir lu la présentation d'Eleanore, je voulais lire cette BD. Je l'avais réservé auprès de la médiathèque et j'ai pu la déguster.

eleanore-clo a écrit:

[...] Ceci pour dire qu'on ne s'ennuie jamais et que les 300 pages s'enchainent avec facilité, même si je conseille une lecture sur plusieurs jours pour mieux appréhender le pathos de la rhétorique.


Je me suis jeté dans cet univers et je l'ai lue d'une traite.

Eleanore et Raymond consacrent déjà des posts bien développés, alors je vais me contenter de rajouter une petite "touche" personnelle.

J'ai été pris par l'histoire. L'idée de départ, de voir une jeune journaliste, Adeline, qui s'approche d'un virtuose de piano, vivant dans une propriété luxueuse mais qui se trouve au crépuscule de sa vie. Ne semblait pas très original, surtout, lorsque ce "misanthrope", refuse de la recevoir et la congédie après s'est montré désagréable. Elle insiste et passe la nuit devant la porte, avant qu'elle ne soit reçue par le Maestro, impressionné par l'entêtement de la demoiselle.

Le titre du premier chapitre, Julien Dubois (Le Maestro), m'a tout de suite laissé croire que j'allais avoir droit à différents témoignages et les points de vues différents ses deux pianistes virtuoses : Julien Dubois et Frédéric Simon.

Après avoir débuté l'histoire, je l'ai ressentie différente. Un mystère demande à être élucidé dès les premières pages, pourquoi Julien Dubois, a des doigts amputés? Quelle ingéniosité de ne rester concentré que sur le témoignage de Julien Dubois et de suivre avec lui ses souvenirs, ses déboires et sa transformation en Eric Bonjour. Parfois, il reconnais que ses souvenirs sont troubles.

En découvrant la vie de Julien Dubois/Eric Bonjour, j'ai eu de l’empathie pour lui. Je découvre également ses faiblesses, ses frustrations lorsqu'il endosse le "costume" de Eric Bonjour. Un moment fort, lorsqu'il renie "Poux", celui même qui l'a aidé à ses débuts.

Le titre Ballade pour Sophie prend tout son sens à la fin. C'est également une fin positive, qui me fait aimer cette histoire.

Toutefois, je me suis rapidement douté, dès le début des raisons de l'interview de cette jeune stagiaire Adeline.

C'est une découverte de 2021.

350Je viens de lire - Page 14 Empty Re: Je viens de lire Sam 10 Avr - 10:35

Raymond

Raymond
Admin

eleanore-clo a écrit:Bonjour

Pierre Dillon, l'énigme Lapérouse est une BD écrite et dessinée par Beuzelin.

Je viens de lire - Page 14 Peter_11

La Pérouse est un marin et explorateur français ayant vécu au XVIIIème siècle. Il est missionné par Louis XVI qui souhaite développer la connaissance de l'Océan Pacifique. Or l'expédition disparait corps et bien, et son sort fait l'objet de nombreuses hypothèses. La BD raconte l'l'enquête d'un britannique, Peter Dillon, qui va retrouver les restes des bateaux et élucider le mystère de la disparition.

Le scénario s'appuie sur des faits réels, tant la disparition de La Pérouse (https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Fran%C3%A7ois_de_La_P%C3%A9rouse) que la recherche menée par Peter Dillon (https://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Dillon). Seules les circonstances du décès de La Pérouse sont spéculatives. Un récit ancré dans l'Histoire donc. En fait, j'ai surtout apprécié la tonalité des textes et l'écriture. On croirait lire du Stevenson et je me permets de reproduire ci-dessous un extrait de L'Ile au Trésor, dans la traduction de Laurie  Very Happy .

L’Hispaniola roulait ferme, ses boutes-hors tirant sur les poulies, son gouvernail battant la poupe, toutes ses membrures craquant, gémissant et grinçant comme le plancher d’une usine. J’étais obligé de me tenir accroché à un cordage pour ne pas tomber ; tout tournait autour de moi : car, quoique assez bon marin quand nous étions en marche, je n’ai jamais pu m’habituer sans mal au cœur à me sentir ainsi roulé comme une bouteille flottante, surtout le matin, et l’estomac vide. Peut-être l’aspect désolé de l’île, avec ses bois mélancoliques, ses rochers stériles et les brisants sur lesquels on voyait la mer se précipiter en écumant, avec un bruit de tonnerre, avait-il aussi sa part dans l’impression de malaise et de tristesse que j’éprouvais. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’en dépit du soleil brillant au-dessus de nos têtes, en dépit des oiseaux qui remplissaient l’air de leurs gazouillements, et de la satisfaction qu’on éprouve généralement à voir la terre après une longue traversée, je sentais, comme on dit, mon cœur descendre à mes talons ; et jamais, depuis ce premier regard, je n’ai pu seulement penser sans dégoût à l’île au trésor.
Nous avions en perspective une matinée de rude labeur ; car il n’y avait pas le moindre souffle de vent, et il fallait par conséquent mettre les canots à la mer pour remorquer le schooner, à la rame, l’espace de trois ou quatre milles, jusqu’à l’étroit goulet qui conduisait au havre du Squelette. Je m’offris à aller dans un des canots, ou je n’avais naturellement que faire. Il faisait une chaleur accablante et les hommes pestaient de leur mieux en poussant l’aviron. Le canot où je me trouvais avait pour chef Andersen, qui, au lieu de maintenir la discipline, murmurait plus haut que les autres : « Enfin, dit-il en jurant, ce n’est pas pour toujours, heureusement ! »
Cela me parut fort mauvais signe, car jusqu’à ce moment les hommes avaient travaillé de bon cœur et de bonne humeur. Évidemment, la vue seule de l’île suffisait à mettre toutes les cervelles en ébullition.
Pendant toute la durée de cette laborieuse manœuvre, John Silver, debout dans le canot de tête, servit de pilote ; il connaissait manifestement la passe comme sa poche, et, quoique l’homme qui tenait la sonde trouvât fréquemment plus ou moins d’eau que n’en indiquait la carte, John Silver n’hésita pas une seule fois.


Les vignettes sont belles. Certes Beuzelin ne produit pas des marines du niveau de celle de Pellerin (L'épervier) ou de Delitte. Mais, sa représentation anthropologique est puissante. Les peuplades océaniennes sont reconstituées avec une magnifique subjectivité qui leurs confère une réalité inquiétante.

Je viens de lire - Page 14 Peter_12

Je viens de lire - Page 14 Peter_13

Voilà donc une œuvre plaisante à lire en cette période de disette ! Et puis, l'auteur vise à enseigner, ce qui est toujours fort agréable. Je puis donc vous la conseiller sans hésiter, au même titre d'ailleurs que la magazine Canal BD qui l'a choisie pour être un des deux "gros plans" des sorties d'avril et mai   Very Happy

Je viens de lire - Page 14 Alix11

Eléanore

Didier Quella-Guyot (sur BDZoom) a également bien apprécié cet album !

À la recherche de La Pérouse… | BDZoom.com

Cela semble être un bon roman graphique !   Very Happy


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