Depuis cette discussion, j'ai relu (assez rapidement) les Sarcophages d'Açoka, qui regroupe astucieusement (et qui résume assez bien) les trois albums de la trilogie.
Je me suis demandé si le charme surgirait enfin lors d'une seconde lecture ... malheureusement non.
Ce n'est pas un mauvais album, loin de là. La plupart des "clauses de style" propres à B&M sont respectées, que ce soit pour le scénario (ambiance des années 50, longs récitatifs et création d'une atmosphère réaliste et précise avant de passer au fantastique) ou pour le dessin (Juillard se montre très à l'aise). Il y manque toutefois quelque chose pour que je croie complètement à l'histoire.
Prenons par exemple le "Subglacior", cet engin qui sert à voyager sous la calotte glaciaire. Je n'arrive pas à croire une seule seconde que cela puisse marcher. L'épaisseur de la couche de glace n'est pas constante en Antarctique, et il y a des montagnes, donc des roches qui peuvent apparaitre si on s'y déplace à profondeur constante. De plus, est-ce que l'idée d'un tel appareil a été soumise à un scientifique (Jacobs l'aurait certainement fait) ? Et surtout, est-ce qu'il y a la moindre possibilité que cela marche ? Je ne pense pas que cette idée ait vraiment été creusée et cet appareil me semble relever de l'imagination la plus fantaisiste (et de la SF naïve d'il y a une cinquantaine d'années). Dès lors, ce n'est plus vraiment du Blake et Mortimer, série dans laquelle chaque détail a été réfléchi et investigué à un point tel ... qu'on ne peut finalement que croire à ce paraîtrait invraisemblable dans d'autres circonstances.
Il y a autre chose qui manque probablement aux "Sarcophages", c'est ce ton unique qu'adopte Jacobs lorsqu'il raconte quelque chose. Ses longs récitatifs créent une ambiance qui lui est propre, et qui lui permettent de faire passer ses convictions. Je ne ressens pas la même force de persuasion dans les textes d'Yves Sente, probablement parce que ce dernier (contrairement à Jacobs) n'est pas un homme de théâtre, ou peut être parce qu'il ne croit pas autant à ce qu'il écrit. Sente construit des scénarios ingénieux, et il a de bonnes idées, mais il n'envoûte pas lecteur parce qu'il lui manque (je pense) l'authenticité du style. Il écrit quelque chose qui ressemble à du Jacobs, mais le texte ne contient pas la logique interne du grand maître. Le charme que devraient avoir ses albums de B&M en est diminué de manière conséquente.
Il reste, en lisant les "Sarcophages", le plaisir de retrouver un style de Bd, ainsi que de vieux personnages que j'aime bien. Cela me conduit à admettre que le seul plaisir que me procure cette trilogie de Sente et Juillard, c'est effectivement celui de la "madeleine de Proust".
Je me suis demandé si le charme surgirait enfin lors d'une seconde lecture ... malheureusement non.
Ce n'est pas un mauvais album, loin de là. La plupart des "clauses de style" propres à B&M sont respectées, que ce soit pour le scénario (ambiance des années 50, longs récitatifs et création d'une atmosphère réaliste et précise avant de passer au fantastique) ou pour le dessin (Juillard se montre très à l'aise). Il y manque toutefois quelque chose pour que je croie complètement à l'histoire.
Prenons par exemple le "Subglacior", cet engin qui sert à voyager sous la calotte glaciaire. Je n'arrive pas à croire une seule seconde que cela puisse marcher. L'épaisseur de la couche de glace n'est pas constante en Antarctique, et il y a des montagnes, donc des roches qui peuvent apparaitre si on s'y déplace à profondeur constante. De plus, est-ce que l'idée d'un tel appareil a été soumise à un scientifique (Jacobs l'aurait certainement fait) ? Et surtout, est-ce qu'il y a la moindre possibilité que cela marche ? Je ne pense pas que cette idée ait vraiment été creusée et cet appareil me semble relever de l'imagination la plus fantaisiste (et de la SF naïve d'il y a une cinquantaine d'années). Dès lors, ce n'est plus vraiment du Blake et Mortimer, série dans laquelle chaque détail a été réfléchi et investigué à un point tel ... qu'on ne peut finalement que croire à ce paraîtrait invraisemblable dans d'autres circonstances.
Il y a autre chose qui manque probablement aux "Sarcophages", c'est ce ton unique qu'adopte Jacobs lorsqu'il raconte quelque chose. Ses longs récitatifs créent une ambiance qui lui est propre, et qui lui permettent de faire passer ses convictions. Je ne ressens pas la même force de persuasion dans les textes d'Yves Sente, probablement parce que ce dernier (contrairement à Jacobs) n'est pas un homme de théâtre, ou peut être parce qu'il ne croit pas autant à ce qu'il écrit. Sente construit des scénarios ingénieux, et il a de bonnes idées, mais il n'envoûte pas lecteur parce qu'il lui manque (je pense) l'authenticité du style. Il écrit quelque chose qui ressemble à du Jacobs, mais le texte ne contient pas la logique interne du grand maître. Le charme que devraient avoir ses albums de B&M en est diminué de manière conséquente.
Il reste, en lisant les "Sarcophages", le plaisir de retrouver un style de Bd, ainsi que de vieux personnages que j'aime bien. Cela me conduit à admettre que le seul plaisir que me procure cette trilogie de Sente et Juillard, c'est effectivement celui de la "madeleine de Proust".