Eh bien ! L’identité de ce pharaon ne m’a pas surpris et correspond à ce que j’avais imaginé de prime abord (et pas l’hypothèse alternative antonienne que j’avais glissée pour être complet, mais sans grande conviction). D’Antoine il n’est du reste pas question, sauf une allusion p. 9, 1ère v. ...
Alix a-t-il pris le parti d’Octave ou d’Antoine dans la guerre civile ? D’Octave, bien évidemment « oui », comme il nous sera précisé : Alix a combattu à Actium aux côtés d’Agrippa, de Rufus et du préfet Barbatus (p. 9, 1ère v.).
Valérie Mangin n’a pas oublié sa vocation d’auteur de SF en glosant sur l’origine des pyramides. L’allusion au règne des géants antédiluviens apporte sa petite touche de mystère, mais la structure même de la « Mère de Pyramides » est plus fictionnelle qu’archéologique. Page 33, 2 dern. v., le dessinateur réussit un habile compromis entre les styles égyptien et précolombien (des crocs qui sortent de la gueule des sphinx, la commissure des lèvres en spirale, et le colosse juste à côté qui n’est pas sans rappeler ceux de Tula) (*).
Je me suis néanmoins interrogé à propos du volume des tambours de colonnes égyptiennes par rapport à la taille des personnages (p. 11, 6e v.). De mon voyage en Egypte voici plus de trente ans, je n’avais pas conservé cette impression. A vérifier.
Les reconstitutions de monuments pharaoniques par Thierry Démarez sont assez époustouflantes et réussies. J’ai apprécié aussi sa manière de dessiner les légionnaires romains, avec le casque « Coolus » d’époque augustéenne et le gladius de type « Mainz » (et sans ricasso, erreur que commettent nombre de dessinateurs (**)).
Pour le scénario en général, Valérie Mangin s’est souvenue des bonnes vieilles ficelles de la littérature populaire de la fin du XIXe s., comme l’art du déguisement que pointait Jacques Van Herp à propos d’Harry Dickson (son étude chez « Ides et autres »). Je n’en dis pas plus. Beaucoup de rebondissements, qui peuvent aller jusqu’à la flagrante contradiction comme quand tel centurion ordonne à ses hommes de massacrer Alix et ses compagnons (dont X), puis deux pages plus loin tient à X un langage tout à fait opposé. Peut-être ses soldats savaient-ils déjà que cet ordre ne concernait pas ledit X (bien qu’il ait été inclus dans « tous les cinq ») (ouf, je n’ai pas trop spoilé !)… mais disons que ça fait partie de la technique du suspense. En tout cas, on commence à comprendre les réticenses d’Alix vis-à-vis de son ami (?) Auguste. Ben oui, la raison d’Etat…
On attend avec avidité le tome 3 qui semble prometteur.
Bref, un très bon Alix, que je vous engage tous à lire. Qu’on puisse enfin causer et s’poiler.
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(*) Un habille compromis entre les géants dont parle la Bible et les théories evhéméristes sur l’origines des dieux, qui auraient été des mortels remarquable, divinisés. Mais heureusement, Valérie este plus proche de Jacobs que de Roland Emmerich ! A propos de L’ENFANT STALINE, j’ai dit ce que je pensais de cette « archéologie romantique » et de ses thuriféraires MM. Pauwels et Bergier et leurs continuateurs, Von Däniken et consorts. Je dois avoir quelque part dans mes archives un bulletin de l’Académie royale de Belgique du début du XXe s. où un auteur soutenait sans rire que l’Atlantide aurait été un pont entre les civilisations « à pyramides » précolombiennes et égyptiennes. C’est oublier (ou ignorer) que ces architecture colossales sont datables de notre Moyen Age, que les civilisations Aztèques et Incas n’avaient guère plus de deux ou rois siècles d’existence avant que les conquistadores les détruisent. Raison pour laquelle, du reste, Jacques Martin avait renoncé à envoyer Alix chez les Mayas. Mais Sir Stephen, qui découvrit les premiers sites mayas dans la jungle du Yucatan pensait dans les années 1880 (si ma mémoire ne me trahit pas trop) avoir peut-être découvert les vestiges de l’Atlantide dont parlait Platon. Et depuis, cette aura romanesque a perduré. Ainsi Jacobs et L’énigme de l’Atlantide. La force du rêve…
(**) Le ricasso est une sorte de renflement non tranchant de la lame, à la base de celle-ci, contre la garde. Il n’apparaît qu’à la fin du Moyen Age, quand les escrimeurs pour mieux assurer leur prise en main, passent un doigt – l’index – par-dessus la garde de leur épée (ce doigt étant protégé par une seconde garde). J’en ai parlé ici : http://www.peplums.info/pep55ha.htm#25 (il est entendu que les épées à ricasso n’ont strictement rien en commun avec les glaives romains).