Nombre de messages : 2083 Localisation : Avec ceux que j'aime Date d'inscription : 20/06/2011
Bonsoir
Les éditions Dargaud poursuivent la publication de l’intégrale des Peanuts avec le tome 21 qui couvre les années 1991 et 1992.
Je profite de l’occasion pour parler de cette œuvre que j’apprécie beaucoup.
On peut la voir sous de multiples angles. Le premier est bien évidemment l’humour, un humour doux-amer bien évidemment.
Et le comique de répétition permet de varier infiniment chaque gag et d'en explorer toutes les facettes. Cela fait d’ailleurs penser au musicien Arvo Pärt dont la musique tintinnabule à nos oreilles avec d'infimes variations entre chaque refrain : . A titre d'exemple, voici deux fluctuations sur le célèbre thème du Baron Rouge. Je me suis permise de traduire le texte.
Bonjour, les équipes au sol J'ai une nouvelle mission importante en vol ce jour. Mais j'ose dire qu'elles sont toutes importantes. Et quoi ? Contact J'y suis, dans mon Soptwith Camel, volant haut, au-dessus de la France Je scrute précautionneusement le ciel à la recherche du baron rouge, Je dois l'abattre Ah ! Ah ! l est là Cette fois-ci, je t'ai eu Baron Rouge. Cette fois-ci, tu es à moi. Prends ça ! Et ça ! Et ça ! Et ça ! Et... Je hais ce Baron Rouge.
On peut aussi voir dans l’œuvre de Schultz une description tout en finesse de l’Amérique profonde. Par exemple, la bande ci-dessous évoque la journée de Thanksgiving. Thanksgiving est une fête traditionnelle américaine : https://fr.wikipedia.org/wiki/Thanksgiving_(%C3%89tats-Unis) . Le repas comprend généralement de la dinde, donc un oiseau, ce qui terrorise les amis volatiles de Snoppy qui se cachent derrière lui. Je dirais encore à peu près 5 minutes. Plus que deux minutes. C’est bon. Thanksgiving est terminé.
Les Peanuts comprennent de nombreux éléments fantastiques, comme par exemple la transformation du bassin à oiseau en patinoire.
Génial. Il a neigé. Et il fait froid. Cela veut dire que c’est le moment de jouer au Hockey. Aussitôt que Woodstock aura fini de lisser la glace.
Néanmoins, il me semble que Schultz explore surtout les méandres du cerveau humain et, tel un psychologue, explore les différentes facettes de notre vie. Il n’y a pas plusieurs héros dans les Peanuts, mais un seul unique, le lecteur.
Illustrons le propos. Je vous propose de commencer par Snoopy qui incarne la fuite (tellement humaine) dans l’imaginaire.
En retard pour l'opération ? Vous avez probablement dû faire les rondes du matin ? Êtes-vous en retard car vous avez tant de patients à voir ? Non, je ne pouvais pas attendre le bouton de l'ascenseur.
Lucy et Schroeder incarnent eux l’amour non partagé.
Schroeder, si je te disais que j’ai le pressentiment que toi et moi seront mariés un jour, est-ce que tu glousseras ou est-ce que tu t’esclafferas ? Je ne sais pas. C’est difficile à dire comme cela à l’improviste. Schroeder, j’ai le pressentiment que toi et moi seront mariés un jour. Ah ! Ah ! Ah ! Il s’est esclaffé.
Lucy incarne aussi l’absence d’écoute.
Aide psychiatrique 5 cents. Le docteur est là. Autrefois, une personne pouvait vivre à l’écart des problèmes du monde. Et puis, il est advenu que tous, nous savons tout sur ce qui se passe. Le problème maintenant est que nous savons tout à propos de tout à l’exception de qui se passe. C’est pourquoi tu te sens nerveux… Cinq cents s’il te plait. Je suis un peu à court d’argent. Je suis toujours nerveux et je ne sais toujours pas ce qui se passe.
Charlie Brown incarne au choix la dépression ou la résilience.
De temps à autre, je suis envahi par le doute.
C’est le moment des moments… le commencement d’une nouvelle saison… c’est un moment à savourer intensément.. un moment pour…
Peppermint Patty et Marcie incarnent la fausse amitié, la jalousie ou encore la tendance à la facilité.
Comment épelles-tu Lancelot, Marcie ? Une fois de plus, vous n’avez pas fait votre devoir, hein, monsieur ? Qu’est-ce qui t’arrive Marcie et pourquoi m’appelles-tu Monsieur ? Monsieur ! Monsieur ! Monsieur ! Monsieur ! Monsieur ! Monsieur ! Monsieur ! C’était un sorte d’amusement, n’est-ce pas Monsieur ? Depuis le moment où me suis levée ce matin, je me sens en pleine forme.
On pourrait parler aussi de Spyke avec la tentation de fuir la civilisation, pour, au final, essayer de la reproduire.
Non. Faites juste attention à ne pas conduire sur ma rallonge. Joyeux Noël...
Voilà, voili, voilou. J’espère que vous avoir faire redécouvrir l’œuvre sous un nouvel angle, et surtout vous avoir donner envie de la relire.
Nombre de messages : 36888 Age : 69 Localisation : Lausanne Date d'inscription : 03/03/2009
Merci de cette présentation, qui me fait réaliser que je ne lis plus les Peanuts depuis au moins une trentaine d'années.
Je me souviens bien de la "saga du Baron Rouge", que j'ai découverte dans les pages de Charlie mensuel au cours des années 70. C'est un humour assez fin et très spécial, qui ne se perçoit qu'avec la fréquentation très régulière des personnages. Il se fonde aussi sur la répétition de certaines situations et il donne même le plaisir (de temps en temps) d'y retrouver des dilemmes psychologiques assez fréquents.
Je m'identifiais volontiers à Schroeder, un pur qui joue toujours du piano, ou à Linus, un petit garçon intelligent (le plus intelligent peut-être de tous) qui est totalement dépendant de sa couverture. Je détestais par contre Lucy, que je voyais comme la "méchante" de la série .
Snoopy, pour sa part, était une sorte de "maverick", c'est à dire un personnage assez fantasque qui vit dans son propre monde.
Nombre de messages : 36888 Age : 69 Localisation : Lausanne Date d'inscription : 03/03/2009
Damned, les "japs" viennent de publier une biographie de Schultz sous la forme d'un manga ! Le livre n'est pour l'instant pas traduit, mais peut être que cela va se faire un jour.
C'est encore une BD qui raconte la BD !
Mais évidemment, l'esthétique très "manga" de cet ouvrage ne plaira pas à certains.
Nombre de messages : 2083 Localisation : Avec ceux que j'aime Date d'inscription : 20/06/2011
Bonsoir
La publication de l'intégrale des Peanuts s'est terminée début novembre avec l'édition du 25ème tome. Il faut donc saluer les éditeurs tant américain (Fantagraphics Books) que français (Dargaud) d'avoir réussi un défi peu commun. Le premier tome a été traduit en 2005 et seize années ont été nécessaires pour réaliser ce titanesque projet. Il est à noter que chaque opus a été préfacé par des acteurs majeurs de la BD. Et le dernier a même bénéficié d'une introduction de Barack Obama .
Certes, l'âge d'or de la série s'est terminé au milieu des années 1990. Je crois néanmoins qu'il faut saluer l'engagement de Charles Schultz ainsi que sa fidélité envers son lectorat et sa création. Il a continué à dessiner les Peanuts alors qu'il était malade. Et sa dernière bande précède son décès de quelques semaines . Elle fut publiée le 13 février 2000 et vous la trouverez ci-dessous :
Les médaillons imaginés par l'auteur constitue un florilège des meilleures sagas de la série : Snoopy et le Baron Rouge, Woodstock et sa surfaceuse, Lucy et son cabinet d'aide psychologique, Marcy et Peppermint Patty recevant leurs notes de devoir, Linus et sa couverture, etc.
Le texte accompagnant le dessin est aussi très beau. En voici une traduction : Chers amis J'ai eu la chance de dessiner Charlie Brown et ses amis pendant presque 50 années. Cela a représenté l'accomplissement des rêves d'enfants. Malheureusement, je ne suis plus capable de tenir les délais imposés par une parution quotidienne. Ma famille ne souhaite pas que les Peanuts soient repris par quelqu'un d'autre, c'est pourquoi j'annonce ma retraite. Durant toutes ces années, les éditeurs m'ont loyalement soutenu et les amateurs de la série m'ont aidé et aimé. Je leur en suis reconnaissant. Charlie Brown, Snoopy, Linus, Lucy, ... Comment pourrais-je jamais vous oublier ?