L'île des morts dans la bande dessinée

Cathrine a écrit:Enfin on arrive en vue de l'île des morts (page 76 de l'intégrale), dont on reconnaît la silhouette rocheuse avec ses cyprès et ses deux colonnes de pierre marquant l'entrée.

J'ajoute également le crayonné de ce dessin, qui figure lui aussi en préface de l'intégrale.

Sur cette image, on reconnait en effet l'archétype de l'Ile des Morts.

Le voilà le "port souterrain", pages 96 et 97 de l'intégrale.

Pour quitter l'île des morts et s'en aller vers l'au-delà, il faut bien entendu un bateau approprié (tout comme pour se rendre sur l'île), et donc si possible, avec un crâne d'animal légendaire en guise de figure de proue. Florence Magnin reste dans le même ton, et distille savamment les ingrédients à connotation mortuaire et imaginaire qui lient son récit...

Raymond a écrit:
Sur cette image, on reconnait en effet l'archétype de l'Ile des Morts.

Oui, mais ce que je trouve aussi intéressant chez Florence Magnin, c'est tout ce qu'elle imagine dans l'île et autour de l'île, comment on s'y rend, comment on la quitte...

et tous les "ingrédients" de l'archétype de l'île des morts qu'elle distille de ci, de là, les cyprès, le bateau, etc.

Après avoir séjourné plusieurs fois sur l'île des morts en compagnie des morts, Lord James et Mary la Noire, en bons pirates vont bien entendu braver la mort, et Mary y laissera la vie. Lord James se rangera alors, et retournera à son ancienne activité d'écrivain, gardant la nostalgie de ses pirateries avec Mary.

Au crépuscule de sa vie, celle-ci viendra le chercher en bateau (son bateau, le bateau de Mary la Noire, qu'on reconnaît ici aisément) pour rejoindre ensemble l'île des morts, pages 112 et 114 de l'intégrale.

Me reste encore à vous parler de quelques bonus, comme ceux-ci, contenus dans la préface de l'intégrale, et représentant l'intérieur de l'île des morts. Ces dessins n'ont ensuite apparemment pas été retenus, dans l'élaboration finale de la série.


A gauche peut-être, un projet de bateau destiné à emmener les "habitants" de l'île des morts vers l'au-delà ou bien un bateau revenu de l'au-delà vers l'île des morts...

A droite, sans doute, un projet abandonné : un bateau qui quitterait l'île des morts pour l'au-delà, par la voie des airs...

Et pour terminer, le crayonné de la couverture et du 4ème de couverture de l'intégrale, qu'on retrouve dans la préface de l'intégrale.



Une vision encore différente de l'île des morts, un peu "architecturée", avec des obélisques et un portique marquant l'entrée.

Là, je sens que c'est Raymond qui va être content. On s'approche bien de la vision archétypale de L'île des morts.

Et je m'aperçois, oh, honte à moi, que j'ai complètement oublié de vous dire que cette série est signée Florence Magnin pour le dessin, oui, ça on l'a dit, et Rodolphe pour le scénario.

Voilà, j'en ai terminé pour Florence Magnin et l'île des morts.

J'ai lu cet album de Florence Magnin il y a très longtemps, et mes souvenirs étaient assez flous. Tes images me ramènent donc des souvenirs.

Moi aussi, je les avais lus, il y a très longtemps, les 2 tomes de la série (empruntés en bibliothèque). A cette époque, je ne connaissais pas le tableau de Böcklin (L'île des morts).

Puis, j'ai découvert assez récemment sur le web, l'image de l'arrivée du bateau de Mary la Noire à l'île des morts (celle qui t'a plu justement, dans ce sujet). Alors, hop, des souvenirs me sont revenus, et ni une, ni deux, je me suis acheté l'intégrale aussi sec .

Restent donc Manara et Sorel...

Comme je n'ai pas soumis la poursuite du sujet aux votes, cette fois-ci, c'est moi qui choisis.

Ce sera donc Guillaume Sorel, avec la série L'île des morts (voilà un titre explicite au moins ) en 5 tomes, scénario de Thomas Mosdi.

On va commencer par citer des extraits de la préface de l'intégrale (édition 2000), rédigée par Druillet.

"L'île des morts...
J'ai lu dans un journal parisien il y a quelques années, qu'Arnold Bôcklin par cette oeuvre avait fasciné un grand nombre de gens. Entre autres, Dali, Freud, Giger, Mick Jagger ! Ma pomme ! et ... Adolf Hitler ? Ah bon ! ... Tant pis...
Mais revenons à la réalité. Inutile de dire qu'à la vision des albums de Sorel et Mosdi la liste précédente s'allonge de leurs deux noms. Guillaume Sorel trempe vraiment ses pinceaux et plumes dans cette eau noire et profonde. Il y a quelque chose qui ne ment pas en lui, on ne fait pas un travail d'une telle qualité sans être absolument, loyalement sincère."

Préface accompagnée, comme il se doit, d'un dessin de Druillet représentant l'île des morts, extrait de l'album Gaïl, dont j'ai déjà parlé dans ce sujet. Et hop là, le revoilà :


Ça ne fait pas de mal de le remettre en guise d’introduction à L'île des morts par Guillaume Sorel.

Dans la série L'île des morts par Sorel et Mosdi, un jeune peintre va se retrouver au coeur d'une intrigue qui le mènera sur l'île des morts. Il devra y affronter un redoutable sorcier, Aristide de Lunac, qui n'est autre qu'un de ses ancêtres... Arnold Böcklin lui-même apparaît au cours du récit, ainsi que certaines de ses toiles représentant L'île des morts, qui semblent être la clé de bien des mystères, convoitises, passages vers l'au-delà, où d'anciens dieux oubliés aspirent à revenir sur terre...


Les toiles de Böcklin sont reproduites façon Sorel, de nombreuses fois dans la série, comme des jalons du récit, notamment ici, à la dernière page du tome 1 In Cauda Venenum.

Notre héros, le jeune peintre, va se rendre une 1ère fois sur l'île des morts, planches 35 et 36 du tome 2 Mors Ultima Ratio.


On appréciera entre autres la barque avec le fameux spectre debout à son bord, et les deux statues de pierre mi chat, mi cerbère ou encore gargouille qui gardent l'entrée de l'île des morts...

Allez hop, pour le fun, regardons de plus près la case 2 de la planche 35.

On retrouve planche 30 du tome 3 Abyssus Abyssum Invocat, une reproduction d'une des toiles de Böcklin, façon Sorel, avec un ciel rouge du plus bel effet, enfin à mon goût personnel.

Ne me demandez pas pourquoi ce bateau, 1ère planche du tome 4, Perinde Ac Cadaver figure ici dans ce sujet sur L'île des morts et la bande dessinée. Je ne saurais pas trop l'expliquer. Disons qu'il est dans l'ambiance... Comme le bateau de Mary la Noire, il semble expressément dessiné pour embarquer pour l'île des morts... Et puis, il est pile dans le ton tout en rouge et noir que Sorel a donné à la série L'île des morts, accord de couleur qui convient, on ne peut mieux au sujet...


Et puis, et puis... il y a, qu'il me plaît ce bateau à la voilure rouge sang profond, et puis c'est tout.

On se retrouve sur L'île des morts, à la 1ère planche du 5ème et dernier tome de la série, Acta est fabula.

Les protagonistes du récit, conversent sur une terrasse de pierre, juchée haut sur le rocher de l'île des morts, très haut, quasiment dans le ciel... comme aux frontières de l'au-delà...

Pour le fun, à nouveau, nous regarderons de plus près le haut de la planche que j'aime particulièrement, pour ses draperies rouge profond entre autres (un peu comme la voilure du bateau )
On notera en haut à gauche, l'habile petite vignette qui nous indique que la scène se situe sur l'île des morts.

Toujours, dans le tome 5, Acta Est Fabula, planche 11, j'aime particulièrement cette case, où l'île des morts est discrètement évoquée mais bien présente, à l'arrière plan.

Au premier plan, Aristide de Lunac, le puissant sorcier par lequel se trame toute l'intrigue...

A la planche 32 (du tome 5, Acta Est Fabula), on retrouve la barque de l'île des morts et son spectre debout, le tout dans une ambiance de carnaval quelque peu macabre...

Je terminerai par cette représentation de l'intérieur de l'île, planche 38 du tome 5, Acta Est Fabula, où l'on peut observer dans le rocher, les cavités/caveaux caractéristiques du tableau de Böcklin,

qui peuvent suffire à elles seules à évoquer l'île, tout comme la barque et le spectre ou encore une masse de cyprès savamment regroupés...

On poursuit, ce soir, avec Manara, dans un tout autre registre... si je suis en forme.

Il n'y a pas de doute que Sorel se réfère à l'univers de Böcklin.

Ceci dit, je ne suis pas vraiment un admirateur de Sorel (et je n'ai pas lu l'oeuvre que tu viens de montrer). J'ai peut être tort mais je trouve son univers trop morbide.

Cependant, j'ai tout de même apprécié l'année dernière son album qui s'intitule "les derniers jours de Stefan Zweig". Sur le plan graphique, son travail est très habile car il arrive à suggérer d'une manière saisissante la souffrance de l'écrivain.

J'avais d'ailleurs chroniqué cet album à cette page :

https://lectraymond.forumactif.com/t60p105-je-viens-de-lire

En tout cas, merci pour toutes ces images !

De Sorel, je ne connais que la série L'île des morts, découverte grâce à mon intérêt pour le tableau de Böcklin. J'aime beaucoup son graphisme.

J'ai regardé ta chronique sur Les derniers jours de Stefan Sweig. Graphiquement, ça a l'air très intéressant. Cela me plaît beaucoup en tout cas. Ce que tu dis de l'album ne m'étonne pas. Sorel est quelqu'un qui semble vraiment fouiller ses sujets, quelqu'un "d'absolument, loyalement sincère," comme l'écrit Druillet.

Je me sens la pêche de terminer ce soir, mon sujet, avec Manara. Alors, j'y vais.

Bon, comme chacun sait, Manara, est surtout connu pour parsemer ses BD de jeunes et jolies femmes dénudées.

L'album Revoir les étoiles de la série Les aventures urbaines de Giuseppe Bergman, dont je vais vous parler ici, ne faillit donc pas à la règle.

Une jeune femme qui va être suivie dans ses péripéties "nudistes" par le bon et brave Giuseppe, possède un livre où sont reproduits de nombreux chefs d'oeuvre de l'histoire de l'art. La malheureuse, chaque fois, qu'elle ouvre son livre, se retrouve projetée dans l'univers du tableau qu'elle vient de regarder, ce qui, Manara oblige, est assez souvent prétexte à nous montrer tout ou partie de son anatomie. Mais bon, pour la "visite" du tableau de L'île des morts, elle restera vêtue. Ah bon ? Ben oui, pas de ça ici, quand même.

Notre héroïne, dont j'ai oublié le nom, se retrouve partie à accoster sur L'île des morts, planches 56 et 57 de l'album.
J'ai parlé un peu trop vite. Manara se débrouille quand même, pour nous montrer ses jambes, lorsqu'elle monte dans la barque. Il a du métier, ça se voit.

Oui, oui, pour le fun bien sûr, une vision plus rapprochée de la case 2, planche 56, celle avec la vision typique de L'île des morts.

La belle a bien entendu, une position un peu déhanchée et quelque peu suggestive, pour mener sa barque...

Une fois sur l'île des morts, la jeune femme va y faire des rencontres, non pas coquines , mais "culturelles", on va dire. Elle va y rencontrer des artistes disparus chers à Manara.

Elle rencontre donc ainsi successivement, Groucho Marx, Pablo Picasso, Hugo Pratt, Andréa Pazienza (dixit Le blog BD de Mr Thanagra : http://thanagra.typepad.com/blog/2008/02/068-de-lart-ou-du-cochon-suite.html ) et Federico Fellini.

Andréa Pazienza est un auteur de BD italien, que je ne connais pas. Mais grâce au Blog BD de Mr Thanagra, j'ai voulu en savoir un peu plus. Andréa Pazienza serait décédé à l'âge de 32 ans, d'une overdose (à vérifier).

Sur cette page : http://thanagra.typepad.com/blog/2008/02/067-de-lart-ou-du-cochon.html du Blog BD de Mr Thanagra, vous pouvez voir, la jeune femme "visiter" d'autres tableaux connus, dont Le déjeuner sur l'herbe...

Voilà, j'ai passé en revue L'île des morts par Schuiten, Yslaire, Druillet, Florence Magnin, Sorel et Manara.

L'île doit certainement aussi se nicher dans d'autres BD, que je vous propose de nous faire découvrir ici, si vous en connaissez... ou bien, si j'en découvre d'autres, ce sera prétexte à venir en parler ici pour compléter le sujet...